Article
"Les madrassa ne sont pas des écoles coraniques" (selon Mahamadi Kaboré)
- en
- fr
- Hierarchies
-
Burkina Faso
- Articles de journaux (3615 items)
- Burkina 24 (279 items)
- Carrefour africain (33 items)
- FasoZine (116 items)
- L'Evénement (45 items)
- L'Observateur (61 items)
- L'Observateur Paalga (509 items)
- La Preuve (28 items)
- Le Pays (709 items)
- LeFaso.net (709 items)
- Mutations (13 items)
- San Finna (9 items)
- Sidwaya (1104 items)
- Publications islamiques (432 items)
- Al Mawadda (11 items)
- An-Nasr Trimestriel (16 items)
- An-Nasr Vendredi (318 items)
- L'Appel (48 items)
- L'Autre Regard (11 items)
- Le CERFIste (13 items)
- Le vrai visage de l'islam (15 items)
- Documents divers (Burkina Faso) (16 items)
- Photographies (Burkina Faso) (9 items)
- Références (Burkina Faso) (297 items)
- Articles de journaux (3615 items)
- Title
- "Les madrassa ne sont pas des écoles coraniques" (selon Mahamadi Kaboré)
- Publisher
- L'Observateur Paalga
- Date
- February 5, 1996
- Abstract
- Il s'appelle Mahamadi Kaboré. Quarante quatre ans bien sonnés, l'homme a vu le jour à Nioniongo dans l'Oubritenga. Ce musulman pratiquant habite le secteur 23 de Ouagadougou. Depuis une vingtaine d'années, il dirige des écoles madrassa aussi bien au Burkina Faso qu'en Côte d'Ivoire.
- Spatial Coverage
- Ouagadougou
- Language
- Français
- Contributor
- Frédérick Madore
- Identifier
- iwac-article-0003803
- content
-
Il s'appelle Mahamadi Kaboré. Quarante quatre ans bien sonnés, l'homme a vu le jour à Nioniongo dans l'Oubritenga. Ce musulman pratiquant habite le secteur 23 de Ouagadougou. Depuis une vingtaine d'années, il dirige des écoles madrassa aussi bien au Burkina Faso qu'en Côte d'Ivoire.
Très sympathique et jovial, Mahamadi Kaboré se veut un musulman "moderne". Pour lui, il ne doit pas avoir de barrière entre les croyants qu'ils soient musulmans, chrétiens ou d'autres confessions. Par ailleurs, il aime à affirmer qu'en Dieu se trouve la solution à nos problèmes. Ainsi il effectuerait des sorties avec ses élèves en n'emportant que quelques litres d'eau et un peu de nourriture. Au moment où les élèves se demandent comment trouver à boire et à manger, les récipients se rempliraient mystérieusement; Et cela après que leur maître eut invoqué Dieu.
En ce mois de jeûne, nous avons rencontré cet homme très affable, d'une culture insoupçonnée. Il nous a entretenus de nombre de choses. Des madrassa bien sûr, mais aussi des guerisseurs, de la femme musulmane, des jeux de hasard qui seraient prohibés en islam.
Voudriez-vous nous dire deux mots sur le madrassa ?
Le madrassa est une école d'enseignement général. Il existait 4800 ans avant le Coran. Lorsque le Prophète Mahomet est venu, ce sont les élèves de madrassa qui ont écrit le Coran. L'initiateur du madrassa est le Prophète Idrissa, 3e envoyé de Dieu. Il ne faudrait donc pas confondre le madrassa et l'école coranique.
Nous enseignons certes le Coran mais nous donnons aussi un enseignement général et des enseignements pratiques. Bref, quelques éléments pour mieux vivre en société.
Je profite de l'occasion pour vous dire que l'école n'est pas interdite en islam comme d'aucuns le pensent. Le Prophète n'a jamais dit qu'il ne faut enseigner que l'arabe. Lui-même a fait enseigner 50 personnes en plusieurs langues. Parmi les 50, il a fait un test et a sélectionné 15 personnes. C'est dans ce dernier lot qu'il a désigné Ali comme premier secrétaire dans l'organisation islamique. Par ailleurs si nous ne nous entendons pas toujours c'est parce que la majorité de notre population est analphabète. Le déficit de communication entraîne souvent des conflits.
Quels ont été les débuts de votre école ?
A dire vrai, nos débuts étaient très difficiles. Nous avons commencé les cours gratuitement. Nous organisons aussi du théâtre et divers jeux à l'intention des enfants. Beaucoup ont alors commencé à s'y intéresser.
