Issue
L'Appel #34
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-
Burkina Faso
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- Références (Burkina Faso) (297 items)
- Articles de journaux (3615 items)
- Title
- L'Appel #34
- Publisher
- L'Appel
- Date
- November 1999
- issue
- 34
- Abstract
- Mensuel Islamique de Formation et d'Information Générale
- number of pages
- 12
- Rights Holder
- Cercle d'Études, de Recherches et de Formation Islamiques
- Language
- Français
- Contributor
- Frédérick Madore
- Identifier
- iwac-issue-0000529
- content
-
L'A. PP'ES' Mensuel Islamique de Formation et d’Information Générale Burkina Faso : 200 F CFA - Zone UEMOA : 250 F CFA - Autre Afrique : 400 CFA Europe, DOM, TOM : 1 Euro - Autres pays : US $ 2
“Que tous ceux qui m’écoutent transmettent le message à d’autres et ceux-là à d’autres encore ; et que les derniers puissent le comprendre mieux que ceux qui m’écoutent directement” (Hadith)
Pourquoi Dieu a-t-Il créé le mal ? Ce qui est de l'Ijtihad Tariq Ramadan Les fils d’Adam, trop pour la terre ?
Il existe bel et bien
EDITO
Deux poids deux mesures Encore une fois et en l’espace de six ans, la petite Tchétchénie brûle sous le feu de l'armée russe. Au même moment, les militaires indonésiens plient honteusement bagages du Timor Oriental. Encore une fois, on laisse massacrer des parias du monde et on défend des citoyens du monde. La fameuse communauté internationale symbolisée par les Nations Unies déploie les grands moyens pour parachever le processus d’indépendance du Timor alors qu’en Tchétchénie, elle reste sourde aux cris de douleur d’une population civile traquée et déportée par les militaires russes. Au Timor, les Nations Unies sont intervenues au nom de la liberté des Timorais pacifistes sous les feux des hors-la-loi indonésiens. En Tchéchénie, on refuse de foutre le nez dans "les affaires intérieures de la Russie" en lutte contre les terroristes caucasiens. Au Timor, les quelques centaines de milliers d'habitants qui savourent aujourd'hui les délices de la liberté à travers l'indépendance portent la foi chrétienne. Dans le Caucase et en Tchétchénie, les dizaines de millions d’individus qui luttent depuis des décennies pour se libérer de la tutelle de Moscou se réclament de l’Islam. Facile, une telle superposition, nous dira-t-on. Mais le cas kossovar n'est-il pas suffisamment proche pour nous conforter dans l'idée qu'il y a complot contre la nation musulmane ? Au Timor, les forces de l’ONU n’ont pas livré de bataille contre les occupants indonésiens, pourtant elles ont réussi à forcer Jakarta à libérer le territoire. Au Kosovo, trois mois de bombardement de l'OTAN avec la bénédiction des Nations Unies, suivi d’une capitulation de l’armée serbe n’ont rien changé au statut juridique du Kosovo qui court toujours après son indépendance. Les indépendantistes timorais étaient des victimes de la barbarie de l'armée indonésienne tandis que les anti-indépendantistes ont été présentés comme des miliciens et des pestiférés de la liberté incapables de cohabiter avec ces bien-aimés des Nations Unies.
Au Kosovo, tous les crimes commis par les Serbes contre les Albanais musulmans du Kosovo n’ont jamais fait d’eux des ennemis de la liberté aux yeux de l'ONU. Son administration du Kosovo a été mise en place pour réhabiliter les criminels serbes avec lesquels on demande aux Albanais de cohabiter. Au Timor, on a donné la parole au peuple par la voie d’une consultation référendaire. Au Kosovo, seuls les dirigeants ont été contraints à la négociation sur le statut de leur peuple et de leur territoire. Ils avaient été autorisé à discuter de tout sauf d’une éventuelle indépendance. Ici comme sous tous les régimes arabes protégés par les puissances de l'injustice, la voix des musulmans n’a mérité que l’étouffement tandis qu’au Timor celle des autres a servi à exprimer leur choix. Le principe de l’autodétermination des peuples, bien inscrit dans la charte de l’O.N.U, est ici appliqué à la tête du client, paradoxalement par les Nations Unies elles-mêmes. Les idéalistes du droit et de la raison n’ont qu’à se morfondre et crier à l’injustice, la règle du deux poids deux mesures est malheureusement devenue la première loi dans les relations internationales. Les chrétiens du Timor oriental ont droit à la liberté et “la communauté internationale” la leur a offerte. Quant aux Tchétchènes et aux Kosovars, ils sont seulement bons pour être des subordonnés. Ainsi, va le monde.
L’APPEL
Le frère Saïdou Sankara, responsable à l'organisation et à l'information de la section CEP^S du Passoré, a la joie de vous annoncer la naissance le 27 Juillet 1999 de sa fille nommée Hanaa. Maman et bébé se portent bien. Qu'ALLAH fasse d'elle une militante de l'Islam !
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Le Salon de Thé Assalam s'est fixé un objectif : Un élève, un E-mail ; Un étudiant, un E-mail ; Tout individu, un E-mail ; Toute entreprise, un E-mail. Vous qui voulez communiquer avec le reste du monde, au cybercafé du salon de thé Assalam.
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01 BP 5536 Ouagadougou 01 - BURKINA FASO L’Appel N°034 Novembre 1999
L’APPEL AU QUOTIDIEN
L’ISLAM AU CŒUR DES USA
Un groupe de jeunes musulmans est décidé depuis quelques années à faire connaître, comprendre et respecter l’Islam aux États-Unis d’Amérique (USA). À travers une organisation islamique, le Conseil sur les relations islamiques en Amérique (CAIR), fondée en 1993, ils mènent un combat exemplaire contre la désinformation et la marginalisation des musulmans dans la société américaine. Coup de projecteur sur le travail de ces nouveaux venus dans la da’awa, qui sont pleins de vivacité et d’ambitions. On connaissait jusque-là l’Islam américain à travers principalement les Black Muslims de Malcolm X ou la Nation de l’Islam du très atypique Louis Farrakhan. L’arrivée d’autres organisations comme CAIR sur la scène islamique du pays des Yankees ne surprend guère. En effet, champions dans tous les domaines, les USA ne font pas exception dans celui des associations religieuses. Pays majoritairement protestant, les États-Unis d’Amérique comptent. Des milliers d’églises, voire de sectes chrétiennes, se réclament toutes de la religion prêchée par Jésus-Christ (AS), mais avec des doctrines parfois totalement différentes, si elles ne se contredisent pas. L’Islam n’a pas totalement échappé à cette situation aux USA. Les associations islamiques ont servi les Noirs dans leur lutte d’émancipation, mais leurs adeptes n’ont pas toujours eu une conception bien claire du dogme islamique pur.
On a connu des responsables de Black Muslims ou de la Nation de l’Islam qui prêchaient un Islam de Noirs dans lequel les Blancs et les autres races devaient être combattus. Chose totalement contraire aux principes fondamentaux de la religion de Mouhammad (SAW), où le seul critère qui distingue les hommes est le degré de piété.
Les informations dont nous disposons ne permettent pas de juger CAIR en ce qui concerne son idéologie. Nous retenons globalement que l’action de ses membres s’est jusque-là concentrée sur la réhabilitation de l’image de l’Islam en même temps qu’ils luttent. pour la création d’un lobby islamique en Amérique. Les performances du Conseil sur les Relations Islamiques en Amérique ont été notamment appréciées dans le domaine médiatique après l’explosion d’Oklahoma City en 1995 dans laquelle les musulmans américains avaient été vite accusés d’être impliqués. La communauté musulmane aux USA, et particulièrement dans la région où a eu lieu ce drame, a beaucoup souffert des brimades et des attaques de la presse avant que CAIR, par sa campagne, ne parvienne à laver les soupçons et à rétablir la vérité.
Après l’explosion, en effet, les musulmans américains se retrouvèrent victimes d’insultes verbales et d’agressions physiques. Un musulman a été ainsi poignardé dans un parking, un autre victime de tirs à l’arme, tandis qu’une mosquée appartenant à la communauté indienne a été criblée de balles. Plusieurs travailleurs musulmans étaient devenus des pestiférés dans leur service ; sur les terrains de jeu, les enfants musulmans étaient méprisés par leurs camarades des autres. religions. La haine ne s’arrête pas à la communauté dans son ensemble mais elle atteint aussi ses symboles. C’est ainsi que des imams seront menacés et des femmes en hijab harcelées. “Ce fut un moment terrible pour nous tous,” commente Mustafa Alim, un Américain d’origine afghane qui a vécu aux USA pendant plus de deux décennies.
