Article
Crise post-électorale / Un imam sort de sa réserve : "Cessons de nous maudire en croyant maudire autrui"
- Title
- Crise post-électorale / Un imam sort de sa réserve : "Cessons de nous maudire en croyant maudire autrui"
- Type
- Article de presse
- Creator
- Mamadou Dosso
- Publisher
-
Le Jour Plus
- Date
- February 3, 2011
- DescriptionAI
- Un imam ivoirien exprime son opinion sur la crise post-électorale de 2010 en Côte d'Ivoire, marquée par des résultats présidentiels contradictoires entre Laurent Gbagbo et Alassane Ouattara, proclamés par diverses institutions. L'auteur déplore l'échec du droit, de la politique et de la diplomatie à résoudre cette impasse, conduisant la population à se tourner vers Dieu. Il critique l'hypocrisie des leaders qui invoquent la foi tout en recourant à la violence et à la force, exhortant à la sincérité et au respect de la volonté populaire exprimée dans les urnes.
- pages
- 5
- number of pages
- 1
- Language
- Français
- Contributor
-
Frédérick Madore
- Identifier
- iwac-article-0011129
- content
-
Crise post-électorale / Un imam sort de sa réserve
« Cessons de nous maudire en croyant maudire autrui »
**AVANT PROPOS**
Ces réflexions n'engagent ni les structures religieuses où nous militons, ni la mosquée où nous officions, encore moins la communauté globale dont nous sommes membre. Toutefois, nous prions DIEU qu'il donne à tous, les mérites (si mérites il y a) de cette modeste contribution de Son serviteur à la restauration des attentes du peuple de Côte d'Ivoire.
**OPINION.**
1/ Faire des réflexions sur la situation sociale ivoirienne devient complexe. De nombreux préalables et préjugés font obstacle à une telle entreprise.
Selon les uns, des catégories de personnes ne devaient pas donner d'opinion dans le débat politique parce qu'elles engageraient les institutions dont elles sont censées incarner les valeurs. Ces bannis, au nombre desquelles il y a les hommes de religion, risqueraient, de ce fait, d'interférer dans le domaine de la politique, sauf, soutiennent les autres, si elles restent neutres, impartiales ou objectives.
Dans un tel contexte, ce qui paraîtra objectif aux uns, ne sera ainsi que pour ceux et celles qui partagent le même avis. Ce faisant, si vous êtes par exemple musulman du nord de la Côte d'Ivoire, vous pourriez être taxé de courtisan de monsieur Ouattara Alassane, lui-même musulman ressortissant de la même région, autant que vous pourriez être qualifié de personne vendue qui se renie pour monsieur Gbagbo Laurent chrétien du sud-ouest. Cette tropicalisation de la démocratie porterait son jugement ; de façon idoine à l'analyse du chrétien ressortissant du nord ainsi qu'à celle du musulman et du chrétien du sud forestier ivoirien.
2/ Aussi, se taire en pareille circonstance, serait de l'indifférence face à la dégénérescence du tissu social ivoirien.
En plus, le recours récurrent à DIEU comme solution ultime à la crise politique ivoirienne par tout le corps social national nous a interpellé. Nous intervenons surtout, en référence à l'essence même de la démocratie, selon laquelle tous les citoyens participent à parts égales aux délibérations de la République.
En tout état de cause, C'est une situation de double contrainte qui permet de mieux comprendre le philosophe Donatien Alphonse François de Sade quand il écrit dans (Justine ou les malheurs de la vertu) : « la société n'est composée que d'êtres faibles et d'êtres forts... »
3/ Après les proclamations des résultats du second tour de l'élection présidentielle le 28 novembre 2010, la divergence des trois (03) institutions régulatrices du scrutin (la Commission Electorale Indépendante (CEI), le Conseil Constitutionnel (CC) et l'Opération des Nations Unies en Côte d'Ivoire (ONUCI)) a plongé le pays dans un conflit postélectoral.
Une des institutions (le C.C) a proclamé monsieur Gbagbo Laurent vainqueur avec 51,45% de suffrage exprimé en sa faveur et monsieur Ouattara Alassane vaincu avec 48,55%.
Les deux autres (la CEI et l'ONUCI) affirment que monsieur Ouattara Alassane est gagnant du deuxième tour de l'élection présidentielle avec 54,10% du vote des électeurs et monsieur Gbagbo Laurent vaincu avec celui de 45,90% des mêmes électeurs.
4/ L'opinion nationale et internationale se divise entre ces deux (02) proclamations. Chacune voit en l'une ou en l'autre, l'expression vraie de la volonté du peuple souverain de Côte d'Ivoire, premier principe de la démocratie.