Mais tout de suite les parents ont opposé une réticence Dès les premiers moments lorsque nous louions une maison dans un secteur pour nous installer, on nous chassait au bout d'une année. Sous prétexte que le madrassa détruit le pays. Après moult difficultés, nous nous sommes définitivement installés à Nonsin.
Je peux dire aujourd'hui (après 21 ans de travail) que je suis satisfait. Les gens ont fini par comprendre la philosophie des établissements madrassa. Nous avons 14 écoles en provinces et deux à Ouagadougou respectivement au secteur 19 et au secteur 23. En Côte d'Ivoire, on en a deux également, à Daloa et à Port-Bouet. L'année dernière, nous avions un effectif de 4348 élèves. Nous avons des élèves qui ont fait leurs débuts chez nous et continuent leurs études au lycée Zinda, au Marien N'Gouabi et au Song-Taaba.
Il paraît que certains musulmans soutiennent qu'il est satanique de faire du théâtre, du sport... Qu'en pensez-vous ?
Dans mes écoles, on pratique du sport et on fait du théâtre aussi. Le Prophète a conseillé la pratique du sport. C'est ainsi que sa femme Asséta et lui faisaient du marathon. Nous faisons du théâtre pour éduquer les gens. Dieu nous a donné le corps, c'est à nous de bien l'entretenir.
Il y a une opinion selon laquelle un neveu du Prophète a été trahi et par la suite décapité. Selon cette tendance le ballon rappelle la tête tranchée du neveu du Prophète. Et par conséquent ce jeu devrait être interdit pour tout bon musulman. Mais pour nous, cela ne tient pas la route.
De toutes les façons, le prophète avant de mourir a dit : <<après tout ce que je vous ai enseignés, si vous voyez quelque chose qui peut faire du bien à notre religion, faites-le. Tout ce qui peut nuire à la religion, abandonnez-le même si je l'ai enseigné». C'est ainsi par exemple que la peine de mort par suite de flagrant délit d'adultère a été supprimée. Le voleur pris en flagrant délit devrait se voir couper le bras. Ce sont des recommandations qui. aujourd'hui ne sont plus mises en application.
Que pensez-vous de l'effervescence ces derniers temps des guérisseurs qui sont pour la plupart des musulmans?
Ce n'est pas un phénomène nouveau. Si on remonte un peu dans le passé, on s'aperçoit que des guérisseurs sont apparus au Mali, au Sénégal... Dieu lui-même a dit qu'il ne cessera jamais d'aider ceux qui croient en lui. Même le docteur qui soigne les gens, c'est Dieu qui guérit et non les produits et la séringue. Par ailleurs, Dieu donne sa grâce à ceux qui croient en lui.
Pour ma part, il y a lieu de rendre grâce à lui plutôt que d'affirmer que c'est la puissance de satan. Au dernier jugement, Dieu ne fera pas de différence entre musulmans, chrétiens, animistes, noirs ou blancs...
Certaines personnes soutiennent que l'épouse du bon musulman doit rester à la maison, cloitrée entre ses quatre mur pour ne pas dire voilée. Qu'en epensez-vous ?
La religion n'a toujours fait que recommander le bien et condamner le mal. Dieu veut que chacun travaille afin d'être saint et honnête. Mais vous savez qu'en dehors de la religion, il y a des gens qui ne veulent pas que leur femme sorte
Encore moins partir pour un quelconque travail. Celui qui n'a pas les moyens ne doit pas empêcher sa femme de travailler. La première femme du prophète Mahomet était une commerçante. Elle employait des hommes pour acheter des marchandises. Le prophète même était un de ses employés avant qu'ils ne se marient. On raconte que 50 jours après la mort de la femme, le prophète a quitté la Mecque.
La femme peut travailler et même employer son mari. Dans mes écoles, il y a aussi bien des hommes et des femmes qui enseignent
En Islam, est-il permis de se livrer aux jeux de hasard?
C'est l'escroquerie que Dieu n'aime pas. Dès lors que l'on sait qu'en offrant 25 F à quelqu'un, on espère 50 F, ce n'est pas normal. Autrement, il n'a pas été dit en islam que les jeux de hasard sont prohibés.
Le mot de la fin
Je remercie l'Observateur paalga de m'avoir permis de m'exprimer. Je voudrais lancer un appel à tous les croyants, musulmans comme chrétiens. Je les invite à s'unir car Dieu n'a jamais divisé son peuple. Enfin, je prie Dieu afin qu'il préserve la paix sociale au Burkina Faso.
Propos recueillis par
Simon Yaméogo
Emmanuel llboudo