Article
Imam Ibrahima Cissé, secrétaire exécutif de l'Ospviaci : "Il faut restituer à l'Islam sa valeur authentique"
- Title
- Imam Ibrahima Cissé, secrétaire exécutif de l'Ospviaci : "Il faut restituer à l'Islam sa valeur authentique"
- Type
- Article de presse
- Creator
- Janvier Krognou
- Publisher
-
Le Jour Plus
- Date
- October 22, 2009
- DescriptionAI
- L'Imam Ibrahima Cissé, secrétaire exécutif de l'Ospviaci, milite pour la restitution des valeurs authentiques de l'Islam en Côte d'Ivoire. Il critique l'Islam politique et associatif, qu'il juge dévoyés et axés sur le gain matériel, et promeut l'Islam traditionnel comme la voie véritable. Pour y parvenir, il propose une refonte de l'éducation islamique, incluant la réintégration de l'éthique et de la spiritualité, ainsi que l'harmonisation des programmes des écoles traditionnelles.
- pages
- 6
- number of pages
- 1
- Language
- Français
- Contributor
-
Frédérick Madore
- Identifier
- iwac-article-0010975
- content
-
Imam Ibrahima Cissé, secrétaire exécutif de l’Ospviaci :
« Il faut restituer à l’Islam sa valeur authentique »
L’organisation pour le soutien et la promotion des valeurs islamiques ancestrales en Côte d’Ivoire (Ospviaci) a été créée pour restituer à l’Islam sa valeur authentique.. Le secrétaire exécutif de ladite structure, Oustaz Ibrahima Cissé, explique ici comment les vertus islamiques originelles sont galvaudées. Tout en donnant des ébauches de solutions face à pareille situation.
**Qu’est-ce qui a milité en faveur de la création de l’Organisation pour le Soutien et la Promotion des Valeurs Islamiques Ancestrales en Côte d’Ivoire (Ospviaci) ?**
Tout est parti d’un constat. Dans mon engagement islamique, mon souci pour la promotion de l’Islam, sa bonne implantation et sa bonne réputation, j’ai été amené à côtoyer bien de structures islamiques. Parfois, comme membre ; parfois, comme collaborateur extérieur. Et, les leçons que j’ai tirées, par rapport aux textes que ces différentes organisations se sont données, m’ont conduit à une déception ; à tel point que j’ai perdu espoir...
**Justement, nous constatons qu’aujourd’hui, l’Islam est subdivisé en trois tendances à savoir : l’Islam politique, l’Islam associatif et l’Islam traditionnel. Vous faites exclusivement l’apologie de l’Islam traditionnel. Qu’est-ce qui explique votre démarcation d’avec l’Islam politique et l’Islam associatif ?**
L’Islam politique ressemble à un édifice religieux qui charme par son apparence ; mais dont le contenu est vide. L’Islam associatif, lui, veut évoluer selon les normes occidentales. Nous n’avons pas voulu appartenir à ces deux tendances ; mais plutôt à l’Islam traditionnel qui représente, pour nous, l’Islam vrai. Voyez-vous, quand le religieux vient s’adonner au même langage et au même comportement que le politique, étant donné qu’il est dirigeant, il devient un danger pour sa communauté ; parce que lorsque le politique lui fera subir ce qu’un adversaire politique doit subir, alors, il recommandera à sa masse de réagir. Et là, c’est une confusion qu’il pourra créer entre sa démarche de politique et de religieux. Aujourd’hui, on ne distingue donc pas le religieux du politique. Pour ce qui concerne l’Islam associatif, notre constat est que des étudiants, sortis de certaines universités, et parfois n’étant pas tous des théologiens de formation, se sont donnés la main entre copains pour gérer la communauté musulmane en Côte d’Ivoire. Pour gagner, peut-être, ce que leurs études ne leur ont pas permis de gagner.