Le coup de souffle. Dans un tel climat, où la terre de l’Amérique devint subitement étroite pour les adeptes de l’Islam, la nouvelle génération de musulmans qui forment CAIR utilise son vaste réseau de communication pour faire paraître un reportage choc qui eut un effet dévastateur. Le titre du reportage : “Précipitation au jugement quelques semaines après l'explosion,” paru après les attaques contre les musulmans, a permis à la communauté de reprendre confiance en elle-même. “Lorsque la nouvelle parut quelques jours après l'explosion confirmant le fait que les musulmans n'étaient pas impliqués dans l'attaque, nous avons tous poussé un ouf de soulagement,” se souvient IM Mouhammad. Pharmacien et membre actif de plusieurs organisations musulmanes aux USA. En plus de ce reportage, CAIR a aussi fait plusieurs interventions dans la presse américaine avec notamment des interviews de son dynamique Directeur Exécutif Nihad Awad. La campagne médiatique du conseil a été dirigée contre les grands studios hollywoodiens, les compagnies de greeting cards, la maison Nike, toutes coupables d’attaques gratuites contre l’Islam.
Ainsi, en 1994, Awad et son organisation ont remporté leur première importante victoire contre une grande compagnie de distribution de posters en faisant retirer simplement de la publicité d'un poster montrant une femme en hijab noir avec l’inscription "Ainsi vous ressemblez à une chi’ite". Une autre bataille avec la grande maison de fabrication d’équipements sportifs a tourné en faveur des adeptes de CAIR. Nike avait en effet marqué le mot “Allah” sur la semelle d’une de ses chaussures. Cette offense aux musulmans et à tous les hommes sensés n’a laissé indifférents les activités de CAIR. qui par leur pression, ont contraint la grande Nike à retirer cette chaussure du marché. Et mieux, Nike pour se faire excuser a construit plusieurs terrains de jeu pour des écoles musulmanes. Parallèlement à ce combat médiatique d’avant-garde, CAIR organise régulièrement des sessions de formation à l’intention des jeunes dans le but de préparer les élites musulmanes de demain. L’action est prometteuse comme en témoignent les propos d’un de ces jeunes de l’école de CAIR : “Nous sommes la prochaine génération. Si vous êtes convaincus de ce que CAIR a fait jusqu'à présent, attendez de voir ce que nous allons faire dans le futur.”
Le Lobbying de CAIR
Les observateurs de la scène politique et surtout les médias au pays de l’oncle Sam estiment que l’organisation de Nihad Awad est la première d’essence islamique à faire du lobbying politique. Dans ses combats pour la réhabilitation de l’image de l’Islam, CAIR a parfois bénéficié grâce à son pragmatisme, du soutien de certains leaders d’église, et même dans certains combats. Comme la cause des musulmans de Bosnie, des activistes politiques israélo-léens ont travaillé à ses côtés. Mais c’est surtout du côté politique que CAIR entend rompre avec les habitudes. Jusque-là, les musulmans ont observé la chose politique comme une réalité qui ne concerne que les autres. Les hommes politiques américains le leur rendent bien d’ailleurs. Une démocrate californienne à qui on avait demandé au début des années 1990 de rencontrer la communauté musulmane dans le cadre d’une campagne électorale s’était interrogée : “Pourquoi dois-je rencontrer les musulmans ? Ils ne votent jamais.”
S’il est démontré que la communauté musulmane a une participation faible aux consultations électorales américaines, l’action de CAIR montre son intérêt de plus en plus croissant à prendre part au débat politique. Les responsables du Conseil sur les Relations islamiques en Amérique disposent de réseaux au Congrès (le parlement des USA). De plus en plus, on trouve des défenseurs des causes islamiques parmi les députés. Américains, grâce au travail de CAIR qui, de son bureau de Washington, est décidé à faire entendre la voix des musulmans sur le vaste territoire des USA.
Cheick Saar
Source : Revue Arabes Trends/june 1999
L’Appel N°034 Novembre 1999
Les fils d’Adam, trop pour la terre ?
Nous sommes depuis le 12 octobre dernier, selon les Nations Unies, 6 milliards d'habitants sur la terre. Le 6 milliardième être humain a été accueilli dans les Balkans par les plus hautes autorités de l’institution internationale qui ont à l’occasion exprimé leur sentiment de joie, mais également des inquiétudes sur l’avenir des fils d’Adam, de plus en plus nombreux sur la planète.
Faut-il en réalité s’inquiéter de l’avenir de la population mondiale ? L’accroissement de la population de la planète semble en effet inquiéter les spécialistes qui incriminent généralement le déséquilibre grandissant entre les effectifs humains et les ressources indispensables à la survie de la population mondiale. La solution de facilité. Préconisée pour venir à bout de ce déséquilibre, c’est entre autres la politique de limitation des naissances financée à coup de milliards dans les pays sous-développés surtout. L’Afrique et l’Asie, principalement accusées de produire l’essentiel des bouches à nourrir de la planète, sont devenues des champs d’expérimentation de toutes formes de méthodes de contraception.
On a beau ne pas le reconnaître, les vrais problèmes de l’humanité ne sont pas pour l’essentiel liés à l’accroissement de la population mondiale. Ils semblent plutôt résider beaucoup plus dans l’injustice et l’ingratitude des riches que dans la fécondité ou la fertilité des plus pauvres.
Comment voulez-vous que l’humanité vive dans la paix, la sécurité et la quiétude quand les 7/8e des richesses sont entre les mains des pays dits développés qui ne représentent à peine que le 1/5e de la population mondiale ? Est-il logique que cette minorité s’empiffre au détriment de la majorité qui croupit dans une misère sans précédent ? Il est Il est inadmissible que les plus riches de la planète gaspillent les ressources et demandent aux plus pauvres (qu’ils ne cessent de piller) de payer. Les riches ne doivent pas à eux seuls s’arroger le droit de procréer parce qu’en réalité, il y a sur terre de la nourriture pour tous, comme le Coran le dit : "Il n’est pas d’être vivant sur la terre dont la nourriture n’incombe à Dieu" (Coran 11/6).
Ce n’est donc pas normal que ceux qui disent de ne pas beaucoup enfanter (les pays développés) encouragent en même temps les naissances dans leurs pays par l’octroi d’allocations, l’abattement de charges fiscales et d’autres avantages. La lutte contre la pauvreté ne passe pas prioritairement par la limitation des naissances, car nos problèmes sont beaucoup plus liés à la mauvaise répartition, à la mauvaise utilisation et à la sous-exploitation des ressources qu’à celui d’un effectif.
Dans plusieurs versets, le Coran nous montre que nos problèmes sont effectivement ailleurs, notamment dans notre injustice et notre ingratitude. et notre méchanceté et non dans l’insuffisance des ressources qu’il a assujetties à l’homme : “Ne tuez pas vos enfants par peur de pauvreté. C’est nous qui assurons leur subsistance ainsi que la vôtre” (Coran 17/31). La population est en réalité très importante. Dieu nous a créés pour que l’on peuple la terre et pour qu’on y applique sa volonté : “Il (Dieu) créa la terre, et il vous la donna pour la peupler” (Coran 11/61).
Le messager a aussi dit : “Épousez des femmes amoureuses et prolifiques, car l’importance de votre nombre fera ma fierté, devant les nations au jour de la résurrection”. Une bonne lecture du hadith laisse apparaître que l’essentiel, ce n’est pas de faire des enfants, mais que c’est surtout d’être suffisamment responsable à leur égard. La responsabilité des géniteurs, c’est justement de faire de leurs enfants des hommes de la communauté de Mouhammad (saw). Cela revient à assurer aux enfants un encadrement adéquat de même qu’une éducation morale, intellectuelle et physique qui puisse. permettre de peupler la terre par des individus vertueux et respectueux des lois de Dieu. Le prophète ne serait pas assurément fier de se retrouver avec des incrédules et des mécréants. Mieux, il souhaiterait que sa communauté soit composée d’hommes en quantité, mais surtout en qualité : “Je crains, disait-il, que les autres nations ne se jettent sur vous comme des invités autour d’un plat.... Cela parce que serons-nous peu nombreux ? interrogèrent les compagnons. Non, rétorqua le prophète. Vous serez nombreux mais aussi fragiles que l’écume charriée par les eaux...”
