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An-Nasr Vendredi #332 (L'Azan : le dernier son de Walid)
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- Titre
- An-Nasr Vendredi #332 (L'Azan : le dernier son de Walid)
- Editeur
- An-Nasr Vendredi
- Date
- 12 mars 2010
- numéro
- 332
- nombre de pages
- 4
- Détenteur des droits
- Association des Élèves et Étudiants Musulmans au Burkina
- Langue
- Français
- Contributeur
- Frédérick Madore
- Identifiant
- iwac-issue-0000593
- contenu
-
Lorsque vient le secours d'Allah ainsi que la victoire, célèbre les louanges de ton Seigneur et implore son pardon. Malgré les critiques d’une bonne partie de la communauté internationale, Israël poursuit sa politique de colonisation. Cependant, ce projet d’expansion israélien a toujours déclenché des violentes critiques des Palestiniens qui revendiquent la paternité des terres colonisées. Mais en quoi cette colonisation, comme toute colonisation d’ailleurs, est-elle absolument nuisible au peuple palestinien ? An-nasr vendredi vous propose à cet effet un récit qui en dit long, lisez plutôt :
L’hiver, la nuit tombe vite. Les routes ne sont pas éclairées. Les villages sont distants les uns des autres. Il faut bien connaître son chemin. Walid a perdu le sien. Il conduit un peu au hasard. Il s’arrête et, avec son téléphone portable, essaie de joindre Laila pour l’avertir de son retard certain. Elle n’est toujours pas rentrée. Il s’inquiète plus pour elle que pour lui. pour lui. D’habitude, à cette heure-ci, elle est à la maison. Probablement qu’elle n’est pas une de ses collègues. Peut-être est-elle chez Nathalie, l’institutrice française en mission civile. Walid reprend la route. Il continue tout droit. Le phare gauche est éteint. Il est hors service. À chaque fois, il se dit qu’il va le réparer et il oublie. L’éclairage est insuffisant. Il avance lentement. Il ne connaît vraiment pas les lieux. C’est la première fois qu’il vient dans cette région de la Cisjordanie. En quittant Janine cet après-midi, les habitants lui avaient pourtant donné toutes les indications. Il a dû se tromper à un moment. Il se dit qu’il aurait dû faire demi-tour et rester jusqu’au lendemain matin. Avec le jour, c’est plus facile. Il s’arrête de nouveau et appelle Laila pour la troisième fois. Il laisse sonner plus longtemps. Personne au bout du fil. Dix-neuf heures. Il repart. Il se dit qu’au premier village, il s’arrêtera pour la nuit. L’état de la route se dégrade à grande vitesse. Il n’y a Pratiquement plus de goudron. Il est en plein champ, entouré d’arbustes. Ce sont des oliviers. Un couple harmonieux aurait-il quitté la route sans le savoir ? Tout est possible. Il ne peut plus avancer et préfère s’arrêter définitivement. Il envisage de faire un somme dans la voiture. Il repense à son spectacle de la journée. Ce n’était pas évident sans Lcïla. Il lui fallait improviser et changer de voix constamment. Walid est marionnettiste ambulant. Sa femme Lcïla, institutrice, l’accompagne souvent dans ses tournées et tient les rôles féminins. Il a dans son répertoire une dizaine d’histoires. Il construit lui-même ses marionnettes, taillées à la mesure des scénarios dont il est l’auteur. Il s’inspire beaucoup du vécu quotidien des gens. Il reproduit sur scène leurs joies et tristesses, leurs bonheurs et malheurs, leurs courages et leurs peurs, leurs enthousiasmes et leurs déceptions, leurs révoltes et leurs indifférences... Il leur montre leurs contradictions. Ses spectacles plaisent aux enfants. De village. Un village, d’une école à une autre, de quartier en quartier, d’une ville à une autre, son répertoire s’enrichit de tournée en tournée. Lcïla envisage sérieusement quitter l’enseignement pour l’accompagner à plein temps. Ils sont jeunes et n’ont pas d’enfant. D’une touche de son téléphone portable, il recompose automatiquement le numéro de la maison. Il laisse sonner autant que la dernière fois mais toujours personne. Le répondeur n’est pas branché. Il ne peut même pas laisser de message. Il est inquiet. Ce n’est pas dans l’habitude de Lcïla de rester si tard dehors. Ce n’est pas dans l’habitude de Walid d’appeler les parents et amis pour savoir où elle se trouve. Il raccroche et s’installe dans la voiture, toutes vitres fermées.
