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Message des imams et du CNI : "Le Code électoral a divisé la nation"
- Title
- Message des imams et du CNI : "Le Code électoral a divisé la nation"
- Type
- Article de presse
- Creator
- Sylvain Hassan Boza
- Publisher
-
Le Jour
- Date
- August 9, 1995
- DescriptionAI
- Lors de la célébration du Maouloud en Côte d'Ivoire, le Conseil supérieur des Imams (Cosim) et le Conseil national islamique (CNI) ont appelé à la paix, la justice et le consensus national. Ils ont vivement recommandé la révision du code électoral, qu'ils estiment diviser la nation, afin de préserver la stabilité du pays. Le gouvernement, représenté par le ministre des Affaires étrangères, a pris note de ces préoccupations.
- pages
- 1
- 7
- number of pages
- 2
- Subject
- Djiguiba Cissé
- Idriss Koudouss Koné
- Ousmane Diakité
- Mawlid
- Henri Konan Bédié
- Ivoirité
- Élection présidentielle ivoirienne de 1995
- Yopougon
- Conseil National Islamique
-
Conseil Supérieur des Imams, des Mosquées et des Affaires islamiques
- Aboubacar Fofana
- Mahomet
- Roger Garaudy
- Paix
- Justice
- Solidarité
- Prière
- Mosquée
- Élections
- Essy Amara
- Division
- Language
- Français
- Contributor
-
Frédérick Madore
- Identifier
- iwac-article-0010390
- content
-
MESSAGE DES IMAMS ET DU CNI
"LE CODE ÉLECTORAL A DIVISÉ LA NATION"
A l'instar des musulmans du monde, la communauté Islamique de Côte d'Ivoire a célébré lundi nuit, le Maouloud ou l'anniversaire du prophète Muhammad. Les manifestations officielles de cette fête se sont déroulées à la mosquée LEM de Yopougon, devant de nombreux fidèles venus de tous les quartiers de la capitale économique.
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Nuit du Maouloud
Les Imams souhaitent la révision du code électoral
A l'instar des musulmans du monde, la communauté Islamique de Côte d'Ivoire a célébré lundi nuit, le Maouloud ou l'anniversaire du prophète Muhammad. Les manifestations officielles de cette fête se sont déroulées à la mosquée LEM de Yopougon, devant de nombreux fidèles venus de tous les quartiers de la capitale économique.
La communauté Musulmane de Côte d'Ivoire a célébré dans la nuit du lundi au mardi, l'anniversaire de leur prophète Muhammad. Toutes les mosquées du pays ont connu une animation particulière : lecture du Coran, prières, chansons liturgiques islamiques et conférences ont constitué l'essentiel du programme de cette nuit. Le Conseil supérieur des Imams (Cosim) et le Conseil national islamique (CNI) ont choisi la mosquée Lem de Yopougon pour les cérémonies officielles.
Dès 21 heures, cette mosquée était bondée de monde. Aux nombreuses autorités de la commune de Yopougon, se sont ajoutés quelques ambassadeurs et des membres du gouvernement dont M. Essy Amara, ministre des Affaires étrangères, représentant le président de la République. Tous les grands Imams d'Abidjan ont pour la circonstance effectué le déplacement de la mosquée Lem de Yopougon. Ils étaient environ une cinquantaine. Après la séance de bénédiction conduite par l'Imam Konaté de la grande mosquée de Treichville, l'Imam Cissé Djiguiba a lu le message du Conseil supérieur des Imams (Cosim) à la nation. Un message dont les maîtres-mots étaient paix, justice et équité.
L'Imam a rappelé que l'Islam signifie la paix, mais cette notion, selon lui, n'est pas réductible à une absence de guerre. La paix selon El Hadj Cissé Djiguiba est une quête permanente du consensus dans tous les problèmes qui se posent à l'ensemble des fils d'une nation. Plus concrètement, les Imams de Côte d'Ivoire ont prouvé la nécessité pour les enfants de ce pays de se parler afin d'aplanir les éventuelles divergences. Pour eux, le code électoral qui doit régir les élections qui approchent et qui continue de faire couler beaucoup de salive devait être sinon retiré du moins révisé en certains de ces aspects. Cela permettrait à la Côte d'Ivoire de continuer à bénéficier de cette paix relative qu'elle a toujours connue.
