Article
L'entreprise O. Kanazoé : l'histoire d'une entreprise au-dessus de tout soupçon
- Title
- L'entreprise O. Kanazoé : l'histoire d'une entreprise au-dessus de tout soupçon
- Type
- Article de presse
- Creator
- Oumar Ouédraogo
- Publisher
-
Sidwaya
- Date
- August 23, 1985
- number of pages
- 2
- Language
- Français
- Contributor
-
Frédérick Madore
- Identifier
- iwac-article-0007343
- content
-
A.
À l'occasion de la commémoration de l'An II de la RDP, l'entrepreneur El Hadj Oumarou Kanazoé figurait parmi les heureux récipiendaires. Juste reconnaissance d'une entreprise qui, durant des années, s'est mise au service du peuple. Alors que nombre d'entrepreneurs véreux tentent de boycotter l'activité économique, le camarade Kanazoé, plus par le passé, a opté fondamentalement pour la construction du Faso. Malgré les pressions de la réaction nationale et internationale, l'entreprise O. Kanazoé consolide son assise économique et prouve par là que le CNR n'en veut pas aux hommes d'affaires comme le proclament les réactionnaires. Aussi avons-nous voulu présenter dans ce dossier l'entreprise Kanazoé et son auteur que le public ne connaît que de l'extérieur. Si dans plusieurs cas des entreprises burkinabè ont été montées grâce aux détournements de deniers publics, tel n'est pas le cas de l'entreprise O. Kanazoé qui est assurément au-dessus de tout soupçon.
Les navettes commerciales d'El Hadj Oumarou Kanazoé dans les pays de la sous-région lui rapportaient un bénéfice impressionnant. Il se décida en 1952 de se construire une boutique à Yako-ville qu'il remplit de toute sorte de marchandises.
L'ENQUÊTE
ENTREPRISE
L'histoire d'une entreprise
El Hadj O. Kanazoé et notre reporter : Bientôt, les Ouagavillois pourront voir un centre commercial de cinq étages. Je n'attends que le nouveau plan.
En Côte d'Ivoire, ses bennes ne faisaient qu'entasser sable et gravier chez des particuliers. Analysant les raisons commerciales et les avantages qui amenaient ses demandeurs de sable à construire, il se décida, le sens des affaires aidant, de faire d'une pierre deux coups : continuer à ravitailler du sable chez ses nombreux clients et parallèlement construire des villas personnelles et les mettre en location. De 1966 à 1970, le nombre de ses camions de transport toute direction a triplé. Proportionnellement au volume des travaux à exécuter, il recrutera un personnel nécessaire, s'achètera de nouvelles bennes et s'équipera en unités de matériels de construction. Ayant exécuté ses propres travaux avec sérieux ainsi que ceux des particuliers, cette compétence émanant de son personnel compétent et expérimenté incita les autorités d'antan à lui faire honneur à partir de 1970. Des marchés lui sont confiés : petits bâtiments et même des barrages à construire. Compte tenu de cette nouvelle audience, l'entreprise n'a pas hésité à ouvrir deux carrières : une à Ouagadougou et une autre à Bobo-Dioulasso. Celle de Bobo joue d'ailleurs un rôle très important dans la section construction-routes. Pour la petite histoire, sachez qu'elle a été rachetée à la RAN (Régie de chemin de fer Abidjan-Niger) qui s'en était servi pour la construction du chemin de fer entre Ouaga et Bobo. Abandonnée par la régie en 1975, elle fut remise en exploitation par l'entreprise O. Kanazoé en 1976. Cette carrière emploie plus de 120 ouvriers et est dotée d'un matériel moderne lui permettant de produire toute sorte de gravillons qui n'ont rien à envier à ce qui se fait dans d'autres pays.
