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Point de vue. Hadj'96 : à monsieur Sidibé
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- Title
- Point de vue. Hadj'96 : à monsieur Sidibé
- Creator
- Abdoulaye Dermé
- Publisher
- L'Observateur Paalga
- Date
- July 8, 1996
- Abstract
-
Monsieur Sidibé,
J'ai lu avec intérêt votre écrit paru dans les colonnes de L'Observateur paalga n°4191 du 2 juillet 1996. D'entré de jeu, je vous dis que vous êtes un mauvais avocat, et pire, un mauvais conseiller. - Language
- Français
- Contributor
- Frédérick Madore
- Identifier
- iwac-article-0003797
- content
-
Monsieur Sidibé,
J'ai lu avec intérêt votre écrit paru dans les colonnes de L'Observateur paalga n°4191 du 2 juillet 1996. D'entré de jeu, je vous dis que vous êtes un mauvais avocat, et pire, un mauvais conseiller.
En effet, votre argumentation, loin de convaincre, vous compromet plutôt dangereusement. Je vous rappelle que le Hadj, un des piliers de l'islam ne date pas de 1996. Déjà, il y a 50 ans, les premiers pèlerins voltaïques allaient à la Mecque à pieds. Le voyage pouvait prendre une durée de trois ans avant d'atteindre les lieux saints - Le pays de Mahomet, source de lumière. L'itinéraire était le suivant: on passait par la Gold Coast (aujourd'hui Ghana), le Nigéria, le Cameroun, le Tchad et on atteignait enfin Khartoum (Soudan anglo égyptien). On était alors aux portes de la Mecque.
Pendant ce parcours, le candidat au paradis mendiait, travaillait, subissait toutes les épreuves de difficultés qui peuvent exister sur cette terre. Il risquait sa vie. Mais il ne se décourageait pas; son seul but étant de voir la Kass ba de ses propres yeux, avant de mourir un jour. Le voyage était si hasardeux et le retour incertain que les partants pour la Mecque de l'époque faisaient leur testament à leur famille avant de prendre la route. Ils distribuaient même leurs biens...
Dans ces mêmes années, on pouvait accéder en Arabie Saoudite par voie de mer également. Là, on prenait un bateau généralement au Nigéria pour port Soudan ou Djeddah. Le coût du transport n'était pas à la portée des bourses. Le retour de ces pèlerins une fois devenus hadj était encore plus pénible qu'à aller.
En effet, sur la route du retour, surtout entre le Soudan et le Tchad, il y avait des pillards qui décimaient les caravanes. C'est pourquoi les pèlerins africains préféraient rester et élire terre d'asile à Karthoum au Soudan où la communauté burkinabè est importante actuellement.
Monsieur Sidibé, vous voyez que les souffrances ne sont pas les mêmes. Je veux parler de celles auxquelles vous faites allusion dans votre écrit à dessein, afin de sensibiliser les lecteurs et de justifier la création de la commission de pèlerinage. Et puis, il y a une différence entre trois années de marche à pied et 5 heures de vol dans un Airbus climatisé qui atterrit à Djeddah d'où chaque jour vous pouvez téléphoner à Ouagadougou dans votre famille...
Disons en revenant à ce fameux Hadj'96 qui a fait couler beaucoup d'encre (la preuve) ce que je pense.
Sur un rapport accablant de notre ambassade à Riad concernant les pèlerinages passés, mettant en relief la situation inconfortable de nos pèlerins à la Mecque (souffrances, exploitations, etc.), l'Etat burkinabè a voulu réagir en leur faveur dorénavant. Il a alors créé la commission nationale d'organisation du hadj. Ce qui est louable. De bonne foi, l'Etat s'est impliqué à 100% pour l'opéraiton Hadj'96 (encaissement du prix de transport, organisation dans les provinces, problèmes de pécule, organisation d'accueil sur place à Djeddah, etc.) Bref, une réelle volonté d'un Etat qui cherche à veiller sur les intérêts de ses ressortissants. Seulement, ce que l'Etat n'a pas prévu est que le Hadj est une gigantesque organisation à vocation mondiale où pas même les Saoudiens ne peuvent maîtriser toutes les situations.
Il y a des gens qui vont à la Mecque pour l'islam, et il y en a qui y vont pour leurs affaires... Peut-on contrôler aisément deux à trois millions de personnes pendant un mois et leur permettre de jouir de toutes les commodités? C'est vraiment difficile!
Contrairement à vous, monsieur Sidibé, je pense que l'Etat devrait laisser l'organisation des pèlerinages (Hadj, Lourdes, Rome, Yamoussoukro, Tinsé et Tinkouga, etc.) à la charge de leurs communautés. Il interviendra néanmoins pour les formalités d'usage comme les passeports, les certificats de vaccination, la sécurité. Nos ambassades s'occuperaient comme elles l'ont du reste toujours fait des formalités d'accueil des pèlerins. L'Etat peut alors leur donner des moyens exceptionnels à ce moment pour mener à bon terme leur mission.
Monsieur Sidibé, dans vos déclarations fracassantes vous prenez certains risques. Notamment vous affirmez: “Combien de ministres des Affaires étrangères, de l'Intérieur ou de l'Administration territoriale, le Burkina Faso et l'ex-Haute-Volta ont-ils connus depuis l'indépendance jusqu'à ce jour qui se soient préoccupés des calvaires vécus, annuellement, des décennies durant, par nos pèlerins?".
Vous voyez les risques que vous prenez sans savoir ce qui a été fait il y a déjà vingt ans pour nos pèlerins. A titre d'exemple, déjà dans les années 1970-1972, chaque année, le ministère des Affaires étrangères envoyait à Karthoum, au Soudan, un fonctionnaire de cette institution. Il était chargé d'établir pour les Voltaïques sur place des passeports afin de leur permettre d'accomplir leur Hadj à la Mecque. Il y a eu d'autres initiatives en faveur des pèlerins de notre pays. Encore une fois je vous rappelle que le pèlerinage à la Mecque ne date pas de 1996.
Pour moi, en ce qui concerne principalement le Hadj après plusieurs décennies d'existence, la Communauté musulmane du Burkina Faso devrait être à la hauteur d'une bonne organisation avec le concours de l'Etat.
Enfin, monsieur Sidibé, dans votre écrit vous avez interpellé la conscience du chef de l'Etat. Ici, ce n'était vraiment pas nécessaire de le faire. Tout le monde sait ce que le président fait en bien pour toutes les communautés religieuses de ce pays, sans distinction d'ailleurs. Le principal est que l'Etat ne permette pas à ce qu'on pense qu'il cherche à jouir d'intérêts quelconques et divers parce qu'avant tout, il est et doit demeurer laïque.
Fraternelles salutations.
Dermé Abdoulaye
Secteur 12
BP 410 Ouagadougou