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Crise sanitaire mondiale : comment les religions abordent la Covid-19 au Bénin
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- Titre
- Crise sanitaire mondiale : comment les religions abordent la Covid-19 au Bénin
- Créateur
- Maryse Assogbadjo
- Editeur
- La Nation
- Date
- 27 avril 2021
- Résumé
- Au Bénin, la Covid-19 passe pour un défi quotidien dans le rang des confessions religieuses. Tout en rivalisant d’ingéniosité, elles placent leur foi en Dieu pour conjurer ce sort qui éprouve le monde en perte de repère. Elles retiennent toutefois de l’avènement de ce virus, un message divin à l’humanité dont la crainte de Dieu laisse encore des questionnements.
- Sujet
- Abdoul-Djalilou Touré
- Catholiques
- Covid-19
- Pluralisme religieux
- Protestants
- Religions endogènes
- Santé
- Détenteur des droits
- La Nation
- Langue
- Français
- Source
- La Nation
- Identifiant
- iwac-article-0002397
- contenu
-
Au Bénin, la Covid-19 passe pour un défi quotidien dans le rang des confessions religieuses. Tout en rivalisant d’ingéniosité, elles placent leur foi en Dieu pour conjurer ce sort qui éprouve le monde en perte de repère. Elles retiennent toutefois de l’avènement de ce virus, un message divin à l’humanité dont la crainte de Dieu laisse encore des questionnements.
Samedi 27 février à l’Eglise catholique St Martin d’Akpakpa. Une messe de noces venait de s’achever. Autour des mariés, la foule que regorgent habituellement ces genres de cérémonies. Apparemment remplis de joie, les invités semblent momentanément se passer des mesures barrières. Mais cette effervescence fera long feu. Des vigiles sont commis pour rappeler systématiquement les gestes utiles contre la Covid-19.
Loin de banaliser la pandémie, le Bénin l’intègre peu à peu dans son vécu, quoique la peur du mal demeure évidente. Alors que le déconfinement total tarde à être effectif dans le monde entier, les religions essayent de s’accommoder de la crise. En leur sein, le mal est interprété comme un appel divin aux errements du monde.
« Tout mal est une interpellation divine. Nous sommes déconnectés de Dieu et il faut se recentrer sur lui qui nous apporte la guérison. Si le Seigneur ne veille sur la maison, en vain veilleront les gardiens. Cette maladie a permis à l’Eglise d’utiliser les moyens actuels de communication pour aller à la rencontre des gens tout en espérant que ces nouveaux choix ne suppriment pas la rencontre de l’Homme », admet Hubert Kèdowidé, directeur diocésain de la communication de l’Eglise catholique.
Cette confession religieuse établit des liens bibliques historiques pour expliquer la survenue de cette crise. « Dans l’ancien testament, toute forme de pandémie était considérée comme une sentence, la punition divine d’un péché qu’on a commis qui vient comme pour ravager l’humanité. La promesse du Seigneur faite à Moïse pour se libérer des égyptiens, s’est traduite par les sept plaies », raconte-t-il.
Pour corroborer sa thèse, il évoque la lèpre comme l’un des premiers signaux divins pour relever le monde en perdition :
« Jésus-Christ va se définir d’abord comme celui qui est envoyé vers les malades, surtout la lèpre considérée en ce moment-là comme un péché grave et mortel et qui avait comme conséquence la séparation de l’individu de ses semblables ».
Les musulmans ne réfutent pas ce point de vue. La croyance en Allah les aide à mieux surmonter les épisodes sombres de la Covid-19. « La communauté musulmane perçoit le mal comme une épreuve provenant de Dieu. Nous la vivons avec beaucoup de foi. Aucune maladie ne peut arriver si ce n’est le plan divin», se convainc Abdoul-Djalilou Touré, imam de la mosquée ‘’Cité tranquille d’Abomey-Calavi’’.
Deux angles d’appréciation
L’Eglise catholique analyse la maladie à coronavirus sous deux angles. Le premier est un regard évangélique interpellatif. « Cette pandémie rappelle à l’humanité, ses limites et la renvoie à une prise de conscience collective. L’homme qui, par le développement, se sent insurpassable, le-voilà mis à genoux et interpellé. Nous sommes rappelés à regarder à nouveau le créateur et à nous situer comme créateur et humbles dans nos succès, dans nos exploits, dans notre manière d’être », analyse-t-il.
Le second, est un regard de confiance. « Quelles que soient nos précautions, étant donné que le mal nous a montré nos limites, nous ne pouvons plus continuer à compter uniquement sur nos forces. Nous sommes invités à renouveler notre confiance envers celui qui reste pour toujours accessible à nous tout en étant inaccessible de par sa nature », recommande-t-il.
La philosophie des autres obédiences religieuses ne s’écarte pas trop de celle des hommes en soutane. Pour elles, la Covid-19 sert de canal pour redresser l’Homme : « A travers cette pandémie, Dieu nous exhorte à une prise de conscience divine dans le but d’être plus humain. Avec la course à la technologie, au matériel, le monde commence par perdre le sens de l’humain et du divin. Nous sommes en train de briser certaines lois de la nature. Dieu nous appelle à corriger notre manière de vivre», souligne Clément Tanasso, pasteur de l’Eglise ‘’la Porte’’ d’Abomey-Calavi.