DES RAPPORTS BASÉS SUR LA CONCURRENCE
Ce n'est qu'en 1973 que l'entreprise devait orienter une partie de ses activités dans le bâtiment et les travaux publics. L'entreprise a été fondée en 1976 et elle prit racine sur deux principaux secteurs : d'une part le bâtiment et le terrassement des routes et de l'hydraulique, d'autre part. Actuellement, elle est divisée en quatre branches d'activités dont les divisions : bâtiment, route, barrage et hydraulique. L'on doit reconnaître que la présence d'une entreprise locale participant aux appels d'offres internationaux sur le territoire national est d'un intérêt économique évident. Étant le seul sur la place, ses rapports avec les autres entrepreneurs internationaux au Burkina sont basés sur la concurrence. Les entreprises multinationales ont toujours tenté de bloquer El Hadj Oumarou Kanazoé au niveau des appels d'offres internationaux. Que se passait-il exactement ? Aux appels d'offres, les entreprises étrangères, d'une manière générale, se présentaient en groupements, ce qui leur permettait de partager les risques. De plus, ainsi regroupées, elles participaient aux appels d'offres en appliquant une politique de soumission à des prix extrêmement bas, et passaient ensuite par des réclamations pour rattraper toutes leurs pertes financières résultant des soumissions.
Hormis ces réclamations très élevées en fin de travaux, il y a lieu de considérer le fait que le personnel expatrié, les matériels acquis par ces entreprises pour l'exécution des travaux au Burkina quittent le territoire national dès que le chantier considéré est terminé. Lorsque des grands travaux d'équipement financés par des organisations internationales sont exécutés par des groupements d'entreprises étrangères, c'est une part importante des crédits internationaux qui transitent par le Burkina. En ce sens, selon lui, des sommes importantes sont rapatriées dans les pays sièges et correspondent aux provisions pour l'amortissement des matériels, aux frais de siège, d'étude et de gestion, aux bénéfices commerciaux, etc.
Dans le même temps, s'ajoute le fait que ces entreprises étrangères bénéficient souvent d'un bonus important de la fluctuation des changes qu'elles savent mettre à profit.
Ce milliardaire, né vers 1930 à Yargo, quartier de Yako, chef-lieu de la province du Passoré, polygame et père de 25 enfants, dont l'étoile brille en ce moment, a connu dès sa jeunesse une expérience dure et à la fois enviable. Comme tous les Burkinabè des campagnes, à quatre ans déjà, nu comme un ver, son père lui trouva une occupation : la garde des moutons et des chèvres pendant l'hivernage. Les nuits, accroupi et grelottant de froid, son second boulot était l'apprentissage du tissage des bandes de coton auprès de ses frères. Jusqu'à présent, il ignore pourquoi, à 7 ans, alors que les autres parents mettaient leurs enfants à l'école, les siens ne l'ont pas inscrit. Illettré et placé devant un avenir incertain, il n'avait que sa volonté pour réussir. Initié au métier du tisserand et de la teinture du fil à l'indigot, ses parents l'envoyèrent à l'école coranique pour six ans d'études. Étant le seul parmi les 35 élèves de son école ayant une profession, ses heures creuses seront réservées au tissage des bandes de coton de toutes les couleurs qu'il vendait le jour du marché pour le compte de l'école. Ses études du livre saint terminées, il quitta l'école coranique en se considérant lettré à part entière, bien qu'il ne sache pas écrire son nom en français, car maîtrisant par contre l'écriture sainte. Ayant la possibilité d'enseigner le Coran, à 16 ans, il n'était pas question pour lui de rester assis des heures durant à l'ombre des arbres avec les enfants. Ce qu'il lui fallait plutôt, c'était bien tendre la corde.
Cela, il faut reconnaître également, il y a lieu de considérer le fait que les entreprises étrangères bénéficient souvent d'un bonus important de la fluctuation des changes qu'elles savent mettre à profit.
