Article
Quand les gardiens de la case des fétiches devenus musulmans veulent se manger
- Resource class
- Article
- Item sets
- L'Observateur Paalga
- Title
- Quand les gardiens de la case des fétiches devenus musulmans veulent se manger
- Creator
- Lassina Simporé
- Publisher
- L'Observateur Paalga
- Date
- September 30, 1994
- Abstract
-
La presse a fait état ces derniers temps, d'échauffourées qui auraient opposé des fidèles musulmans du secteur 29. Des musulmans déchaînés, titrait à la une notre confrère Le Journal du Soir dans sa livraison du 22 septembre, auquel renchérissait cinq jours plus tard Sidwaya qui livrait à la une : Chaudes empoignades autour d'une mosquée.
Ce secteur aujourd'hui cosmopolite où se côtoient tant d'ethnies et de confessions étaient jadis le noyau dur des grands conservateurs des fétiches royaux : Dagnoen. C'est du moins ce que nous apprend Lassina Simporé qui s'est rendu sur les lieux et qui y en a tiré la matière de notre chronique de ce jour. - Language
- Français
- Contributor
- Frédérick Madore
- Identifier
- iwac-article-0003784
- content
-
La presse a fait état ces derniers temps, d'échauffourées qui auraient opposé des fidèles musulmans du secteur 29. Des musulmans déchaînés, titrait à la une notre confrère Le Journal du Soir dans sa livraison du 22 septembre, auquel renchérissait cinq jours plus tard Sidwaya qui livrait à la une : Chaudes empoignades autour d'une mosquée.
Ce secteur aujourd'hui cosmopolite où se côtoient tant d'ethnies et de confessions étaient jadis le noyau dur des grands conservateurs des fétiches royaux : Dagnoen. C'est du moins ce que nous apprend Lassina Simporé qui s'est rendu sur les lieux et qui y en a tiré la matière de notre chronique de ce jour.
Il figure parmi les nombreuses cases du palais du Moog-naaba, une spécialement réservée aux fétiches. L'entrée de cette case est interdite à tout le monde sauf au Moog-naaba, au Balem-naaba le chef des serviteurs et maire du palais et à la pug-Kiêma, la femme ainée. Un veilleur était placé devant cette case pour dissuader ceux-là qui voudraient voir l'intérieur de la case.
On l'appellait Rag-noore naaba ou Ragnôe naaba. Ce vigile était responsable de tout vol ou toute destruction des fétiches par qui que ce soit.
Le Ragnôe-naaba a formé avec sa suite, tous des nakombse, le quartier Ragnôe. Ce quartier fait aujourd'hui partie du secteur n° 29. Le quartier Ragnôe originel est donc le quartier des gardiens des fétiches du palais du moog-naaba.
Le très petit Ragnôe de l'époque est présentement un grand quartier peuplé d'habitants d'origines et de religions différentes.
Mais présentement, rien ne va plus entre certains habitants de Ragnôe; notamment entre les wahabia ou sunnites et les autres musulmans. Ils se sont même copieusement battus plusieurs fois à coups de machette et de gourdin. La dernière bagarre a eu lieu le 18 de ce mois de septembre. Grièvement blessé, un nommé Marcel Kaboré (1) n'a toujours pas quitté l'hôpital. Actuellement, neuf personnes du côté des non-wahabia sont déclarées Wanted (Pas morts ou vifs mais morts) par les wahabia. Ce sont les nommés Kaboré Marcel, Nianda Mahama, Ouédraogo Ali (Ali PDG), El Hadj Tiemtoré Abdramane, El Hadj Ouédraogo Tasséré, Dèra Harouna, Issaka, Moussa Raado et Abdou.
Il était un devoir pour l'Observateur de rechercher pour ses lecteurs les causes des échauffourées. Aussi avons-nous rencontré une des parties en conflit. Il s'agit du groupe des non-wahabia. 11 va sans dire que nous approcherons les autres parties prenantes.
Le groupe que nous avons rencontré a accepté de faire l'histoire de la place où la mosquée a été construite et sa version des causes du conflit.
Pour le vieux Tapsoba Rasmané (86 ans), un des tout premiers musulmans de Ragnôe, la mosquée se trouve sur le champ de El Hadj Abdoulaye Ouédraogo, père cadet de l'avant dernier chef du quartier qui s'appelait naaba-Peogo. C'est El Hadj Abdoulaye Ouédraogo qui avait voulu qu'il en soit ainsi bien avant le lotissement du quartier. Certains témoins du don du champ aux musulmans sont toujours vivants: ce sont El Hadj Tapsoba Rasmané, El Hadj Compaoré Issaka, El Hadj Soulga Ibrahim et El Hadj Ouédraogo Abdoulaye lui-même. Seul naaba Peogo n'est plus.
C'est dire donc, d'après le vieux Rasmané, qu'aucun des meneurs wahabia, notamment Hamidou Zangré, n'était présent au moment où l'on cherchait le terrain pour construire la mosquée du quartier. Autrement dit, ils sont les premiers à occuper le site de la mosquée.
Toujours selon le groupe que nous avons rencontré, c'est surtout à cause d'une femme qu'il y a problème à Ragnôe: Un non-wahabia (précisément le fils de El Hadj Abdoulaye Ouédraogo, celui-là même qui a donné son champ pour la construction de la mosquée) aurait été accusé d'avoir “engrosser" une fille wahabia (qui n'est autre que la sœur de la femme de Hamidou Zangré dit Hamid-galace le chef de proue des wahabia). 11 s'est avéré plus tard que l'auteur de la grossesse n'était pas le fils de El Hadji Abdoulaye Ouédraogo mais un certain Moussa qui habiterait le quartier Gounghin.
Depuis cette histoire de grossesse, El Hadj Abdoulaye Ouédraogo et Hamid-galace qui étaient très amis devinrent chien et chat. Le second qui s'est senti nargué, réussit dans un premier temps à transformer le problème de grossesse en problème religieux puis à regrouper à son compte les wahabia du quartier.
A en croire donc cette première version, ce n'est pas un problème religieux qui oppose les musulmans de Ragnôe, mais plutôt une affaire de femme; si le ridicule tuait...
La mosquée se trouve à l'Ouest de l'infirmerie centrale de la police et au Nord-Est de Naabi-yaare. Elle est relativement grande car étant bâtie sur un terrain grand comme six parcelles Jumelées.
Pour le moment c'est ce que nous savons sur la bagarre qui oppose les frères musulmans du quartier Ragnôe.
Lassina Simporé
(1) Le nommé Marcel n'est pas un musulman. S'il a pris part “aux combats" c'est parce qu'on aurait traité le moogo-naaba de grand impie. Après la fête de la Tabaski, le chef de Ragnôe avait demandé aux habitants du quartier de l'accompagner au palais du moog-naaba, pour que, comme traditionnellement, il souhaite bonne et heureuse fête au grand chef moaaga. Les wahabia auraient déclaré ceci : “Le petit animiste est allé saluer le grand animiste".
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