Article
Votre regard. Le jeûne musulman en temps de guerre en Côte d'Ivoire!
- Title
- Votre regard. Le jeûne musulman en temps de guerre en Côte d'Ivoire!
- Type
- Article de presse
- Creator
- A. L. I.
- Publisher
-
Le Jour
- Date
- November 6, 2002
- DescriptionAI
- Le texte explore les défis rencontrés par les musulmans de Côte d'Ivoire lors du jeûne du Ramadan en période de guerre. La principale préoccupation exprimée par les fidèles est l'impact du couvre-feu sur leurs prières nocturnes et matinales, ainsi que sur leurs habitudes d'approvisionnement, les poussant à demander un ajustement des horaires gouvernementaux pour pouvoir pratiquer pleinement leur foi et prier pour la paix. Une psychologue, quant à elle, suggère que les musulmans doivent s'adapter aux mesures de sécurité nationales.
- number of pages
- 1
- Language
- Français
- Contributor
-
Frédérick Madore
- Identifier
- iwac-article-0011218
- content
-
VOTRE REGARD
Le jeûne musulman en temps de guerre en Côte d’Ivoire !
Ph: Madia Touré
Les musulmans entament aujourd’hui, pour une durée de 30 jours, le jeûne du Ramadan. Et ce, dans une période de guerre. Des Ivoiriens se prononcent.
**1- Aboubacar Kamara, tailleur-brodeur**
**« Le couvre-feu ne nous arrange pas »**
« Les imams ont décidé que demain (Ndlr aujourd’hui), nous devons commencer à jeûner. Alors n’importe comment, nous allons nous acquitter de ce devoir qui est une obligation pour le musulman. C’est vrai que la guerre complique le jeûne, mais cela ne peut pas nous empêcher de le faire. Parce que tout part du cœur. Seulement, le problème du couvre-feu ne va pas du tout arranger les musulmans. Après avoir rompu le jeûne le soir, le fidèle prend du temps à la mosquée pour faire ses prières. Mais, dans ce contexte-là, il ne pourra pas bien prier. Il y a aussi des prières qui doivent se faire en groupe. Tout ceci ne pourra pas être fait. Il faut donc que le gouvernement revoie les heures du couvre-feu ».
**2- Ali Traoré, commerçant**
**« Le gouvernement doit prendre des mesures »**
« Je pense que le couvre-feu ne facilitera pas le jeûne des musulmans. Etre à la maison à 21 heures, alors que tu dois être à la mosquée pour finir tes prières, je trouve que ce n’est pas dans l’intérêt des musulmans. La prière de 4 heures du matin est très importance pour nous. Mais, si à cette heure-là, on ne peut pas se rendre à la mosquée, ce n’est pas la peine. C’est pourquoi je demande au gouvernement de prendre des mesures pour nous permettre de bien faire le jeûne. Parce qu’au cours de ce jeûne, nous allons prier pour la paix, donc pour que cela réussisse, il faut que la prière soit bien faite ».
**3- Aboubacar Diakité, commerçant**
**« Le jeûne de cette année sera compliqué »**
« Le jeûne de cette année sera très compliqué pour nous. Non seulement les heures du couvre-feu ne nous arrangent pas, mais on nous dit aussi que le sucre pourrait manquer. D’abord, il faut tout le temps du jeûne, se lever aux environs de 3 heures pour se préparer. Pour ceux qui sont mariés, cela peut aller, parce que leurs femmes leur font à manger sur place. Mais, pour nous les célibataires, ce n’est pas le cas. Nous achetons généralement à manger sur place, autour des mosquées. Si avec le couvre-feu on ne peut plus le faire, ce sera difficile pour nous. Il serait bien que les heures soient être revues ».
**4- Moussa Soumahoro, dessinateur en bâtiment**
**« Le couvre-feu va perturber nos prières »**
« Le jeûne de cette année vient en temps de guerre. C’est Dieu qui l’a voulu. Les choses sont compliquées, parce que rien en marche actuellement. Les moyens font défaut. Et puis, le couvre-feu va beaucoup perturber la prière. Or, il ne sert à rien de faire un bon jeûne s’il n’est pas accompagné des prières faites dans les conditions exigées par le Coran. Avec le couvre-feu, on a seulement le temps de se regrouper pour faire la prière qui suit la rupture du jeûne le soir. Et les autres prières ? Je souhaiterai que le gouvernement fasse quelque chose dans ce sens. Parce que la prière, surtout le jeûne est très important dans l’islam ».
**5- Ibrahim Konaté, artisan**
**« Le problème c’est le couvre-feu »**
« C’est vrai que le pays est en situation de guerre et que les affaires ne roulent pas comme avant. Mais, puisqu’on arrive toujours à vivre et à manger, là n’est pas le problème. Le véritable problème du jeûne de cette année c’est le couvre-feu. Vraiment, cela va beaucoup déranger sa bonne marche. Je pense aussi aux musulmans des zones assiégées. J’espère qu’ils pourront, comme nous ici, jeûner. Nous allons beaucoup prier pour que la paix revienne en Côte d’Ivoire ».
**6- Yacinthe Bohoussou Konan, psychologue**
**« Les musulmans doivent s’adapter à la situation »**
« Nous sommes en situation de guerre et je crois que la décision du gouvernement s’impose à tout le monde. C’est vrai que le couvre-feu se fait au détriment des musulmans dans le contexte actuel. Mais est-ce qu’il faut privilégier une religion donnée par rapport à l’intérêt de la nation. Nous ne sommes pas encore sortis de l’auberge, il n’est donc pas prudent que l’on lève le couvre-feu. Je ne crois pas que sous des pluies de balles les musulmans pourront prier. Le couvre-feu est une garantie de sécurité pour tout le monde. C’est dommage mais les musulmans doivent s’adapter à la situation. Ils peuvent trouver des espaces restreints pour le faire. Ils peuvent inviter les forces de l’ordre à localiser quelques sites, où ils tiennent leur prière. Je pense que c’est la meilleure façon de tenir compte des intérêts des musulmans et de la nation ».
**7- Yacinthe N’Guessan, étudiant**
**« Il faut prendre des mesures »**
« Le mois du jeûne est un mois de prière, un mois sain et nous sommes dans une période de crise, c’est très important. Parce qu’il faut des prières pour que la paix puisse revenir. Et on ne peut pas, à cause de la circonstance, interdire le jeûne. Donc il faut prendre des mesures. Le couvre-feu qui est instauré, nous le savons, va perturber les prières. Il faut alors demander aux musulmans ce qu’ils préconisent pour qu’il n’y ait pas de problème. C’est vrai je ne suis pas musulman et donc je ne peux pas en dire plus ».
PROPOS RECUEILLIS PAR A. L. I.