L'avis du Conseil Constitutionnel est partagé par la Majorité Présidentielle (LMP) seule.
L'avis de la C.E.I et de l'O.N.U.C.I est partagé par :
Le Rassemblement des Houphouëtistes pour la Démocratie et la Paix (RHDP).
Les institutions internationales dont l'Organisation des Nations Unies (O.N.U), l'Union Européenne (U.E), l'Union Africaine (U.A), l'Organisation Internationale de la Francophonie (O.I.F), toutes avec des missions d'observation de l'élection du 28 novembre 2010.
De Grandes nations démocratiques notamment les Etats Unis, la France, l'Angleterre, le Canada, la Suisse, etc.
Des organisations sous régionales ouest africaines en l'occurrence la Communauté Economique des Etats de l'Afrique de l'Ouest (C.E.D.E.A.O) et l'Union Economique et Monétaire Ouest Africaine (U.E.M.O.A).
5/ Cette crise en a rajouté à celle qui mine le peuple ivoirien depuis le décès du premier président de la République d'Ivoire : Félix Houphouët Boigny de regrettée mémoire.
Pour rappel, depuis son début, la crise ivoirienne fait bégayer le droit.
Le droit n'a pu constater le décès du Président Félix Houphouët Boigny de regrettée mémoire, quand la politique a fait passer les acteurs sociaux à la phase d'application de l'article 11 de la constitution ivoirienne.
En 1995, la loi ayant programmé la date de l'élection présidentielle, elle n'a pu faire éviter le boycott du Front Républicain (Alliance politique FPI/RDR), la politique a en vain volé au secours du droit.
En 1999, en dépit du droit, les pères fondateurs de la République de Côte d'Ivoire ont opéré : le gouvernement du Général Guéï Robert a accédé au pouvoir par coup d'Etat.
Au cours de la proclamation des résultats de l'élection présidentielle de transition militaro civile en octobre 2000, l'un des candidats en l'occurrence monsieur Gbagbo Laurent est descendu dans la rue pour lui restituer la victoire qui était en train de lui être extorquée. S'ingérant dans une affaire ivoiro-ivoirienne, le premier ministre français d'alors, monsieur Lionel Jospin avait donné sa voix et contribué au règlement de ce problème de droit.
6/ Après avoir fait bégayer le droit, la crise ivoirienne fait battre de l'aile à la politique et à la diplomatie.
En effet, depuis 1993, la récurrence de cette crise a remplacé la cohabitation heureuse et la confiance mutuelle entre les populations par la méfiance et la défiance entre elles.
Après l'échec du coup d'Etat meurtrier des Forces Nouvelles en 2002, aucune solution diplomatique n'a réussi à réconcilier les ivoiriens de Lomé à Ouagadougou en passant par Paris, Accra et Pretoria.
Ouagadougou en passant par Paris, Accra et Pretoria.
Depuis le début du conflit postélectoral actuel, pour le moment, quatre (04) chefs d'Etat et un chef de gouvernement, en moins de deux (02) mois sont venus à Abidjan sans réussir à réconcilier messieurs Gbagbo Laurent et Ouattara Alassane. Alors que le peuple a massivement exprimé sa volonté dans les urnes. En résumé, du recours au droit, à la politique et à la diplomatie, les ivoiriens n'ont encore pas réussi à « construire un avenir partagé à partir d'un passé divisé » de la Côte d'Ivoire, leur seule patrie.
7/ Désormais, les ivoiriens dans leur grande majorité disent confier le règlement de leurs différends postélectoraux à DIEU. Le chef d'état major des FDS en personne priait deux fois en chantant la gloire du seigneur sur le podium du meeting en hommage aux soldats ivoiriens proches de monsieur Gbagbo Laurent, le dimanche 23 janvier 2011.
Aveu d'impuissance ou foi sincère en DIEU à refaire de la Côte d'Ivoire un véritable pays de droit ; c'est-à-dire démocratique et laïque qui cessera désormais d'être géré par des accords, furent-ils inter ivoiriens ?
Cette question se pose pour rappeler qu'avant d'espérer être écouté par DIEU, notre quotidien doit s'adapter à la vertu. Autrement dit, même en dehors des lieux de cultes, notre morale doit se donner pour devoir de couvrir l'ensemble des actions quotidiennes en tant qu'application des préceptes énoncés par DIEU.
Quand on s'abandonne dans la confiance au Seigneur des mondes, on n'assassine pas les ministres de DIEU. Dans le même temps, il faut éviter de vénérer les braconniers du sacré, les faux messies et les marchands d'illusions.
On n'abandonne pas le sort de son pays multi confessionnel à DIEU, et tenter d'opposer les populations des différentes religions, en détruisant et en profanant les lieux de cultes à l'occasion des crises sociales.