Avec un peu plus d’efficience, de bon sens et de justice dans la gestion et la répartition des ressources, on peut couvrir les besoins les plus essentiels de la planète. C’est dire en d’autres termes que la résolution du problème de la pauvreté de l’humanité passe par la justice, la compassion et l’humanisme des plus développés. Bref, elle passe par la bonne administration des biens que Dieu a mis à la disposition de tous. L’Islam ne saurait donc Admettre comme solution aux problèmes de l’humanité toutes formes de limitation de naissance ayant pour finalité de réduire le nombre de bouches à nourrir : “Ne tuez pas vos enfants pour une pénurie de vivres. La nourriture nous l’attribuons à vous comme à eux” (Coran 6/151).
En revanche, l’islam ne ferme pas la porte à toute planification basée sur des raisons objectives et licites. Ainsi, il sera admis l’espacement des naissances s’il est établi qu’une nouvelle naissance peut nuire à la santé de la mère ou même de l’enfant. Il sera admis qu’un couple, qui pour des raisons d’ordre économique, ne se sent pas en mesure d’assurer à un enfant un encadrement adéquat et une bonne éducation morale, spirituelle, intellectuelle, physique... pour en faire un être exemplaire de la communauté, planifie ses naissances.
C’est donc le réalisme de l’Islam qui n’admet pas à un niveau général la limitation des naissances comme une politique de développement.
Sharif Souley
L’Appel N°034
Novembre 1999
Rencontre Entretien avec Tariq Ramadan
Professeur d'islamologie à l’Université de Fribourg (Suisse) et de philosophie à l’Université de Genève (Suisse), Tariq Ramadan n’est pas un inconnu du monde musulman francophone. Conférencier émérite, ce petit-fils de Hassan Al Banna, le fondateur du mouvement des Frères musulmans, tranche par son esprit critique et son érudition. L’Appel l’a rencontré lors du Séminaire international de formation des responsables d’associations musulmanes (S.L.F.R.A.M 99) à Abidjan, dont il était l’invité vedette.
L’Appel : Comment caractérisez-vous le comportement des musulmans à l’égard des autres ?
Tariq Ramadan : Si Dieu l’avait voulu, Il aurait fait de vous une seule communauté. Il a voulu la diversité, comme le résume le texte coranique. L’Islam est la dernière révélation divine et il est confronté à beaucoup d’adversité. Il faut avoir du respect pour les autres et exiger qu’ils aient la même attitude à notre égard. Il faut essayer de voir s’il y a des points communs où l’on peut travailler. Ensemble. Il y a des défis liés à l’analphabétisme, aux fléaux, à la pauvreté, à l’injustice et bien d’autres tares et vices contre lesquels nous devons communément lutter. Il y a donc des valeurs communes tout comme dans la prophétie. Il y a un message commun au niveau de l’essentiel.
L’Appel : Comment expliquez-vous la peur et la crainte que suscite l’Islam ?
Tariq Ramadan : Il y a un réveil évident de l’Islam partout dans le monde. Il y a à l’intérieur des masses musulmanes une véritable renaissance. Ce mouvement est transversal, c’est-à-dire qu’il existe partout. Les musulmans affirment une spiritualité qui les positionne de façon résistante à l’ordre actuel basé sur l’injustice et la dépravation des mœurs. Les musulmans ont conscience que cela est contraire à l’honorabilité des enfants d’Adam. L’Islam apparaît comme une véritable résistance aujourd’hui à tout ce qui n’est pas normal. Il est évident que ceux d’en face diabolisent et cliquettent l’Islam.
L’Appel : Vous aimez parler d’identité musulmane, quel Contenu, lui donnez-vous ? Tariq Ramadan : Il existe bel et bien une identité musulmane. Le premier triptyque foi-pratique-spiritualité, c’est-à-dire l’Iman, l’Islam et l’Ihsan, qui est la vie du cœur. Car c’est le cœur qui inspire.
Le deuxième axe est l’intelligence des textes et l’intelligence du contexte. Il faut éviter de faire de nos textes des textes figés et froids. Notre intelligence et notre raison, nourries par la foi, doivent nous permettre de tirer en tout lieu et à toute époque la quintessence du texte, la finalité de la parole divine ou prophétique. C’est cette lecture intelligente des textes et des contextes qui ancre l’Islam dans le temps et dans l’espace.
Le troisième axe, c’est éduquer et transmettre. Le musulman, grâce à son éducation, se transforme et transforme son environnement dans le sens du bien. Il transmet donc des valeurs. Ainsi, il participe à un projet de société en agissant de la sorte.
Agir et participer, tel est le quatrième axe de l’identité musulmane. L’Appel : L’expression. Vous qui croyez devient dans vos ouvrages : “vous qui portez témoignage”. Pourquoi ?
Tariq Ramadan : Pour moi, le musulman, en vivant sa foi, témoigne de cette foi. En priant, en jeûnant, en croyant... il porte témoignage de sa croyance. Il témoigne devant Dieu, les hommes, les anges de sa croyance. On remarque que les musulmans sont en retard dans bien des domaines.
L’Appel : Vous titrez justement un de vos livres : “Grandeur de l’Islam - Décadence des musulmans”. Comment allier la beauté de cette théorie à sa concrétisation ?
Tariq Ramadan : Il faut faire l’analyse critique des maux et de ce qui a provoqué ces maux. Aujourd’hui, le monde musulman vit beaucoup de problèmes. Les causes vont de la dictature des pouvoirs, la démission des intellectuels musulmans au colonialisme. Ce qu’il faut promouvoir maintenant, c’est une nouvelle formation islamique. Il faut faire comprendre à tous les musulmans que toute maîtrise dans un domaine qui n’est pas directement liée au seul critère de la connaissance (Coran et... Sunna) restent religieuse. Un médecin, il prie quand il opère. Un économiste, quand il maîtrise son sujet, est quelqu’un qui applique sa religion. Le Prophète (SAW) dit : “Dieu aime quand quelqu'un fait quelque chose, qu’il le fasse bien.” Pour nous, si l’Islam rayonne sur toutes les activités, on a de bons citoyens. De ce point de vue, il faut revoir notre formation.
L’Appel : Votre approche de la charria tranche d’avec la vision simpliste et réductrice au code pénal. Tariq Ramadan : La charria n’est pas bien comprise même par certains musulmans. Le verset coranique dit : "Nous avons donné à chacun d’entre vous une voie et une praxis.” La charria regroupe la foi, la pratique et la spiritualité. Le Coran et la sounnah sont les sources sur lesquelles il n’y a pas de divergence ; c’est la lecture normative de ces deux sources qui va donner naissance aux sciences du Coran et aux sciences du Hadith. La charria, c’est la conception du monde, de la vie, de la mort, de l’au-delà ; c’est une vision globale du monde. C’est le chemin qui mène à la source qu’est Dieu. La charria peut donc secréter plusieurs branches de connaissances : El Aquida (la croyance), Usul El Ijtih (la méthodologie d’extraction des règles), El Achlaq (la morale, l’éthique) et le soufisme dans sa bonne compréhension. Le fiqh est donc l’application de la loi dans un espace et dans un temps donné.
L’Appel : Vous distinguez six grandes tendances dans le monde musulman. Détaillez-nous les ?
Tariq Ramadan : Dans l’analyse des tendances du monde musulman, j’en ai distingué six. La première tendance est celle du traditionalisme d’école. Il y a une lecture de l’Islam à travers une seule école. Seule l’idée de l’école compte et fait effet. La deuxième tendance est la Salafia littéraliste. Elle se trouve dans les trois premières générations. Il y a une attitude rigoureuse. On ne passe pas par une école. On reste lié aux textes. La troisième tendance est la Salafia réformiste. Ici, l’école n’est pas une nécessité. Il y a une lecture interprétative du texte. Il y a... ijtihad. La quatrième tendance est la salafia littéraliste politisée. On découvre une lecture politique des textes. La seule chose qui m’intéresse, c’est la khilafat, le pouvoir. La cinquième tendance est celle des réformistes libéraux. On assiste à une lecture laïque des textes. Le cartésianisme et le rationalisme sont obsédants. La dernière tendance est celle de la voie soufie. Elle a connu des évolutions et des déviations, mais dans son principe, elle a sa source dans l’Islam.
Propos recueillis par Tiégo Tiemtoré
L’Appel N° 034 Novembre 1999
L'Appel islamique
PORTRAIT MOU’AZ BEN DJABAL, Un “agrégé de l’Université du Prophète de l’Islam”
À l’avènement de l’Islam, des hommes sont venus aux côtés du prophète Mouhammad (saw), pour découvrir, comprendre et vivre le Coran, ce message adressé à l’humanité toute entière. Durant 23 ans, des compagnons ont été instruits et éduqués par le noble Prophète de l’Islam. Ces hommes issus du premier Makarauta (centre de formation islamique) sont ainsi devenus les maîtres de La science, de la sagesse, de la législation,... Parmi eux, Mou’az bin Djabal s’est illustré par la maîtrise du licite et de l’illicite. Comment ce jeune homme a-t-il réussi à accéder en quelques temps seulement à cette agrégation ? C’est ce que nous vous proposons de découvrir dans les lignes qui suivent.