Le début d’une tragédie. Épuisé, il s’endort très vite. Le matin, il est réveillé par un rayon de soleil. Il a eu froid toute la nuit. Il contemple le paysage qui s’étale devant lui. Il se trouve en plein champ d’oliviers. Il devra reculer pour rejoindre la route. Vaut mieux ne pas. Trop s’attarder en terre inconnue, il remonte en voiture et entame la manœuvre de marche arrière. À une dizaine de mètres, il atteint un carrefour. Son point d’erreur. C’est là qu’il aurait fallu continuer tout droit au lieu de prendre à droite. Il avance lentement et, au premier virage, juste en face de lui, il voit apparaître l’alignement de maisons toutes neuves, recouvrant le versant de la colline. Il est à proximité d’une colonie juive. Il s’arrête net. Impossible de faire demi-tour, pas assez de place. La route est trop étroite. Pas question d’avancer jusqu’à la colonie. Sans plus réfléchir, il passe la marche arrière et recule prudemment. Trop tard ; il est repéré. Les vigiles de la colonie le rattrapent plus en amont, par un raccourci en chemin de terre. Ils lui barrent la route. Il s’en rend compte à quelques mètres d’eux. Il décide d’abandonner la voiture et se lance à travers les champs en contrebas. Il se précipite vers la vallée. En se retournant, il s’aperçoit qu’il est poursuivi. Il décide de se Cacher derrière un énorme buisson, le temps de reprendre haleine. Peut-être que ses poursuivants, le perdant de vue, décideraient d’abandonner la poursuite. Il a chaud. Il invoque Dieu pour Son aide. Il transpire abondamment. Il ne bouge pas. Ils sont tout près. Il ignore leur nombre. Il les entend communiquer entre eux. Ils le recherchent toujours. Il a un espoir de leur échapper. Ils passent à quelques mètres de lui. Il voit quelques-uns très distinctement. Ils sont armés. Il retient son souffle. Il ne respire pratiquement plus. Il entend les battements de son propre cœur. Il serre les dents. Il a enfoncé ses doigts dans la terre. La sueur coule de son front.
Jamais. De la poche interne de sa veste, la sonnerie de son téléphone portable le fait sursauter. Il est trahi. Il veut se saisir de l’appareil pour le déconnecter mais c’est trop tard. Très vite, il est entouré par quatre, cinq, six, sept... vigiles. Son portable continue d’émettre l’a-zaan de Shaykh Abdoul Baassit. Une mélodie qui éveille le cœur. l’avait programmé spécialement pour lui. Il pense à elle. Il décide de se rendre. Lentement, les mains levées, il se redresse. Il ne parvient pas à se mettre complètement debout. Il est abattu, il s’écroule. Le corps de Walid est allongé par terre, dans une mare de sang. Il est couché sur son portable qui ne sonne plus. Ne décrochant pas, Leila lui a laissé un message : "Je suis chez Mariam. Elle a été agressée par des colons. J’ai passé la nuit chez elle pour la réconforter. À ce soir, je t’aime." Le sort de Walid n’est que la partie visible de l’iceberg en matière de victimes faites par cette colonisation. Eh oui ! Chers lecteurs, nous sommes au 21e siècle et on parle toujours et encore de colonisation. L’annexion illégale des terres palestiniennes par Israël ne cesse de se poursuivre au mépris du droit international. Au moment où un peu partout des efforts sont faits pour relancer le processus de paix, le gouvernement israélien vient d’autoriser la construction de 1600 logements dans une colonie au mépris des Palestiniens. Tout porte à croire que l’État israélien n’a aucune intention de cesser ses injustices envers le peuple palestinien. Ce qui ne se fait pas sans conséquence. Ainsi, des femmes, des enfants, des hommes sont innocemment tués. D’autres perdent leur travail. Des enfants et des jeunes étudiants manquent encore et encore leurs rentrées scolaires. Une image de rues vides et de centaines de magasins fermés n’est pas la conséquence d’un couvre-feu ou d’un deuil pour les martyrs, mais plutôt due à la présence de dizaines de colons dans ces rues. Des colons qui terrorisent la population palestinienne en toute impunité avec la complicité de l’armée israélienne. Ces colons ne veulent aucun Palestinien sur leur chemin. Pire encore, ils les privent de l’eau potable, pendant ce temps eux-mêmes sont en train d’en gaspiller. C’est une injustice inimaginable. Ce peuple souffre toujours de l’absence de voix de la communauté internationale. Le monde arabo-musulman s’est caractérisé par son mutisme. Tout un Peuple meurtri laissé à lui-même. Il n’a que ses mains pour se défendre contre des chars blindés. Et on se demande alors à quand la fin de cette injustice, de cette inhumanité ? En attendant, prions pour ce peuple palestinien car il mérite mieux que ce traitement. In action 1998