L'ENTREPRISE SES PRIX SUR LA BASE CONCURRENTIELLE
Toute concurrence loyale entre entreprises voudrait que chacune tente sa chance par des travaux à des conditions meilleures. Mais en est-il ainsi dans le cas de la concurrence à outrance ? Pour ce qui est de la soumission à des prix extrêmement bas, il est évident que l'entreprise Kanazoé ne pouvait pas suivre les entreprises étrangères sur ce terrain. Seule l'intervention des autorités nationales lui permettait de participer de façon efficace aux programmes des grands travaux d'équipements financés au Burkina par des fonds internationaux et d'éviter ainsi d'avoir à supporter des charges résultant de soumissions à des taux suicidaires. L'entreprise offre donc ses services sur la base de prix raisonnables et fixes. Contre l'exode rural, Kanazoé a le mérite d'avoir donné du travail permanent à plus de 2 500 demandeurs d'emplois immatriculés à la Caisse nationale de sécurité sociale et bénéficient, avec leur famille, de l'assistance médicale. Ces employés ne perdent pas leur emploi.
La robustesse de ma santé a beaucoup contribué à la réalisation de tout ce que j'entreprenais.
QUELQUES RÉALISATIONS EFFECTUÉES PAR L'ENTREPRISE O.K.
Immeuble de la SIB (ministère du Tourisme).
Grande mosquée de Ouagadougou.
BCEAO à Bobo-Dioulasso.
Bureaux CNSS à Ouagadougou.
Siège de la CEAO à Ouagadougou.
Bibliothèque de l'Université.
Bâtiments de l'Université.
Commissariat de police RAN à Bobo.
Usine Faso Fani à Koudougou.
Nouvelle gare voyageurs RAN à Ouagadougou.
Bureaux de l'ONERA à Ouagadougou.
Direction de la sûreté nationale à Ouagadougou.
Mess des officiers à Ouagadougou.
Gare routière internationale Ouagarinter.
Siège de la BICIA à Ouagadougou, 1ère tranche.
Abattoir frigorifique à Ouagadougou.
En ce qui concerne les réalisations d'ouvrages hydrauliques agricoles, nous retiendrons : les barrages du Sourou, de Tita, de Badadougou, de Babio, de Ouyahigouya, de Poura. C'est en 1984 que la route bitumée longue de 109 km Ouaga-Yako fut opérationnelle. Pour l'acquisition du marché, O.K. a dû procéder à un rabais de 5 %, soit 250 millions de francs. Il est à noter que depuis l'avènement du 4 août 1983, les travaux de réfection des principales artères de la capitale furent confiés à l'entreprise Kanazoé. Quelques dons offerts à la ville de Ouagadougou : Rues 145 et 147 à Bilbalgo et Samadin.
PMI à Wemtinga.
Mosquée à Hamdalaye.
Pont de Pagrazondé.
Les autres interventions au titre des dons au bénéfice du peuple exécutés dans les provinces s'élèvent à plus d'un milliard de francs CFA.
Actuellement, ceux-ci ont pris la relève des expatriés qui ne sont plus que six en ce moment. Au début, je ne pouvais pas systématiquement recruter uniquement que des cadres nationaux. Face à la libre concurrence, il me fallait ces expatriés qui étaient plus expérimentés que les nationaux dans mes rangs. Actuellement, ce sont les cadres burkinabè qui font le progrès de mon entreprise.
Le CNR a pris des engagements de payer sa dette intérieure. L'État vous doit-il des sous ? "Effectivement, dit-il, l'État me doit de l'argent et actuellement mes dossiers sont en bonne voie et j'espère être très bientôt satisfait. Cela pourrait me permettre de résoudre un certain nombre de problèmes liés à la bonne marche de mon entreprise et me permettra par la même occasion de continuer mes œuvres sociales."
Concernant le supermarché situé à l'ancienne auto-gare en face du siège de son entreprise, il affirme qu'il n'attend que le nouveau plan de construction des cinq étages pour la poursuite des travaux. Contrairement aux rumeurs circulant en ville sur le concours de son entreprise à la réalisation de projets extérieurs (notamment en Guinée), Oumarou Kanazoé est catégorique. "Je n'ai pas encore signé de contrats en dehors du Burkina. Je peux concourir aux appels d'offres internationaux, mais pour le moment je me consacre au marché de mon pays, bien que plusieurs États de la sous-région m'aient contacté pour l'exécution de certains travaux."