Le vice-président du Conseil national islamique, M. Diakité Ousmane, est également revenu sur cette position du Cosim ; pour bien marquer leur réserve vis-à-vis d'un code électoral qui, en quelques mois, "a divisé les fils de cette nation". Pour le CNI, il est encore temps de rectifier le tir. Car, même si une "nation peut prospérer dans l'infidélité, elle ne le peut dans l'injustice.
Nuit de souvenir, nuit de piété, la nuit du lundi dernier a été aussi celle d'un bilan au cours duquel, chaque musulman s'est interrogé sur son comportement par rapport aux prescriptions et recommandations de son prophète dont il célèbre l'anniversaire de la naissance. Au nombre de ces recommandations du prophète muhammad, se trouve la solidarité. C'est donc à juste titre que l'Imam Aboubacar Fofana, porte-parole du Conseil supérieur des Imams (Cosim) a entretenu les fidèles sur cette notion. Selon lui, la solidarité constitue le socle de la communauté Musulmane. L'appel en direction des Musulmans ivoiriens à faire usage de cette notion.
Après les allocutions officielles, les Imams se sont retirés dans leurs différentes mosquées où les attendaient leurs fidèles pour célébrer ensemble le reste de cette nuit anniversaire.
M. Essy Amara a, au nom du président de la République, fait un don de 300 Corans aux Imams. Don que les Imams ont apprécié à sa juste valeur. Interrogé sur la déclaration des Imams relative au code électoral, M. Essy Amara a répondu qu'il retenait deux notions. Celle de solidarité et de justice. Selon lui, ces notions ont toujours été les préoccupations du président Henri Konan Bédié. Donc, il n'existe aucun déphasage entre cette déclaration et la vision du président.
La nuit du Maouloud aura été celle d'un hommage à un homme, le prophète Muhammad (PSL) dont l'historien Roger Garaudy disait : "l'avènement de cet homme ne sachant ni lire ni écrire a bouleversé toute l'humanité par son message à la fois divin et humaniste."
Sylvain Hassan Boza
Le porte parole des Imams El Hadj Aboubacar Fofana...
...et le président du Conseil national Islamique, El Hadj Idriss Koné Koudouss : "La Paix n'est pas seulement l'absence de guerre, mais aussi une quête permanente des résolutions des problèmes par le consensus."
Message du Conseil national islamique (CNI) et du Conseil supérieur des Imams (Cosim)
"Le Code électoral a divisé la Nation..."
Mawlid, fête anniversaire de la naissance du prophète Mohammad (SAW) est un jour important pour l'Islam et les musulmans. Cette occasion est particulièrement opportune pour nous, Conseil Supérieur des Imams et Conseil National Islamique, d'adresser notre fraternelle salutation à tous les Ivoiriens, quelles que soient leur confession religieuse et leur obédience politique. C'est aussi l'occasion pour prier, non seulement pour la Paix et la Prospérité dans notre pays, mais également pour notre continent et pour le monde.(...)