Mou’az bin Djabal, un jeune homme à l’aspect attrayant, fait partie de ces 70 ansars qui prêtèrent serment d’allégeance au Prophète (saw) à Al Aqaba pour le soutenir dans sa mission. D’un teint bronzé, il présentait toujours un visage radieux et un air séduisant. Son calme lui attirait tous les regards extérieurs à l’assemblée des Saha-bas dont il était le plus jeune. En réalité, c’était un bon causeur, mais qui n’intervenait que lorsque la situation l’exigeait et gardait aussi le silence par ses longues et profondes méditations. Cette attitude d’étudiant averti, consciencieux et soucieux lui a permis d’accéder à la science religieuse et d’exceller dans la connaissance du licite et de l’illicite. L’agrégation de Mou’az en matière de licite et d’illicite
Mou’az était convaincu que la connaissance est le capital du vrai croyant et la science, son arme. C’est pourquoi il ne se lassait point d’apprendre en y mettant toute son intelligence et toute sa sagesse. Son engouement pour la recherche du savoir va lui permettre de décrocher sa première distinction honorifique auprès de l’Imam des Envoyés Mouhammad (Saw). Ce dernier déclarait à son sujet : “Mou’az est le plus informé en matière de licite et d’illicite”. La confiance venait de naître entre Mou’az et son maître, le prophète Mouhammad (SAW), qui n’hésita pas à le nommer ambassadeur de l’Islam au Yémen alors qu’il n’avait qu’une vingtaine d’années. Fort de cette distinction, Mou’az fera preuve de lucidité dans ses prises de décision, conscient sans nul doute que la raison constitue la base de sa religion.
Mou’az ouvre la porte de l’Ijtihad
Pour tester son jeune ambassadeur, le Prophète (SAW) demanda d’après quoi il assurerait la justice parmi les... musulmans. Mou’az répondit en homme averti que ce serait respectivement d’après le Coran, la Sunna du Messager et en dernier ressort son propre raisonnement si la question ne trouvait pas sa réponse dans les deux premières sources. Le prophète satisfait loua son Seigneur en ces termes : “Louange à Allah qui a honoré son Messager avec ce qui le rend satisfait”. La voie de l’ijtihad venait d’être ouverte. Mou’az forçait l’admiration de tous les Sahabas qui ne tarissaient pas d’éloges à son endroit.
Le Khalife Oumar fait les éloges de Mou’az. Lorsque Omar bin Khattab vint au commandement des affaires de l’Etat islamique, il nomma Mou’az comme gouverneur de Damas. Pour justifier son choix, l’Amir des croyants déclare : “Si le Seigneur me demandait pourquoi j’ai désigné Mou’az comme gouverneur, je répondrai que j’ai entendu son Messager dire : “Lorsque les savants remonteront vers Dieu, le Tout-Puissant, ils trouveront sûrement Mou’az devant eux.” À la question de savoir qui il désignerait comme son successeur à... La tête de l’Etat, le calife, répondit : “Si Mou’az Bin Djabbal était vivant et que je lui confiais le commandement, si en comparaissant devant le Souverain du jour du jugement dernier, on me demandait ce que j’ai laissé à la tête de la nation de Mouhammad (SAW), je répondrais : “J’ai désigné Mou’az Bin Djabbal après que j’ai entendu le prophète dire qu’il est l’Imam des savants le jour de la résurrection.” Mais en ce moment, Mou’az avait déjà rejoint son Seigneur.
La mort du prophète pour Mou’az était plus qu’une réalité. Il affirmait : “Je ne me suis jamais réveillé un matin sans penser que je ne verrai plus le soir, ni couché le soir sans penser ne plus voir poindre le jour ; de même, lorsque je fais un pas, je ne suis jamais sûr de faire un autre. Car il me semble voir chaque matin agenouillé devant leur livre, les habitants du paradis se réjouir et ceux de l’enfer se lamenter.”
De ce fait, Mou’az ne cessait de préparer son retour auprès du Seigneur à travers des œuvres de piété. Pour lui, il ne... suffisait pas seulement d’avoir des connaissances théoriques, mais il fallait surtout mettre en pratique ce que l’on a appris : “Apprenez ce que vous voulez, mais sachez que le Seigneur ne vous attribuera de récompenses que pour ce que vous avez pratiqué de votre science. À l’âge de trente-trois ans, Mou’az devait regagner son Seigneur.” Regardant le ciel, il s’adressa au très miséricordieux en ces termes : “Ô mon Dieu ! ... Je te redoutais certes, mais aujourd’hui je te supplie. Mon Dieu ! Tu sais que je n’aimais pas la vie (d’ici-bas) pour jouir du courant des fleuves et de la plantation des arbres... mais pour endurer la soif et les moments de gêne et pour acquérir la science, la foi et la soumission.” “Bienvenue soit la mort, une bien-aimée, venue pour un besoin,” dira-t-il au soir de sa vie comme pour saluer l’ange de la mort. Ce besoin était le Paradis. Qu’Allah nous accorde ce Paradis.
Bakayoko Nouhoun
Erratum ! Dans notre article du mois de septembre, nous titrions “Zaïd Bin Arissat, le secrétaire.” du prophète”. Il fallait lire plutôt : “Zaïd Bin Arrissat, ce bien-aimé du Prophète”, car le secrétaire particulier du prophète était Zaïd Bin Thabbit. Toutes nos excuses pour cette confusion.
L’Appel N°034 Novembre 1999
Ce qui est de l’IJTIHAD
L'APPEL, dans son numéro 033 d’octobre 1999, a publié un article sous le titre : “La place de l’Ijtihad dans la vie du croyant”. Nous saluons vivement l’auteur de cet article pour sa volonté de contribuer à la promotion de l’Islam par la voie de la plume. Cependant, nous pensons qu’un sujet d’une si grande importance doit être davantage approfondi. C'est pourquoi nous voulons apporter un complément à cette réflexion.
Rappelons que Dieu nous dit dans le Coran (chapitre 5, verset 2) : “...entraidez-vous dans l'accomplissement des bonnes œuvres et de la piété et ne vous entraidez pas dans le péché et les transgressions. Et craignez, car ALLAH est certes dur en punition.”
L’ijtihad est un instrument technique de la jurisprudence. islamique. Il fut l’objet de débats entre les savants de la jurisprudence islamique. C’est ainsi donc que plusieurs questions ont fait l’objet de préoccupation : Quelle définition doit-on donner au mot ijtihad ? Qu’est-ce qu’il faut pour qu’on parle d’ijtihad ? Quelles sont les différentes catégories d’ijtihad ? Doit-on de nos jours faire l’ijtihad ? Quelles conditions doit-on réunir pour faire l’ijtihad ? L’intégrité morale de celui qui veut faire de l’ijtihad est-elle une condition ? Était-il permis de faire de l’ijtihad en présence du Prophète (SAW) ? Était-il permis au Prophète (SAW) lui-même de faire de l’ijtihad ? Certes, l’ijtihad a une place importante dans la vie du croyant comme le souligne l’article précédent, mais il y a lieu de préciser que tout le monde ne peut pas se donner le droit de faire usage de cet instrument technique et très délicat.
De la définition de l’ijtihad. La définition retenue par les savants de la jurisprudence islamique est que l’ijtihad, c’est l’effort fourni par le faqih. (le juriste) pour dégager le caractère juridique d’une chose. C’est lorsque le faqih, face à une question, cherche, rappelle ou interprète à partir des textes de l’Islam et se prononce par rapport à la question en disant qu’elle est obligatoire, recommandée, licite, illicite... Ainsi donc, il fait de l’ijtihad selon l’entendement des savants de la jurisprudence islamique. Et celui qui fait de l’ijtihad est appelé al Moujtahid.
Lorsqu’il y a ijtihad sur une question, cela implique quatre choses essentielles, à savoir :
- Que cet ijtihad ait été fait par un Moujtahid, donc un faqih remplissant toutes les conditions exigées en la matière ;
- Que la question sur laquelle l’ijtihad a été fait soit une question qui n’a pas eu de réponse dans les textes de l’Islam ;
- Que le moujtahid ait fait un effort réel de réflexion, pour chercher, rappeler, déduire, interpréter, avant de se prononcer.
