o:id 29449 url https://islam.zmo.de/s/westafrica/item/29449 o:resource_template Newspaper article o:resource_class bibo:Article dcterms:title Algérie/pouvoir et FIS : radiographie d'une fracture sociale dcterms:creator https://islam.zmo.de/s/westafrica/item/27711 dcterms:publisher https://islam.zmo.de/s/westafrica/item-set/5499 dcterms:contributor https://islam.zmo.de/s/westafrica/item/858 dcterms:date 1995-07-28 dcterms:identifier iwac-article-0006358 dcterms:rights In Copyright - Educational Use Permitted dcterms:abstract La pacification de l’Algérie n’est peut-être pas pour demain. Les récentes négociations secrètes dans ce sens entre le pouvoir et le Front Islamique du Salut (FIS-dissous) ont encore échoué le 10 juillet dernier. Ainsi, comme lors des discussions d’octobre 1994, les responsables du FIS exigent d'être libérés sans condition avant d’appeler leurs groupes armés à cesser le « djihad » (guerre sainte). Ce deuxième échec consommé du dialogue entre la présidence algérienne et les islamistes augure de nouveaux bains de sang. Pour l’heure, le bilan est déjà lourd : au moins trente mille (30.000) morts depuis janvier 1992. Comment l'Algérie est-elle en fait arrivée à cet état de guerre civile larvée qui, depuis trois ans, déchire le tissu social du pays ? dcterms:spatial https://islam.zmo.de/s/westafrica/item/312 bibo:content La pacification de l’Algérie n’est peut-être pas pour demain. Les récentes négociations secrètes dans ce sens entre le pouvoir et le Front Islamique du Salut (FIS-dissous) ont encore échoué le 10 juillet dernier. Ainsi, comme lors des discussions d’octobre 1994, les responsables du FIS exigent d'être libérés sans condition avant d’appeler leurs groupes armés à cesser le « djihad » (guerre sainte). Ce deuxième échec consommé du dialogue entre la présidence algérienne et les islamistes augure de nouveaux bains de sang. Pour l’heure, le bilan est déjà lourd : au moins trente mille (30.000) morts depuis janvier 1992. Comment l'Algérie est-elle en fait arrivée à cet état de guerre civile larvée qui, depuis trois ans, déchire le tissu social du pays ? La situation de semi-guerre civile qui est aujourd'hui celle de l’Algérie se comprend un peu si l’on inclut dans les références de l'analyse, trois paramètres. Il y a le contexte socio-économique et politique de la création du FIS : la démission du président Chadli Bendjedid et l’arrêt du processus électoral. D’abord, les circonstances de la légalisation du FIS. Du 4 au 9 octobre 1988, en effet, Alger fut secouée par des troubles meurtriers. Plusieurs quartiers de la capitale sont à feu et à sang. Des sources médicales indiquent que le bilan des affrontements entre émeutiers et forces de l’ordre est de cinq à six cents morts. Les observateurs et autres spécialistes de l’Algérie ont dès lors vu en ces troubles et violences, l’expression d’un mal-vivre socio-politique qui couvait depuis des années. En 1982 déjà, Albert-Paul Lentin dans un dossier de Médias France Intercontinents (MFI) attirait l’attention sur la disproportion qu’il y a entre les infrastructures socio-économiques du pays et l'accroissement galopant de la population. Le taux d'accroissement naturel était alors de 3.4 % d’une année à l’autre. Ainsi, de onze (11) millions à l'indépendance en 1962, la population algérienne est passée à vingt (20) millions en 1982. Elle tend aujourd’hui vers les trente (30) millions d’habitants. Or, pour cette année 1982, on a estimé à 1.5 million, le manque de logements. Les possibilités de financement de l’habitat sont, elles, plafonnées à 10.7 milliards de dinars, soit moins de la moitié de la somme nécessaire aux cent mille (100.000) logements annuels promis par le gouvernement. A ce problème du logement, s’ajoutent le chômage et l’exode rural des jeunes. Et les politologues algériens de conclure que l’explosion sociale d’octobre 1988 est la traduction spontanée et violente d’un mal-vivre socio-économique des jeunes. Et, de fait, les vingt-six (26) ans d’alors du pouvoir sans partage du Front de Libération Nationale (FLN), ont fini par creuser un fossé entre les couches sociales algériennes. D’un côté, la masse des frustrés et, de l’autre, la bourgeoisie bureaucratique. Le pouvoir FLN se devait donc d’ouvrir la vie politique à d'autres partis. C’est chose faite quatre mois après les émeutes d’Alger. Le 23 février 1989, en effet, Algériennes et Algériens ont adopté, par référendum, une nouvelle constitution qui ouvre la voie au pluralisme politique. Vingt-sept (27) partis ont ainsi été légalisés, dont le FIS, le 14 septembre 1989. TOUS AUX URNES Le FIS est pris au départ pour un courant marginal et négligeable, à la périphérie de la société algérienne. Mais les élections locales du 12 juin 1990 et le premier tour des législatives du 26 décembre 1991 ont révélé que le FIS est en fait un parti des exclus du pouvoir FLN. Il est, de ce fait, un véritable creuset du mécontentement populaire. Conséquence : aux communales du 12 juin 1990, le FIS a gagné huit cent cinquante-trois (853) mairies sur mille cinq cent quarante et un (1541). Soit une majorité absolue de 55 %. Aux législatives du 26 décembre 1991, le parti d’Abassi Madani remporte, dès le premier tour, cent quatre vingt-huit (188) sièges sur un total de deux cent trente et un (231). Vote-sanction ? C'est en tout cas l'avis de Khalil qui habile El Biar, l’une des banlieues