Les communautés évangéliques ne traversent pas la présente crise avec plus de facilité.
« La pandémie a complétement changé notre manière de vivre. Le nombre de personne admis pour les cultes a été modifié. Nous faisons des cultes intermédiaires pour combler ces fossés dans le respect des mesures barrières », explique-t-il.
Certains chrétiens retracent les origines de cette maladie dans les Saintes Ecritures, en y référant des versets bibliques relatifs aux gestes barrières. Hubert Kèdowidé nuance ces allégations: « La Bible n’a pas prédit la Covid-19. Face à des situations pandémiques à l’époque des prophètes, notamment dans le livre des Lévitiques et des Nombres, la nature s’est déjà confrontée à des maladies graves. Nous pensons peut-être innover des mesures qui en réalité, existaient depuis toujours ». Si la Bible demeure le réservoir dans lequel les chrétiens puisent pour trouver des solutions à cette pandémie, les religions endogènes, se sont inculquées une discipline de groupe depuis des années. Le coronavirus n’a pas eu d’impact sur elles. « Chez nous, les ‘’Throns’’, habituellement, nous lavons toujours nos mains avant d’aller au temple. Aucun fidèle ne peut se prosterner devant les divinités sans respecter cette mesure. Ces gestes faisaient partie de nos habitudes avant la Covid-19», explique Olga Vigouroux, alias Dah Yovo, prêtresse de la divinité Thron Kpéto Déka Alafia.
Ici, les divinités ont été accessibles durant la période du cordon sanitaire décrété par le gouvernement en mai 2020 pour freiner la propagation du virus.
« On ne ferme pas le temple des divinités. Nous y allions toujours pour prier », assure-t-elle. Seule disposition pratique prise au niveau de cette religion, le respect de la distanciation sociale.
La prévention, la meilleure arme
De leur côté, les musulmans savent que la prévention est la meilleure arme pour se préserver de toutes souillures, impuretés ou virus. Le lavage des mains est une recommandation divine ancrée dans leurs habitudes. « Les prescriptions musulmanes recommandent l’ablution (lavage des mains, des parties des membres inférieurs et supérieurs et le visage) avant toute prière », explique Abdoul-Djalilou Touré, imam de la mosquée ‘’Cité d’Abomey-Calavi’’.
L’Eglise catholique a mis en place un comité de veille dès le début de la crise sous l’égide de l’archevêque de Cotonou en vue de suivre de près l’organisation dans le cadre du respect des mesures barrières.
Ledit comité est toujours à pied d’œuvre. « Environ 70% des paroisses ont mis en place un dispositif de rappel sous forme audio qui est répété avant le démarrage des messes en dehors de ce qui se fait dans les annonces en vue de maintenir la sensibilisation », assure Hubert Kèdowidé.
Mieux, une série de modifications a été opérée au niveau de la liturgie (la manière de prier et de célébrer) grâce au concours de la commission liturgique de Rome qui donne des indications à suivre aux chrétiens catholiques.
Illustration : la célébration du baptême qui impliquait autrefois l’imposition des mains et la signature avec l’huile sainte n’est plus de mise. Le coton tige remplace les doigts dans le cadre de cet exercice. Cette même formule a été adoptée au mercredi des cendres, où les prêtres font tomber la cendre sur la tête des fidèles sans aposer la signature.
Idem pour le signe de paix, désormais écarté des rituels chez les catholiques. « C’est un acte religieux que de respecter les gestes barrières tout en vivant pleinement sa foi. Le Covid-19 nous fait gagner en maturité spirituelle », déduit Hubert Kèdowidé.
Ces règles seront inchangées durant la semaine sainte. « Il n’y aura pas de procession le dimanche des rameaux. Nous allons également supprimer le dernier chemin de croix dans la rue », informe-t-il.
Les communautés évangéliques font preuve d’imagination pour mieux affronter la situation.
« Nous sommes obligés de nous adapter à cette pandémie. Nous réfléchissons déjà à la manière d’aborder plusieurs cultes afin de maintenir nos fidèles », projette Clément Tanasso, pasteur de la communauté chrétienne la ‘’Porte’’.
Des précautions certes, mais elles ne suffisent pas pour contrer la Covid-19. Les chrétiens placent Dieu au centre de la dynamique de la recherche de solutions à l’arrêt définitif de la pandémie. « L’Eglise sait que les évènements de la vie passée ont déjà participé à beaucoup de modifications structurelles sans que la foi ne soit modifiée. Elle reste ouverte à tous les appels divins, à tout ce que le Seigneur veut révéler au monde à travers cette crise et est à l’écoute de l’Esprit Saint pour des modifications au besoin dans sa manière de transmettre la foi », assure Hubert Kèdowidé.
Même si chaque confession religieuse essaye de s’adapter à la crise, l’horizon demeure encore un peu flou, aucun remède définitif n’étant encore effectif contre le virus.
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