- Que le moujtahid, pour soutenir son effort, ait eu recours aux sources de références reconnues par l’Islam.
Il va de soi que Tout ijtihad dépourvu d’une de ces quatre choses n’est pas de l’ijtihad. Celui qui veut faire de l’ijtihad, c’est-à-dire le moujtahid, doit respecter un certain nombre de conditions. Ces conditions sont regroupées en deux catégories : celles qui font l’objet de consensus et celles qui font l’objet de divergence. Les conditions sur lesquelles il y a unanimité sont au nombre de neuf :
1. Que le Mujtahid soit musulman ;
2. Qu’il jouisse de ses facultés mentales ;
3. Qu’il soit majeur ;
4. Qu’il soit intelligent, capable de comprendre le fond d’une expression ;
5. Qu’il ait une connaissance du Coran. Certains savants pensent qu’à ce niveau, la connaissance des versets relatifs aux préceptes de l’Islam, ainsi que leurs places dans le Coran, suffit. D’autres pensent qu’il ne suffit pas de les connaître, mais aussi de les mémoriser. Pour un autre groupe de savants, la mémorisation de tout le Coran est nécessaire pour faire de l’ijtihad.
6. Qu’il ait une connaissance parfaite de la sunna (tradition du Prophète (PSL)). Cela consiste à connaître entre autres :
- Les différents types de hadiths, notamment, les hadiths servant à restreindre le cadre d’application d’un verset du Coran, ceux servant à expliquer un verset du Coran, ceux n’ayant aucune relation avec un verset du Coran...
- Les conditions qu’il faut réunir afin de pouvoir argumenter avec un hadith et le prendre comme preuve, notamment, la validité de la chaîne de transmission du hadith, sa prédominance sur d’autres, son caractère abrogé ou non.
- Les voies par lesquelles on connaît la validité de la chaîne de transmission d’un hadith ;
- La signification des termes d’un hadith et leurs implications juridiques ;
- Les hadiths abrogateurs et les hadiths abrogés ;
- Ce qu’il faut faire lorsque deux hadiths sont apparemment contradictoires ;
- Les raisons pour lesquelles un hadith est venu.
7- Qu’il ait (le Moujtahid) une connaissance de la langue arabe ;
8- Qu’il ait une connaissance de la jurisprudence islamique ;
9- Qu’il sache s’il y a un consensus des savants. musulmans sur le thème autour duquel il mène sa réflexion ; Quant aux conditions sur lesquelles les savants ont divergé, elles sont au nombre de trois :
1- La connaissance de la biographie du Prophète. Selon certains savants, tels que Ibn Hazam, c’est une condition de l’ijtihad. Pour d’autres, ce n’est pas une condition indispensable, car elle fait déjà partie de la tradition du Prophète.
2- La connaissance des préceptes qui sont dérivés des préceptes fondamentaux tirés des textes islamiques. Certains savants pensent que la connaissance de ces préceptes dérivés est une condition de l’ijtihad. D’autres pensent que non, parce que selon eux, ces préceptes dérivent de la logique. La licité de cette science fut l’objet de débat entre les savants en jurisprudence islamique. Ceux qui pensent que l’usage de cette science est permis trouvent que c’est une condition de l’ijtihad. C’est le cas de l’Imam Ghazali. Certains pensent qu’elle est interdite. C’est le cas de Nawawi. D’autres pensent que si c’est une logique. Faite selon l’entendement philosophique, on ne doit pas s’en servir. Dans le cas contraire, on peut s’en servir mais en faisant l’ijtihad. Pour une autre catégorie de savants, la connaissance de la logique n’est pas une condition pour le Moujtahid, mais la connaissance de certains termes relatifs à cette science est une nécessité.
À la question de savoir si de nos jours on doit faire de l’ijtihad, il n’y a pas de réponse tranchée. Trois points de vue se dégagent de l’argument des savants : certains savants pensent qu’on ne doit pas faire le Ijtihad de nos jours. Le souci est ici de protéger le droit islamique de toute tentative d’infiltration de choses nouvelles. Pour d’autres savants, on doit faire de l’ijtihad de nos jours, car il y a toujours des faits et événements nouveaux qui exigent une réponse. Il faut donc faire le Ijtihad pour trouver les caractères juridiques des nouveaux événements lorsqu’ils surviennent. Il y a une position intermédiaire qui dit qu’on doit faire de l’ijtihad de nos jours, mais... dans le respect strict de ses normes. Voilà ce qui est de l’ijtihad ou effort de réflexion personnel dont il a été question dans un article du N°33 de l'Appel. Si l’ijtihad s’avère nécessaire, il n’est pas fait par n’importe qui et n’importe comment.
KEITA Abdoulaye
Diplômé en droit islamique
L’Appel N° 034
Novembre 1999
Signification, importance et implications du travail selon l’Islam
Dans un témoignage pathétique, le célèbre soufi As-sîbli (861-945) disait : “J'ai suivi quatre cent maîtres et j'ai lu quatre mille hadiths. Puis j'en ai choisi un seul que j'ai mis en pratique à l'exclusion de tout autre parce que je l'ai médité et j'y ai trouvé ma délivrance et mon salut. J'ai trouvé aussi la science entière des anciens et des modernes. Je m'en suis contenté.” Voici ce hadith : “Travaille pour la vie d'ici-bas dans la mesure où tu résideras sur la terre ; travaille pour la vie future dans la mesure où tu dois y demeurer ; travaille pour ton Seigneur autant que tu as besoin de lui et...” travail pour le feu de l'Enfer autant que tu pourrais en supporter l'ardeur. Dans ce témoignage et à travers ce hadith, on retient que le travail est important. Important d’autant plus que sa finalité c’est de permettre à l’homme d’avoir les moyens nécessaires pour accomplir la mission pour laquelle il a été créé.
De la signification du travail. Le travail, c’est l’effort entrepris pour gagner sa vie. C’est en d’autres termes, le moyen par lequel l’individu gagne son pain quotidien et s’épanouit pleinement dans la société. Contrairement à l’Occident judéo-chrétien qui avait une approche négative du travail, l’Islam a très tôt eu le mérite de donner au travail sa signification réelle. Ainsi, le travail en Islam prend en compte le bien-être de l’homme tant dans sa vie matérielle que dans sa vie spirituelle. Car, autant le travail doit permettre à l’homme d’acquérir des biens et des richesses de ce monde pour assurer sa subsistance et son confort matériel, autant il doit lui donner les moyens nécessaires pour... Vouer avec dignité et loyauté le culte à Dieu. Pour avoir accepté la lourde responsabilité de la lieutenance de Dieu sur terre (Coran 33/72 et 2/30), l’homme, fort de son intelligence et de son ingéniosité, doit travailler pour réaliser les projets rentrant dans le cadre de son épanouissement moral, matériel et spirituel, et partant de celui de toute la société. Ainsi, le travail est en islam le témoignage de l’indépendance et de la responsabilité de l’homme. C’est à ce titre qu’il doit permettre à l’homme d’utiliser les moyens qui lui sont octroyés pour parcourir le chemin de la vie (ici-bas et au-delà) sans trop compter sur les autres au point de devenir oisif et sans non plus adjoindre des idoles à Dieu.
De l’importance et de la finalité du travail. Dans un hadith, le prophète (saw) disait au sujet du travail : “Celui qui revient fatigué au bout d’une journée de labeur, a ses péchés pardonnés”. Dans cet enseignement du messager, l’on retiendra que le travail accompli dans le but d’être indépendant, d’avoir un minimum de confort pour accomplir sa mission avec dignité et contribuer en fin de compte au développement de la société, est un acte de dévotion, donc de foi et de piété. C’est autrement dit, un acte que l’on peut hisser au grade d’action cultuelle.
Selon une tradition, le prophète fut interrogé à propos d’un dévot qui jeûnait, priait et se livrait au zikr d’une manière quasiment ininterrompue. - “Qui est-ce qui le nourrit ?", leur demanda le prophète. - “Nous le nourrissons tous", répondirent les compagnons. - “Vous êtes alors plus dévoués à Dieu que lui", conclut le prophète.
La piété ne saurait donc en aucun cas justifier l’oisiveté, la mendicité et la vie dépendante. Le Coran l’affirme à juste titre en ces termes : “Aucune âme ne portera le fardeau d'autrui. Et en vérité, l'homme n’obtient que le fruit de ses efforts” (Sourate 53/38 - 40).