**Voulez-vous dire que cette autre tendance islamique foule au pied les principes islamiques originels ?**
Effectivement, les mosquées sont utilisées comme des entreprises propres à certains Imams. Où toutes les prestations qu’ils donnent ciblent essentiellement le gain matériel et financier. Au détriment de l’aspect spirituel qui est purement et simplement foulé au pied. Le grand dirigeant islamique n’est pas celui qui vit sur le dos de sa communauté. Non, ce n’est pas ce que nous avons hérité de nos grands parents qui ont dirigé l’Islam. Beaucoup de choses se disent dans les salons. Ne voulant pas verser dans l’hypocrisie, je préfère exprimer clairement mes griefs.
**Vous est-il arrivé d’entrevoir des rencontres avec les tenants des autres courants islamiques pour aplanir les divergences ?**
Oui et non. Voyez-vous, j’ai été membre de plusieurs structures islamiques. Et je suis collaborateur extérieur de bien d’autres. Ivoirien, je vis mon Islamité dans mon pays. Je suis issu d’une famille de dirigeants musulmans, depuis des siècles. J’ai des frères et des amis, partout dans les structures islamiques existantes. Cela ne peut et ne doit, en aucun cas, m’empêcher de dénoncer tout ce qui peut ramer à contre courant du rayonnement de l’Islam. C’est ma nature à moi d’être ouvert à tous. Mais, on a toujours estimé que je suis trop jeune pour mener des actions en faveur des valeurs islamiques ancestrales. Tantôt l’on voit en moi l’incarnation du diable ; parce que ma façon de dénoncer, de critiquer, est gênante pour d’autres. Certaines personnes me menacent de mort. Parfois, l’on me lance au visage que ma structure (NDLR, l’Ospviaci), ne fera pas long feu. Et, les plus pacifiques disent : « Nous savons tous qu’il y a problème, mais faisons avec ce minimum de cohésion hypocrite ; sinon l’on estimera que tu es l’instaurateur de la fitna (NDLR, tout ce qui est désordre), dans ce pays ».
**Malgré ces interpellations, vous entretenez toujours une logique conflictuelle...**
Ecoutez, il faut que je sois hermétiquement attaché à mon éducation, à ma culture islamique originelle. Tout ce que je peux apporter à l’Islam, aujourd’hui, c’est de dénoncer ce qui ne va pas. Tout en proposant mieux.
**Qu’entrevoyez-vous, alors, pour le rayonnement de l’Islam ?**
Nous sommes conscients que la tâche sera très ardue pour nous. Car, sensibiliser des gens, pour un changement de comportement, n’est pas aisé. C’est pour cela que, dans notre démarche, nous n’allons pas mettre la charrue avant les bœufs. Nous allons nous focaliser, d’abord, sur l’éducation. En ramenant, si possible, tous ces diplômés ayant étudié en Arabie et ne faisant pas aujourd’hui la fierté de l’Islam, au plan de l’éthique et de la morale. A ceux-ci, nous allons inculquer les notions de la spiritualité et de l’ islamité vraie. Afin qu’ils soient véritablement imprégnés du sens de leur responsabilité de dirigeants. Nous allons, par ailleurs, revoir le contenu des programmes des écoles traditionnelles. De sorte que l’on puisse y trouver ce qu’ils seraient tentés d’aller chercher ailleurs. Nous voulons également revaloriser l’enseignement traditionnel dans sa forme, en vue de répondre à certaines exigences des autorités administratives et politiques. Nous nous donnons, en outre, pour mission d’harmoniser les programmes de ces écoles sur toute l’étendue du territoire national. Afin d’aboutir à un diplôme national qui puisse briser ce sentiment d’infériorité que l’étudiant traditionnel a face à un arriviste de l’Arabie. C’est un chantier énorme. Nous y croyons. Et, nous allons nous donner les moyens de le réaliser. Inch’Allah !
Entretien réalisé par JANVIER KROGNOU