populaires d’Alger. « C'était un peu explique-t-il, comme une façon de se venger. Les gens en avaient tellement marre, qu'ils étaient prêts à suivre n'importe quel mouvement d'opposition. On avait la possibilité de virer ces gens qui magouillent sur notre dos depuis des années. On a sauté dessus ». (Monde Diplomatique de juin 1990 page 06). HALTE FIS Le FIS s'achemine donc vers des victoires finales législatives et, à coup sûr, présidentielle. Dès lors, la menace d’une République islamique plane sur l’Algérie. Abassi Madani et Ali Belhadj, les deux principaux leaders du FIS, n'ont cessé de le clamer haut et fort lors des campagnes électorales. Puis, tout d’un coup, un vide constitutionnel est créé. Le président Chadli Bendjedid démissionne de la présidence de la République. C’était le 11 janvier 1992. Le 14 janvier, le Conseil constitutionnel constate la vacance du pouvoir exécutif. Le pouvoir est alors confié à un Haut Comité d’Etat (HCE) dirigé par Mohammed Boudiaf. Le HCE est une présidence collégiale. Il comprend des membres de l’armée et du pouvoir judiciaire. Dès son entrée en fonction, le HCE fait suspendre la poursuite du second tour des législatives. Il dissout ensuite le FIS et ses principaux dirigeants. Abassi Madani et Ali Belhadj, sont mis en prison en juin 1991. Acculé, décapite et banni, le FIS opte pour la lutte armée. D’où les affrontements, les massacres ou tueries qui, depuis janvier 1992, ont fait au moins trente mille morts. LES FORCES EN PRESENCE Du côté du pouvoir, ce sont environ cent vingt mille (120.000) hommes qui sont mobilisés pour contrer les assauts des islamistes armés. Les forces de police agissent dans les zones urbaines. Les unités de la gendarmerie et de l’armée opèrent dans les zones rurales et sur les massifs montagneux. Les islamistes, quant à eux, disposent de plus de six cent cinquante (650) groupes armés disséminés dans loin le pays les plus connus sont le Mouvement Islamique Armé (MIA) et le Groupe Islamique Armé (GIA). Il s’y ajoute l’Armée Islamique du Salut (AIS). Il y a une différence de principe et de finalité entre ces trois groupes armés. L'AIS est une organisation militaire clandestine du FIS. Le GIA et le MIA ne reconnaissent pas, eux, d’autorité aux présidents-fondateurs du FIS : Abassi Madani et Ali Belhadj. Ils se posent même en rivaux de l'AIS en ce sens qu’ils sont des partisans de la lutte armée jusqu’à la victoire finale (destruction totale du pouvoir en place) ! Le GIA et le MIA disposent, pour ce faire, des effectifs compris entre dix (10) et quinze (15) mille hommes. Il s'agit là des estimations qui datent de décembre 1994, de diplomates occidentaux en poste à Alger. Des points lient cependant les groupes islamistes armés : tous recrutent chez les jeunes sans emploi. On trouve également, dans leurs rangs, des militaires déserteurs et d’anciens membres de la police cl de la gendarmerie. Ces groupes bénéficient, enfin, de complicités au sein de l’armée, la police, la société civile et de l’administration. Moralité : les islamistes disposent d’un potentiel humain fondu dans la population. Extrêmement mobile, ce potentiel frappe l’adversaire par surprise. D'où les difficultés de l’armée et de la police algériennes à anéantir les guérilleros islamistes. LES CIBLES Les bandes islamistes armées contrôlent de vastes régions rurales et des quartiers entiers des villes de Blida, Bachdjarah, Ddidjelli, Médéa... Militaires et forces de l’ordre organisent des ralles cl des bombardements aériens localisés pour reprendre aux islamistes armés ces villes et régions sous leur contrôle. Mais la principale cible du drame algérien reste la population civile. Sont ainsi tués, les journalistes, les intellectuels et artistes engagés contre le radicalisme religieux. Les personnalités politiques, les cadres de l'administration, les employés de préfecture... ne sont pas épargnés. Il s’y ajoutent, les femmes et jeunes filles qui enfreignent les normes vestimentaires de l’Islam. Il y a, enfin, les étrangers dont les meurtres visent à obtenir l’isolement d’Alger sur le plan international. Car les islamistes sont, à tort ou à raison, convaincus du soutien militaire et financier que certains pays occidentaux apportent au pouvoir algérien. LA PAIX CIVILE: POUR QUAND? Du 8 au 13 janvier 1995, l’Association catholique Saint’Egidio réussit à réunir à Rome (Italie), les principaux partenaires de la crise algérienne. Il en est sorti un document intitulé « Plate-forme de Rome portant contrat national ». Ce document, signé par toutes les parties prenantes dont le FIS, définissait, entre autres, les conditions du retour à la paix civile. Il s'agit, notamment de la libération effective des responsables du FIS et de tous les détenus politiques ; de l’appel du FIS à l'arrêt des hostilités ; du retour à la souveraineté populaire et à la légalité constitutionnelle. Vaine tentative. Car le GIA a sévèrement condamné la plate-forme de Rome et réaffirmé son option pour la lutte armée généralisée jusqu’à la victoire finale. Au cœur même du pouvoir, une partie de la hiérarchie militaire ne croit qu’à la victoire des armes. C'est le cas du chef d'Etat-major des armées, le général Lamari. Ces extrémismes de tous bords auront-ils raison de la voie de la conciliation du dialogue politique ou du compromis ? La charge au temps ou à l'histoire de répondre. bibo:numPages 1 bibo:pages IV --