La finalité du travail, c’est de réaliser en l’homme un certain équilibre en alliant foi et action productive. Dans la sourate 62 au verset 10, Dieu... nous dit : “Après l’accomplissement de la prière, dispersez-vous et allez à la recherche des bienfaits de Dieu et intensifiez la mention du nom de Dieu. Peut-être seriez-vous heureux.” Dans ce verset, Dieu nous demande de nous adonner à l’activité spirituelle, gage de notre succès dans l’au-delà, mais il nous exhorte aussi à nous déployer pour rechercher les moyens de notre subsistance et le bien-être social qui représentent notre quote-part dans la vie d’ici-bas. “Et recherche à travers ce qu'Allah t'a donné, la demeure dernière et n'oublie pas ta part en cette vie..." Coran 28/77.
Au-delà de l’équilibre entre le spirituel et le matériel qu’il doit pouvoir réaliser en l’individu, le travail vise à une échelle plus grande, le développement de toute la communauté. Il s’agit d’un développement qui intègre le social, l’économique, le matériel et le spirituel. Autrement dit, qui apporte un changement global dans la vie de l’homme, ce vicaire de Dieu sur terre.
Implications du travail. Si l’Islam incite au Travail, il n’en est pas moins vrai qu’il prescrit à ses adeptes des activités recommandables et des moyens pour y parvenir : "Dieu est bon et n'accepte que ce qui est bon", nous dit le hadith du prophète (saw). Ainsi, l’Islam encourage toute activité qui éloigne l’homme de la spoliation des biens d’autrui et lui procure des gains licites. “Acquérir du bien licite pour assurer son existence et sa subsistance est nécessaire à tout homme et femme”, déclarait le prophète Mouhammad (saw).
Selon l’Islam, chaque individu doit, selon son goût, son habileté, ses talents et sa force, choisir l’un des nombreux métiers et arts qui peuvent lui procurer des gains licites. Au titre des nombreuses activités que l’Islam autorise, on peut citer l’agriculture, l’élevage, la pêche, l’industrie, le commerce... Dans un hadith, le prophète affirmait : “Nul n'a consommé un bien meilleur que le fruit du travail de ses mains". Ce hadith montre clairement que l’Islam n’a aucune estime pour les pratiques qui peuvent troubler la... quiétude de l’individu et par-delà de toute la société. À juste titre, la corruption, le vol, la fraude, la mendicité, la prostitution, l’escroquerie, le meurtre et les jeux de hasard sont condamnés, même s’ils sont prisés pour "les gains faciles" qu’ils procurent. De même, l’oisiveté, le parasitisme et toute autre forme de vie dépendante sont en Islam à éviter parce que sources de péchés et de déshonneurs. L’exclusion de pratiques illicites répond au souci de l’Islam de voir le capital de l’homme être licitement constitué et fructifié avec la plus parfaite honnêteté.
Le travail constitue en Islam un moyen devant permettre à l’homme de réaliser sa mission de vicaire de Dieu sur terre dans la dignité, la liberté et la tranquillité d’esprit. Le travail bien fait est en d’autres termes, un acte d’adoration. Ce n’est donc pas par hasard si, pour grands qu’ils fussent et malgré leurs charges spirituelles et leurs responsabilités sociales, les prophètes de Dieu eux-mêmes exerçaient souvent un métier. Le travail revêt une grande importance en Islam en tant que facteur de développement de toute la société. C’est pourquoi la législation islamique exhorte les membres de la communauté à travailler en vue de leur bien-être social, économique, matériel et spirituel.
L’Appel N°034 Novembre 1999
Pourquoi Dieu a-t-il créé le mal ?
Alex, qui a fait ses études supérieures en Europe, est de ceux qui ne croient pas en Dieu. À chaque fois que nous nous rencontrons, notre conversation débouche immanquablement sur la religion. Un jour, mon ami me demanda : “Comment pouvez-vous prétendre que votre Dieu est parfait, miséricordieux, bon et généreux alors qu'Il a créé tous ces maux qui accablent notre monde : la maladie, la vieillesse, la mort, les tremblements de terre, les inondations, les volcans, les microbes, le poison, la chaleur torride et le froid glacial, le cancer qui n'épargne ni le petit enfant ni le vieillard ? Si Dieu est amour, s'il est bonté, pourquoi crée-t-Il... La haine, la laideur et le mal ? Cette question, nous allons l’aborder en trois niveaux.
Le mal dans nos actes. Nous affirmons pour notre part que Dieu n’est que Miséricorde et Bonté. L’ordre divin inclut uniquement la justice, l’amour, la bienfaisance, le pardon, le bien. Seules les bonnes actions plaisent à Dieu. Pourquoi laisse-t-Il l’oppresseur, le criminel et le voleur accomplir leurs méfaits ? C’est parce qu’Il nous a voulu libres et que la liberté inclut nécessairement l’éventualité de l’erreur.
“En effet, Nous avons créé l'homme d'une goutte de sperme mélangée pour le mettre à l'épreuve. Nous l'avons fait entendant et voyant. Nous l'avons guidé dans le chemin. Soit il devient reconnaissant ou il devient ingrat.” Coran 76/2-3.
Notre liberté, que Dieu décrit dans ce verset, n’aurait aucun sens si nous n’avions pas le droit de faire notre propre expérience, avec deux possibilités se présentant à nous : l’erreur ou la liberté ; le péché ou l’obéissance, entre lesquels nous avons à choisir librement. Sans contrainte aucune. “Nulle contrainte en religion. Car le bon chemin se distingue de l'erreur.” *Coran 2/256. Dieu pouvait faire de nous tous des êtres excellents en nous contraignant de force à l’obéissance. Mais il devait pour ce faire nous priver de notre liberté de choix. C’est la raison pour laquelle Dieu nous laisse tirer la leçon de nos erreurs et de nos souffrances. Donc, si la vie sur cette terre est empoisonnée par la guerre, la haine, la famine, l’injustice, la tyrannie, nul autre que l’homme n’est à blâmer. “En vérité, Dieu ne fait aucun tort aux gens, mais ce sont les gens qui font du tort à eux-mêmes.” *Coran 10/4.
Le mal dans l’univers. Un regard objectif et impartial nous révèle que le bien est la base de l’existence et que le mal reste une dérogation à cet ordre. Par rapport à la santé, par exemple, que connaissent normalement les hommes, la maladie est une exception. Nous vivons la plupart des années de notre vie en bonne santé et la maladie ne nous visite que quelques jours... Les Tremblements de terre, pris globalement, représentent quelques minutes seulement dans l’âge total du globe terrestre, qui est évalué à plusieurs millions d’années. Et ainsi les volcans, ou encore les inondations, qui ne sont, dans la vie de la planète, que de courtes secousses prenant place au milieu de périodes de paix longues et durables.
Le mal dans l’univers est comme l’ombre dans un tableau. Si on l’examine de près, cette ombre est absolument indispensable et elle joue un rôle esthétique dans l’agencement total du tableau. Nous serait-il possible, sans la maladie, de savoir ce qu’est la santé ? De même, il nous serait impossible, sans la laideur, de savoir ce qu’est la beauté. Impossible de savoir ce qui est naturel sans la connaissance de ce qui est anormal.
La souffrance est un test. Les difficultés et les souffrances ont une autre fonction. Elles opèrent un tri parmi les humains pour nous révéler de quelle étoffe ils sont. La souffrance est le test nous permettant de nous connaître nous-mêmes. l’épreuve qui nous définit ce que nous valons aux yeux de Dieu. “(Dieu) c'est lui qui a créé la mort et la vie afin de vous éprouver et de savoir qui de vous est le meilleur en œuvre ...” Coran 67/2
De plus, à quoi pense notre interlocuteur, lui qui nous interroge sur un ton moqueur ? Que souhaiterait-il avoir au lieu des conditions de vie dont nous parlons ici ? Une vie d’où seraient absentes la mort, la maladie, la vieillesse, les déficiences, les incapacités ? Une vie sans restriction, sans tristesse, sans souffrances ? Exige-t-il la perfection absolue ? En fait, il n’est de perfection absolue qu’en Dieu. L’Etre Parfait et Unique...
Ma grand-mère est de loin plus intelligente que notre illustre docteur, lorsqu’elle dit tout bonnement : Le bien vient de Dieu ; le mal vient de nous-mêmes ! Ce ne sont que quelques mots, mais qui résument fidèlement toute la question...
Dieu a envoyé le vent. Il a mis en mouvement le fleuve. Mais le capitaine du bateau, avide de gain qu’il était, a surchargé son bateau de Passagers et de marchandises, le bateau a sombré et le capitaine s’est mis à maudire Dieu... Quelle est la faute de Dieu ? ... Dieu n’a agi que pour le bonheur et le bien des humains. C’est l’avidité et l’ambition démesurées qui ont changé ce bien en mal.
