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Le vrai visage de l'Islam (Suite et fin)
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- Titre
- Le vrai visage de l'Islam (Suite et fin)
- Créateur
- Dodji A. Nyatépé-Coo
- Editeur
- La Nouvelle Marche
- Date
- 13 septembre 1982
- Résumé
- Voir le début de ce texte dans l'édition de samedi 11-9-82.
- Page(s)
- 4
- nombre de pages
- 1
- Langue
- Français
- Contributeur
- Frédérick Madore
- Identifiant
- iwac-article-0005479
- contenu
-
Voir le début de ce texte dans l'édition de samedi 11-9-82.
A toutes ces tentatives de qualité diverse, l’Islam a dû demeurer vivant. 11 était cependant peu préparé, à affronter d'emblée les défis des quelque cent dernières années. Ces défis ont été, en ce qui concerne, d’une double nature. Tout d’abord l’Islam a connu, comme tous les systèmes religieux, un certain affaiblissement spirituel : baisse de la pratique, formalisme excessif, prolifération de dévotions surérogatoires peu légitimes et mêmes superstitieuses, diminution de la moralité — il suffit de se référer aux rumeurs parfois fallacieuses — exagérées, hyperboliques de Musulmans qui à la Mecque ont à la place du thé habituel de bonnes cuvées d’alcool dans leurs bouteilles thermos...
D’autre part, l’Islam a dû, à son caractère global, enregistrer une épreuve particulière l’échec temporel collectif de la communauté : décadence puis chute de l’empire Ottoman, du sultan Calife, extension des colonisations européennes sur la majorité des terres musulmanes, amenuisement de l’éclat et du pouvoir des quelques Etats musulmans demeurés souverains.
Or, devaient nécessairement se demander alors les meilleurs des musulmans, comment une communauté, constituée en vue d’exécuter la volonté de Dieu, et s’y appliquant sincèrement, peut-elle encourir un échec permanent? Une seule réponse est possible : la volonté de Dieu a été, en l’occurrence, mal comprise, à la suite d’interprétations incomplètes et inexactes.
Un seul remède s’impose donc : réinterpréter les sources, afin que la vérité du message divin soit mieux connue et, de ce fait, redevienne spirituellement et temporellement efficace. Telle est, en effet, l’attitude qu’adopte le « réformisme musulman », devant le défi du siècle.
Mais cette solution n’a pas été élaborée sans maints travaux et tâtonnements ; et elle n’a pas encore, selon toute apparence, trouvé son entier épanouissement et une application vraiment générale. Du moins est ainsi procuré un élan qui devrait, longtemps encore, se montrer fécond.
LA METHODE DU REFORMISME
Le réformisme, en quelque sorte, restaure et revivifie l’antique méthode par laquelle la loi musulmane avait été élaborée aux VIIe et VIIIe siècles. Il s’agit de revenir aux sources, au Coran, à l’enseignement du Prophète et des premiers commentateurs ; et c’est pourquoi le réformisme, ou islah, porte aussi le nom de Salafiya, c’est-à-dire retour aux salaf, les « grands ancêtres ».
A ces sources sera de nouveau appliqué l’effort d’interprétation, ijtihad. Toutefois, celui-ci, ce qui est particulièrement logique dans un système sans hiérarchie, ne restera pas confié aux seuls théologiens, mais il sera exercé par tous les musulmans valables, penseurs ou praticiens de toutes catégories, y compris ceux qui détiennent des fonctions sociales et politiques ; les procédés modernes utilisés par la recherche intellectuelle on Occident, critique scientifique, méthode historique, etc — seront employées pour cette recherche.
Le travail de ces hommes nouveaux, munis d’instruments nouveaux, ne manquera pas de produire des résultats nouveaux : et, selon la règle originelle, ceux-ci prendront leur pleine valeur logique le consentement général de la communauté, l'« ijma », les agréera et, de la sorte, les consacrera. Cette phase finale de l’élaboration sera d’ailleurs, dans l’état actuel d’extension mondiale, mais aussi de division intellectuelle, idéologique et politique de la communauté, celle qui offrira, comme nous le constaterons, le plus de difficultés.
La méthode réformiste, appliquée par les disciplines de Mohammed Abdan et de Rachid Rida à la recherche fondamentale et, en quelque sorte, à la révision des données théologiques, suscita, entre 1925 et 1930, de vives objections. On peut citer à cet égard, l’exemple de l’Egyptien Ali Abderrazaq, auteur (d’un ouvrage très hardi sur « l’Islam et les choses du pouvoir ». Procédant à la critique des sources, Ali Abderrazzaq propose, en effet, de distinguer, dans la tradition du prophète, ce qui correspond à l’activité de Mohammed en tant que chef de la communauté d’alors et n’aurait donc plus que la valeur d’un précédent historique, et ce qui ressort à sa mission prophétique proprement dite et garderait son poids décisif ; ainsi se retrouverait introduit, dans l’Islam, le germe d’une distinction entre le spirituel et le temporel.