On ne fonde pas son espoir en DIEU pour résoudre ses différends postélectoraux en manifestant de l'ingratitude à l'égard de ceux et celles qui ont contribué à l'organisation efficiente de cette élection. Certainement, les leaders souverainistes seront les derniers à mourir de faim en cas de sanctions de cette communauté internationale. La résistance à celle-ci dans ce contexte de mondialisation accrue est une voie suicidaire dont les populations vulnérables paieront le prix fort. A la fin du mois de janvier 2011, par exemple, quand la crise à la BCEAO a failli compromettre le paiement des salaires des fonctionnaires, c'est le virement de la pension des retraités qui s'est fait en retard. Alors qu'un seul des salaires des ministres virés plus tôt, pourrait payer la pension d'au moins vingt (20) retraités.
On ne recourt pas à DIEU pour la solution de ses problèmes de démocratisation, et au même moment compter sur de vieux mythes de la lutte anti coloniale, même si celle-ci est incarnée par de grandes figures comme Patrice Emérite Lumumba, Kouamé Nkrumah. C'est de la diversion et de l'illusion à l'affliction et à la détresse du peuple spolié de sa volonté exprimée dans les urnes le 28 novembre 2010.
Pendant que nous demandons à DIEU d'écouter nos suppliques, nous continuons d'assassiner nos semblables ; depuis décembre 2010, plus de quatre cents (400) de nos prochains sont passés de vie à trépas par les armes de leurs concitoyens. La justice divine est sans complaisance. « Les gens dorment, et lorsqu'ils meurent ils se réveillent.» Dit le Prophète Muhammad (paix et salut sur lui).
on ne paient pas le loyer de la maison vingt (20) ans durant.
On ne recourt pas à DIEU pour la solution de ses problèmes de démocratisation, et au même moment compter sur de vieux mythes de la lutte anti coloniale, même si celle-ci est incarnée par de grandes figures comme Patrice Emérite Lumumba, Kouamé Nkrumah. C'est de la diversion et de l'illusion à l'affliction et à la détresse du peuple spolié de sa volonté exprimée dans les urnes le 28 novembre 2010.
Pendant que nous demandons à DIEU d'écouter nos suppliques, nous continuons d'assassiner nos semblables ; depuis décembre 2010, plus de quatre cents (400) de nos prochains sont passés de vie à trépas par les armes de leurs concitoyens. La justice divine est sans complaisance. « Les gens dorment, et lorsqu'ils meurent ils se réveillent.» Dit le Prophète Muhammad (paix et salut sur lui).
« ...Dieu me suffit. Se fient à Lui ceux qui se fient. Dis : Mon peuple, agissez à votre façon, j'agirai aussi et bientôt vous saurez qui sera frappé d'un tourment de honte et sera repris d'un tourment perpétuel. » Coran, sourate XXXIX, les groupes, versets 38, 39, 40.
Avant le jugement dernier auquel le verset sus mentionné fait allusion, il y a les avant derniers ici-bas et dans la vie tombale.
On ne se sert pas du Seigneur des mondes pour duper ses semblables. Pendant qu'on chante les louanges de DIEU, on nous chante un chant d'un autre âge pour une sortie de crise : il s'agit des chants du « recours à la force légitime » des artistes souverainistes.
A part le candidat de La Majorité Présidentielle (LMP), ni les structures régulatrices ni les observateurs de l'élection présidentielle n'ont fait mention d'erreur de comptage des voix. En plus, ce procédé apparaît comme un appel à l'arrêt du processus institutionnel, contraire à ce que dit la loi. Au surplus, si l'organe de recomptage des voix est international comme ceux qui en parlent, n'est ce pas une autre ingérence étrangère autant que celle que les souverainistes dénoncent ? « On ne raffole pas de la chair de vipère quand on a le serpent pour totem.» Disent les sages africains.
Par ailleurs, c'est vrai qu'on ne doit pas demander à des forces étrangères d'intervenir chez soi au risque de faire tuer ses propres concitoyens. Cependant, on demande que ces mêmes populations à mains nues, les forces de défense et de sécurité armées à l'effet d'installer leur leader au palais de la présidence, le candidat de l'élu du Rassemblement des Houphouëtistes pour la Démocratie et la Paix (RHDP). Certainement qu'il vaut mieux mourir par les armes d'ivoiriens appuyés de mercenaires que par celles d'étrangers ?
On a beau recourir à la force, tous recourent à la force.