ANWAR (In Action/ août 1998)
L’Appel N°034 Novembre 1999
Économie & Politique
Le secteur informel
Le paysage économique de nos grandes villes se caractérise par la prédominance du secteur tertiaire, fortement dominé par le petit commerce et les activités du secteur informel. En effet, dans la plupart des grands centres urbains, cohabitent les couches moyennes des fonctionnaires, des employés du secteur privé moderne, des petits patrons du commerce et la grande majorité des couches pauvres vivant tant bien que mal du secteur informel : petits artisans, restaurateurs, cireurs de chaussures, tâcherons, vendeuses de fruits et légumes, réparateurs de cycles et de véhicules... Le secteur informel se présente de nos jours en Afrique de l’Ouest comme une voie. Porteuse d’espoir pour les populations à revenus modestes. D’où l’intérêt pour nous de jeter un regard sur ce secteur en pleine expansion. Le Bureau International du Travail (B.I.T.) a utilisé pour la première fois en 1970 le terme “secteur informel” pour désigner des activités économiques informelles. En langage courant, ce terme est utilisé pour désigner des activités non officielles, non structurées voire illégales comparativement aux autres activités qui sont régies par les codes du commerce ou des investissements. En fait, il recouvre en Afrique de multiples activités destinées à satisfaire une demande elle-même très diversifiée. Il s'agit d’activités de production ou de vente de biens et services destinées à la population urbaine : menuiserie, construction, habillement, commerce de détail, transport, réparation... Ce qui caractérise ces activités, ce sont leur petite échelle, leur faible intensité capitalistique, l’absence d’un salariat permanent ou encore le non-accès aux institutions modernes de. Crédit
La croissance du secteur informel dans la plupart des pays africains et singulièrement en Afrique de l’Ouest trouve son explication dans l’explosion urbaine ainsi que la mise en œuvre des politiques d’ajustement structurel. En effet, les mesures suivantes ont, dans le cadre de leur application, porté atteinte à la situation de l’emploi ces dernières années, quand bien même le volet social a constitué une préoccupation des gouvernants : liquidation, restructuration et privatisation d’entreprises publiques, réduction de la taille des entreprises privées pour des raisons économiques, réduction de l’offre d'emploi...
L’existence du secteur informel est donc symptomatique d'une économie formelle dont la structure et le taux de croissance ne permettent pas d’absorber la population active. D’où le retour à l’économie informelle qui joue le rôle de régulateur en matière d’emploi en répondant par une production de biens et services adaptée à la demande des couches à faibles revenus. En partie douée d’un... Pouvoir créateur, en partie parasitaire, l’articulation du secteur informel et du secteur moderne est essentielle : le second approvisionne le premier en biens d’équipements et en matières premières. En outre, avec le phénomène de l’exode rural, une partie des migrants arrivés des zones rurales se trouve confrontée à des besoins non satisfaits (alimentation, logements). Il se crée un système de logements (bidonvilles ou zones périphériques), une agriculture maraîchère, des marchés particuliers (petits marchés ou yaars) à la périphérie des villes où les activités informelles sont très florissantes.
L’apprentissage à la vie urbaine et la qualification peuvent s’effectuer par le biais du secteur artisanal ou des petites activités marchandes avant une éventuelle intégration dans l’industrie ou le commerce. C’est la raison pour laquelle certains experts en développement soulignent l’importance du secteur informel dans la création d’emplois et le considèrent comme incubateur des petites et moyennes entreprises. Dans cet ordre d’idée, le secteur informel est considéré comme une “gigantesque éponge, capable d’absorber une grande partie des chocs dus aux contractions périodiques de l’économie, en absorbant d’une part la main-d’œuvre excédentaire, et d’autre part en offrant des revenus supplémentaires à ceux dont les revenus réels se trouvent érodés par l’inflation et par la réduction des dépenses publiques”.
(1) Les principaux acteurs du secteur informel
La frange jeune de la population urbaine s’illustre de plus en plus de façon active dans les activités artisanales ou du petit commerce : tabliers, cireurs, réparateurs d’engins, vendeuses de produits agricoles ou maraîchers... Le secteur informel n'est plus seulement l’apanage de la population analphabète mais aussi des nouveaux diplômés ou des travailleurs ayant perdu leurs emplois de suite à des compressions ou de fermeture d’entreprises. La plupart des activités du secteur informel repose sur le noyau familial. Outre les membres de la famille, les apprentis... constituent l’essentiel des travailleurs de ce secteur. Il y a également lieu de relever que les agents du secteur informel ont des contacts très peu développés avec les marchés étrangers, à l’exception des activités commerciales qui s’effectuent aux frontières par le biais des commerçants ambulants. Les femmes sont les plus actives dans la plupart des secteurs informels urbains et ruraux. Au Burkina Faso, elles occupent près de 66 % de l’emploi dans ce secteur. Au Niger, près de 40 % des micro-entreprises sont gérées par des femmes. De Dakar à Abidjan, en passant par Bamako, Lomé ou Cotonou, nombreuses sont les femmes qui s’investissent dans les activités informelles en vue de répondre aux besoins de leurs familles.
Les entrepreneurs du secteur informel dépendent de multiples sources d’aide financière, allant des moyens informels comme la famille, aux plus formels et aussi moins accessibles, telles que les banques. La quasi-totalité des transactions financières du secteur informel s'effectue. avec la famille et les usuriers ainsi que les tontines. Ces dernières années, les sources traditionnelles de crédit ont été suppléées dans certaines régions par des coopératives d’épargne ainsi que des organisations non gouvernementales (ONG) offrant des microcrédits ou parfois des services d’épargne. À moyen terme, le plus grand problème est l’accès à un fonds de roulement une fois épuisées les ressources de la famille et des amis. Face à cette situation, les usuriers se sont malheureusement positionnés comme source principale de crédit pour des particuliers et les microentreprises. Les tontines constituent également une autre source de financement des opérations du secteur informel. À cheval entre le social et le financier, les tontines s'adaptent aux besoins et à l’environnement socio-économique de leurs membres. L’efficacité du système lui a valu sa vulgarisation, notamment en milieu féminin où les taux de remboursement des crédits frisent les 99%. Vu la baisse de l’offre d'emploi dans le secteur public et Privé (par rapport au nombre de demandeurs d'emploi), les activités du secteur informel sont devenues des sources d’emplois pour un nombre croissant de chômeurs. L’Afrique, et particulièrement l’Afrique de l'Ouest, ne fait pas exception. Il est donc souhaitable que la promotion des micro-entreprises occupe une place centrale dans les stratégies de développement, étant donné l’état de pauvreté qui sévit dans nos villes et campagnes. Lassné Sawadogo, Peter Roler et Leïla Webster : les secteurs informels de l'Afrique de l'Ouest : doc. préliminaire septembre 1995 P.7.
L’Appel N°034 Novembre 1999. L’Appel islamique : « Certainement, vous avez dans le messager de Dieu un exemple excellent... ” Coran 33 / 20.
Le siècle prochain, le 21e pour le christianisme et 15e pour les musulmans, posera à la Oummah islamique des défis qu’il lui faudra relever. Le plus grand de ces défis sera sans doute la formation de l’homme. Alors, de quel homme avons-nous besoin ? La meilleure des communautés. La communauté des sahabas est sans... Doute la meilleure qui soit. En effet, c'est sur elle que l’Islam naissant s’est appuyé pour se développer et gagner toutes les parties du monde. Dans un hadith bien connu, le Saint Prophète dit : “La meilleure des générations est la mienne, puis la suivante.”
En observant bien ces trois moments essentiels de l’Islam, on constate que : la première a défendu l’Islam et les musulmans contre les mécréants. Elle a en outre assis la foi dans les cœurs en ville et en campagne, si bien qu’à la mort du Prophète, trois continents sur cinq avaient reçu le message. La deuxième a continué les conquêtes islamiques et inauguré le droit musulman que la troisième a affiné.