Mais ces vues suscitent à l’époque, l’indignation de la communauté d’Egypte, aux tendances conservatrices et, en particulier, de l'antique Université d’Al Azhar, qui les censure. Le « consentement » de la communauté se trouve, de la sorte, refusé. Cependant, les réformistes, loin de se décourager, entrent dans une voie nouvelle : ils appliquent leur méthode à la révision graduelle du système juridique, voire rituel de l’Islam.
ADAPTATIONS EN SENS DIVERS
On pourrait aisément multiplier l’es exemples de tentatives tout à fait heureuses à demi réussies ou complètement avortées de modernisation rituelle, juridique, sociale, politique dans l’Islam d'aujourd’hui. Presque toutes se réfèrent, explicitement ou non, au réformisme.
Rappelons simplement d’une part, que presque tous tes socialismes arabes se réfèrent à l’éthique musulmane et se veulent donc arabo-islamiques ; notons d’autre part que l’inverse dans certains Etats conservateurs, une rigueur accrue en matière morale et religieuse d’une formulation nouvelle de la règle de la « commanderie du bien », qui oblige le croyant à Redresser les torts qu’il constate. Ajoutons encore que, sans nullement théoriser, mais dans la ligne plus ou moins consciente de ce réformisme, bien des musulmans d’aujourd’hui se forgent pour eux-mêmes, sous l'empire de la nécessité, des réglés d’adaptation qui leur permettent, en assouplissant certaines pratiques ou interdictions, de se conformer aux servitudes de la civilisation industrielle moderne.
Sans doute n'est-il pas un canton du monde musulman dans lequel d’une manière ou d’une autre, des transformations de ce genre S’effectuent, s’esquissent ou, du moins, se proposent. Sans doute n’est-il pas un seul musulman qui ne ressente, de façon plus ou moins vive et consciente, ce mouvement dans l’Islam, et qui n'en tienne compte soit en se plaçant au moins partiellement dans son orbite, soit en le discutant et en lui résistant.
Les attitudes des musulmans d’aujourd’hui sont donc très diverses. Sans généraliser indûment, on peut dire que la fixité traditionnelle, qui, ainsi que nous l’avons constaté ci-dessus, n’a jamais été complète, s’atténue d’avantage encore et fait place à des attitudes d’accueil et de souplesse. Les règles morales sont souvent transgressées, bafouées ou du moins négligées, il suffit de pénétrer le milieu musulman dans les grands centres urbains à Lomé comme ailleurs pour s’en convaincre.
La pratique religieuse est irrégulière et lacunaire, la ferveur individuelle, est moins régulièrement attestée. (Dépendant comme une contrepartie, les autorités incorporent volontiers des règles musulmanes aux institutions étatiques et modèlent, en quelque sorte, la vie publique sur la voie communautaire pour exempte l’incorporation au Togo depuis un moment de certaines fêtes musulmanes au calendrier des fêtes légales.
L'ISLAM DEVANT L’AGNOTICISME ET DEVANT L'ATHEISME
En privé, professions et démonstrations de détachement à l’égard de la loi musulmane, voire agnosticisme, qui autrefois eussent été impensables, peuvent désormais être observées. Mais peut-on proprement parler d’une crise de la foi ? La négligence à l’égard des œuvres dans l’Islam moins qu’ailleurs, n’implique pas que la foi soit perdue. Cette foi, qui s’exprime de manière très simple, est ancrée dans les cœurs et par cette simplicité même, et par une longue tradition, et par le caractère global d’un système qui, mettant la foi partout et faisant tout dépendre d’elle, peut la maintenir implicitement en raison de ses liens avec des actions et des attitudes apparemment indifférentes.
A cela s’ajoute que, puisque l'on naît dans l’Islam comme dans une famille et dans une patrie, on ne peut se soustraire à lui que par un reniement implicite, d’autant plus rare qu’outre tes châtiments classiques qu’il mérite en principe, il fait horreur à la sensibilité traditionnelle, les derniers événements spectaculaires en Iran sont là pour preuves.
L’athéisme communiste n’exerce, à peu d’exception près, aucune séduction sur les musulmans d’aujourd’hui. Il faut mettre à part le cas des musulmans de l'Asie Centrale Soviétique, objets d’une « digestion » lentement et savamment menée. Hors de l'Union Soviétique, le communisme n'a guère essaimé en milieu musulman. Rarement un parti communiste a été toléré dans un pays musulman et, à l’heure actuelle, cette tolérance ne se constate nulle part. En revanche, tes socialismes arabes se présentent, le plus souvent, comme procurant une transformation révolutionnaire plus effective et plus profonde que te communisme, et par conséquent, comme offrant le moyen de s'en dispenser.
D’autre part, le réformisme contribue à restaurer, chez les musulmans d’aujourd’hui, une attitude d’accueil à l'égard de la technique et de la science, attitude que le passé a connue et que la tradition a recommandée, mais qui, dans la décadence générale, s’était en grande partie perdue. Si la critique textuelle montre encore une grande timidité à l’égard du Coran, car celui-ci est considéré comme la pensée même de Dieu directement exprimée, une exégète concordiste très populaire l’invoque pour démontrer que, loin d’être incompatible avec la science, le Livre saint contient la Science elle-même. (Fin)
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