La paix, du point de vue de l'Islam, est un concept global qui signifie beaucoup plus que "l'absence de conflits". Elle est une attitude dynamique qui traduit la volonté active de prévenir les tensions, de les dénouer si, par malheur, elles venaient à s'installer. La Paix, immanente de tous les hommes. Elle n'est pas une grâce qui tombe sans effort des cieux ; elle est une quête permanente de tous les instants. Jusqu'aujourd'hui, la Côte d'Ivoire a su préserver l'essentiel, éviter les fractures irréversibles. Cela a permis à notre pays de franchir des étapes vers un bonheur relatif, de réduire la part d'incertitudes qui, ailleurs, ont déstabilisé des Nations pourtant fortes en apparence. La tâche primordiale qui incombe donc à chacun de nous, est de réunir les conditions requises pour minimiser les conflits, voire les supprimer lorsque des intérêts antagonistes les font germer. Il n'y a pas de fatalité dans l'avènement des désastres. L'Islam, religion non fataliste, nous enseigne que deux voies nous sont offertes : l'une mène vers la paix, l'autre vers l'affrontement. Le moyen le plus sûr pour échapper aux pièges de la désagrégation est la concertation, en vue de réaliser un consensus minimum. Dans cette perspective, la responsabilité de l'Etat et des gouvernements est essentielle. Mais elle n'annule pas celle de toute la Nation. Le COSIM et le CNI n'ont pas vocation à prendre parti. Mais, ils ont l'obligation d'appeler l'attention de tous sur la nécessité de se parler ; de rappeler à chacun son devoir moral, d'éviter les tourments qui naissent des actes d'exclusion, de déni de fait d'une citoyenneté. A ce propos, le COSIM et le CNI réaffirment ce principe évident : Tous les Ivoiriens ont les mêmes droits et les mêmes devoirs. Attentifs à tout ce qui touche l'équilibre de la Nation, le COSIM et le CNI suivent avec beaucoup d'intérêt, mais à leur façon, les débats actuels qui engagent l'avenir du pays. Aujourd'hui, ils perçoivent l'inquiétude d'une importante frange de la population depuis le vote et la promulgation de la loi portant code électoral. Le moins qu'on puisse dire et qui exprime la réalité, c'est que cette loi, en quelques mois, a divisé une Nation qui se construisait patiemment. Le tissu social est mis à mal dans des proportions inquiétantes. Cette frange, qui se sent exclue, a besoin d'être rassurée quant à la promesse de construire et pérenniser, ensemble, cette "Patrie de la vraie Fraternité", de garder ses chances et son espérance intactes.
Le COSIM et le CNI interpellent les acteurs de la vie politique et leur disent : il n'y a pas de politique qui vaille en dehors des réalités. La sagesse et le pragmatisme invitent à rechercher le consensus et donc à réexaminer, dès que possible, les aspects contestés du code électoral. Le COSIM et le CNI pensent que la justice n'est certainement pas la satisfaction de tous les désirs ; mais elle est encore moins la marginalisation, volontaire ou non, de ceux qu'on croit (à tort) sans moyens et sans capacité de réaction. (...)
Du point de vue du COSIM et du CNI, aucune querelle susceptible d'opposer les enfants de ce pays n'est irréductible. Qu'il s'agisse de l'Ecole, du Code électoral, de l'égalité des chances etc, la patience et l'humilité, qui sont les bases du dialogue, peuvent engendrer des résultats spectaculaires. A-t-on suffisamment usé de la concertation en vue d'aplanir les différends ? A notre humble avis, pas assez. Est-il trop tard pour le faire ? Nous pensons qu'il est encore possible de renouer le dialogue.
Les temps qui approchent sont porteurs de risques si les bonnes volontés, prises dans une logique partisane, renoncent à jouer leur rôle de conciliation, laissant ainsi le champ libre aux thèses extrémistes. (...)
Déjà, certaines composantes de la Nation sont mises à l'index par les spécialistes de la surchauffe verbale ; les experts en tension sociale dont nul ne peut dire s'ils sont mandatés pour parler et / ou écrire.
Mais, l'important, du point de vue du COSIM et du CNI, est ailleurs. Comment créer les conditions afin que chaque Ivoirien vive ses engagements philosophique ou politique dans le respect des autres ? C'est un défi lancé à cette génération d'Ivoiriens qui doivent contribuer, à chaque niveau, au maintien d'un climat apaisé, dans ce pays prestigieux, aux potentialités humaines et économiques exceptionnelles. Que chaque croyant s'en remette à Dieu, mais avant de le faire, que tous les croyants fassent ce qui dépend d'eux, en faveur de la Paix pour que se dégage la voie lumineuse vers notre destin commun.
Le COSIM et le CNI invitent tous nos compatriotes à la réflexion. Ils savent qu'en dépit de divergences réelles, nul ne mesurera son soutien, nul n'économisera son énergie et son temps pour préserver la Côte d'Ivoire. Ils invitent enfin les croyants à la prière et à la méditation, pour que notre pays continue de mériter la grâce et la prodigalité divines.
Assalam Aleikum Pour le COSIM
Le porte-parole : El Hadj Aboubacar Fofana
Pour le C.N.I.
Le Président : El Hadj Koné Idriss Koudouss