Ceux qui ont objectivement jugé l’Islam des premiers temps ont chaque fois retenu la modicité des moyens par rapport aux résultats obtenus comme un fait exceptionnel. Cela ne s’est fait que grâce aux hommes matures et généreux façonnés à l’école du Prophète de l'Islam. Rien ne coûtait à Dieu l’Omniscient d’étendre son adoration à tous les hommes puisque, De toute façon, tout ce qui est sur terre lui est soumis de gré ou de force. Mais, si Allah a réalisé cela par l'entremise des hommes et non pas par un miracle, c’est pour que ces générations servent de référence à celles à venir. Sur les pas du Prophète (que Dieu soit satisfait de lui), Omar a pris la place qu'il quittait dans les rangs des musulmans et l’a occupée avec honneur et bravoure. “C’était un homme très au faîte de ce que les civilisations authentiques pouvaient produire”, pour reprendre les termes de Youssef Qardawi. Des Omar, le Prophète en a formé plusieurs dans son école pour accomplir les missions les plus louables. Omar a déploré l'absence de ses précieux auxiliaires durant son califat. On a retenu de lui ceci : "J’aurais aimé avoir à mes côtés des hommes de la trempe d’Abou Oubaida bin Jarrah, de Mouaz bin Jabbal, de Salim l’affranchi, d’Abou Houzaïfa pour qu’ils m’aident à hisser haut l’étendard de l’Islam.” Voilà des hommes dont nous avons besoin. Quand Khalid assiégea Al Hira et demande du renfort au calife Abou Bakr, il lui envoya un seul homme : Al Qa’qa bin Omar Tamimi. Abou Bakr écrivit là-dessus à Khalid : “Aucune armée au monde ne peut connaître la défaite si elle possède des hommes comme Al Qa’qa”. Que de choses merveilleuses serions-nous capables de faire si nous avions parmi nous de tels hommes ? À l’analyse, l’homme valeureux semble être une espèce en voie de disparition. Alors les communautés et les associations doivent s’atteler à la formation des Omar, des Abu Bakr, des Salman, etc. Le travail commence par soi-même. Chaque musulman (ou du moins beaucoup d'entre eux) doit travailler à faire vivre ce compagnon en lui. Les soufis disent en la circonstance : “Il y a un Salman en chaque homme, chacun doit travailler à atteindre le Salman de son être”. Un compagnon disait : “Je donne à mes enfants des noms de martyrs et non ceux... des Prophètes ; je sais qu'il n’y aura plus de Prophète mais il y aura toujours des martyrs et j’exprime les vœux que mes enfants puissent tomber martyrs dans le champ de l'Islam. Après s’être donné corps et âme, le responsable musulman s’adressera aux adeptes ; en effet, beaucoup de musulmans attendent la venue d’un réformateur miraculeux pour s’engager dans le travail islamique. Et ce parce que le Prophète a dit : "À la tête de chaque siècle, Dieu envoie à cette Umma quelqu’un pour lui renouveler sa religion" (Abou Daoud). Chacun au sein de la petite communauté musulmane de sa localité participera à cette réforme. La revivification et le renouvellement de notre état ne peuvent se faire sans notre participation car “Dieu ne change pas l’état d’un peuple tant que celui-ci ne change pas ce qu’il a en lui-même” (Coran 08 / 13). Ainsi, aussi longtemps que nous n’aurons pas formé des hommes valeureux, nous serons à la traîne, dussions-nous nous doter des machines les plus sophistiquées. L’homme valeureux qui vit l'Islam et pour l’islam n’est pas sur Internet ou sur le marché de la mondialisation. Il est à l’école de la foi. Qu’Allah nous guide !
Jabir
Notre besoin impérieux d’hommes valeureux. Souffrons-nous d’une pénurie d'hommes ? La Oummah compte presque un milliard et demi d’hommes contre 6 milliards sur le globe entier. Mais tous ces hommes qui disent appartenir à l’Islam ne pèsent pas par leur action louable, mais seulement par leur nombre. Notre cas n’est pas spécifique. Observateur perspicace et fin connaisseur d’hommes, le Messager de Dieu avait dit : "Les hommes sont comme les chameaux ; il se peut que vous ne trouviez pas une seule monture convenable parmi une centaine” (Hadith rapporté par Mouslime et Boukhari). Lui-même a été confronté à ce problème d’hommes. Il a eu besoin à un certain moment d’hommes ayant des qualifications, des habiletés ou même une renommée que les honorables premiers convertis (de la meilleure des communautés humaines) n’avaient pas. C’est là qu'il s’était adressé à Dieu en ces termes : "Ô Allah ! Renforce l’Islam par celui que Tu aimes parmi ces deux hommes : Abou Jahl (c'est-à-dire Amr bin Hakam) ou Omar Ben Khattab" (Rapporté par Tirmizhi et Ahmed). Il a plu à Dieu de fortifier l’Islam et les rangs des musulmans par l’intermédiaire d’Omar.
La déshydratation, c’est la perte d’eau du corps au cours d’une maladie. Elle constitue une urgence thérapeutique car elle peut provoquer un collapsus cardio-vasculaire (crise cardiaque). La diarrhée et les vomissements constituent 90% des causes de déshydratation, les 10% étant constitués par des problèmes rénaux (insuffisance rénale, diabète...), les coups de chaleur, les brûlures étendues...
Un enfant déshydraté peut présenter plusieurs signes dont notamment :
- Une fatigue
- Les yeux enfoncés
- Une soif intense
- Une somnolence
- Une fièvre...
Au vu de ces signes, il convient de rejoindre la formation sanitaire la plus proche pour ne pas mettre la vie de l’enfant en danger. Il faut surtout éviter de paniquer, car une prise en charge rapide de l’enfant par... Les services sanitaires peuvent lui permettre de retrouver sa santé. Le Prophète (SAW) a dit : “Le meilleur dinar que l’homme dépense est celui qu’il dépense pour sa famille” (Mouslim). Cette dépense est d’autant meilleure quand elle est destinée à sauver une vie humaine et surtout celle d’un enfant. “Traitez vos enfants avec égard car ils sont des dons qui vous sont offerts”, a dit le Prophète de l’Islam.
L’Appel N° 034 Novembre 1999
DISTRAYEZ-VOUS ET JOUEZ. JE DÉTESTE QUAND ON DISQUE VOTRE RELIGION EST RIGIDE (HADITH)
JEU CONCOURS SPÉCIAL AN 5 DE L’APPEL 01 BP 5716 Ouagadougou 01 — E-mail : lappel@caramail.com
1. Donnez :
a - La date de création de l’APPEL et précisez le mois de parution du N° 00
b - Le nombre d'exemplaires tirés à chaque parution
c - Le nombre de numéros parus jusqu’en novembre 1999
2. Donnez :
a - La période de parution de l’APPEL sous la forme bimestrielle.
b - Combien de numéros sont parus sous cette périodicité ?
c - Quel numéro porte la troisième ? Parution du mensuel ? Précisez aussi le mois ?
3. “Prostitution, grande perversion, graves péchés”, c’était le titre de l’un des articles de l’APPEL. Dites dans quel numéro cet article est paru et qui en était l’auteur ?
4. Donnez le titre du dernier dossier de l’APPEL. Précisez le numéro dans lequel ce dossier est paru.
5. Dans combien de numéros l’APPEL a-t-il traité de la question de l’organisation du HADJ au Burkina ? Précisez ces numéros.
Règlement du jeu - Faites parvenir sous plis fermés vos réponses avant le 30 novembre 1999, le cachet de la poste faisant foi ou par e-mail. - Les plis peuvent être directement reçus au siège de l’APPEL à Ouagadougou. - Pour départager les candidats ex-aequo, il sera tenu compte de la date à laquelle les lettres ont été expédiées. - Ne peuvent prendre part au jeu, les membres de l'équipe de la rédaction, de même que le personnel administratif de l’APPEL. - 5 prix seront en tous décernés : • 1er prix : 2 ans d’abonnement (24 mois) • 2e prix : 1 an et demi d’abonnement. (18 mois) • 3e prix : 1 an d’abonnement (12 mois) • 4e prix : 6 mois d’abonnement • 5e prix : les deux derniers numéros pour 15 lauréats classés par ordre de mérite.
La Direction de publication COMMUNIQUE
La Mutuelle Baïtoul Maal a le plaisir de porter à la connaissance de ses membres le démarrage effectif des opérations de virement de salaires commencées depuis le 1er octobre 1999. À cet effet, elle invite tous les membres désirant effectuer le virement de leur salaire à déposer auprès de ses services les pièces ci-dessous :
- Une demande de virement adressée à leur employeur
- Une autorisation de virement fournie par la Mutuelle
- L’identité du mandataire autorisé à effectuer les retraits en cas d’empêchement
Le dépôt du dossier donne lieu au paiement d’une somme forfaitaire de 500 F CFA.
NB : Pour les agents de l’administration publique, les demandes doivent être revêtues d’un timbre fiscal de 200 F CFA et adressées à Mme la directrice de la solde et de l’ordonnancement.
Le président du Conseil d’Administration Dr Salif SAWADOGO
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L’Appel N°034
Novembre 1999
Part of L'Appel #34