On met la tête sous le sable pour ne pas voir que le candidat de LMP est maintenu au palais par les Forces de Défense et de Sécurité. C'est un recours à la force qui continue avec le recrutement de plusieurs milliers de jeunes gens. Ceux-ci sont-ils recrutés pour aller cultiver du riz dans le cadre du service civique déjà dans les oubliettes ? Si non, c'est un recours à la force.
On feint d'ignorer qu'on recourt à la force de l'ONUCI soutenue par les Forces Nouvelles pour assurer la sécurité de monsieur Ouattara Alassane, son gouvernement et plusieurs de ses partisans dont le président Henri Konan Bédié à l'hôtel du Golfe.
On se fait amnésique pour ne pas avoir à l'esprit que les zones Centre Nord Ouest (CNO) de la Côte d'Ivoire sont mises en coupe réglée par les Forces Nouvelles. C'est un recours à la force.
Quand on sollicite ce même recours à la force afin de se soustraire la volonté du peuple souverain exprimée le 28 novembre 2010 de la manipulation et de la confiscation des résultats des urnes, on élude la question en-brandissant cette menace de l'assassinat des populations qu'on est pourtant entrain d'exterminer. Notre foi ne nous permet pas encore de comprendre que seul le rétablissement de la vérité des urnes traduit que la voix du peuple est la voix de DIEU, de l'expression latine vox populi vox Dei.
Si nous sommes vraiment sincères dans notre foi, sortons de nos forteresses, débarrassons-nous de nos soldats, des armes, des blindés et des gilets pare-balles de ceux-ci. Venons supplier DIEU dans les mêmes conditions que ceux qui tombent sous les balles assassines à Abengourou, Abidjan, Duékoué, Gagnoa, Grand Bassam, Yamoussoukro. Que DIEU les agrée tous. Ce sont eux et ceux qui attendent d'être assassinés à leur tour, les vrais croyants quand ils professent : « ...DIEU nous suffit. Il est Le Meilleur Garant.» Sourate III, la famille d'Imran, verset 173.
Si en réaction, ceux qui recourent à la force pour se sécuriser estiment que « le déterminisme ne laisse le choix qu'entre la rébellion inutile et l'esclavage volontaire » sans qu'ils ne fassent autant pour restaurer la volonté du peuple exprimée le 28 novembre 2010, c'est que ce peuple leur paraît stupide, de l'autre expression latine (vox populi, populus stupidus) et c'est inacceptable.
8/ La communauté nationale, en recourant à DIEU se met dans une phase d'ordalie, une épreuve de vérité, le gôpô, comme on le dit au village. A ce stade, boribana, wavié.
Dieu n'est ni ma vérité, ni ta vérité, ni sa vérité, ni notre vérité, ni votre vérité, ni leur vérité. Il est LA VERITE, et de Lui procède La VERITE.
Avant le 30 octobre 2010, le Collectif des Religieux pour des Elections Apaisées en Côte d'Ivoire a initié des prières et des jeûnes. Louons DIEU pour nous avoir exaucés. L'élection s'est déroulée sans autant de morts qu'on en compte après elle. Cessons de nous maudire en croyant maudire autrui. Abou Bakr Sidiq (qu'Allah lui fasse miséricorde) offrit l'hospitalité à un homme venu d'une contrée lointaine. Il est arrivé que cet homme ait volé les bijoux de l'épouse de son tuteur. Pendant qu'on recherchait ces objets volés, c'est l'étranger voleur qui, pour se donner bonne conscience, souhaitait que la punition de DIEU s'abatte sur celui qui a volé les bijoux.
Après avoir retrouvé les bijoux de son épouse volés et fait la preuve que c'est l'étranger qui les avait volés, Abou Bakr Sidiq s'étonnait de ce que l'étranger sollicitait la punition de DIEU contre soi-même.
Si nous n'avons pas un tel fardeau sur notre conscience, joignons nos prières à celle des autres pour évoquer DIEU.
-DIEU ! Révèle au monde des hommes sans conteste :
Qui, des deux (2) candidats (messieurs Gbagbo Laurent et Ouattara Alassane) au deuxième tour de l'élection présidentielle ivoirienne, a bénéficié de la majorité de la volonté du peuple ivoirien exprimée dans les urnes le 28 novembre 2010.
Si par contre, notre évocation peut être contrariée par quelques actes à notre passif, fussent-ils du poids d'un atome, abstenons nous de prier au risque d'attirer la colère de DIEU contre nous.
La porte du repentir reste ouverte aux croyants sincères.
QUE DIEU BENISSE LA CÔTE D'IVOIRE ET LIBERE LE PEUPLE IVOIRIEN DE SES FOSSOYEURS !
Qu'il en soit ainsi !
Votre frère et serviteur de DIEU,
Imam Mamadou Dosso
nokode@hotmail.fr