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Le chef de l'État aux communautés religieuses : "Notre idéologie sera l'affaire de toutes les forces vives de la Nation"
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- Title
- Le chef de l'État aux communautés religieuses : "Notre idéologie sera l'affaire de toutes les forces vives de la Nation"
- Publisher
- Daho-Express
- Date
- November 18, 1974
- Abstract
- Le 25 octobre 1974, le chef de l’Etat dans sa mémorable adresse à la Nation a déclaré, pour la première fois, que le Dahomey se donnera avant le 30 novembre 1974 une idéologie. Et depuis lors, le président Kérékou ne cesse au cours de toutes ses rencontres avec le peuple (conférences des CRL de Cotonou, Natitingou, Parakou) de préciser la nécessité du choix idéologique pour lever les équivoques et convaincre autant que faire ce peut, ceux qui ont peur du mot idéologie parce qu'ils pensent que l’idéologie est le diable. C'est dans le cadre de cette clarification que le président Kérékou a eu à rencontrer vendredi dernier les différents responsables des communautés religieuses.
- Page(s)
- 5
- Subject
- Athéisme
- Catholiques
- Coup d'État de 1972 au Dahomey
- Marxisme-léninisme
- Mathieu Kérékou
- Religions endogènes
- Révolution
- Rights Holder
- La Nation
- Language
- Français
- Source
- Bibliothèque du Congrès
- Identifier
- iwac-article-0003099
- content
-
Le 25 octobre 1974, le chef de l’Etat dans sa mémorable adresse à la Nation a déclaré, pour la première fois, que le Dahomey se donnera avant le 30 novembre 1974 une idéologie. Et depuis lors, le président Kérékou ne cesse au cours de toutes ses rencontres avec le peuple (conférences des CRL de Cotonou, Natitingou, Parakou) de préciser la nécessité du choix idéologique pour lever les équivoques et convaincre autant que faire ce peut, ceux qui ont peur du mot idéologie parce qu'ils pensent que l’idéologie est le diable. C'est dans le cadre de cette clarification que le président Kérékou a eu à rencontrer vendredi dernier les différents responsables des communautés religieuses.
Tout le monde sait que la mentalité dahoméenne est fortement imprégnée des croyances religieuses de l’animisme aux croyances importées, (catholicisme, protestantisme, Islam) et que rien ne se passe chez nous surtout s’il s'agit de catastrophe tel le drame de Coussi sans qu'on l’attribue aux puissances occultes. Aussi, le chef de l'Etat, reconnaissant la valeur de la foi, a stigmatisé vendredi dernier, les méfaits des pratiques dont le but est de nuire à la Nation. Mais il n'y a plus de place pour les ennemis de notre révolution nationale. Les croyants seront des patriotes voués à la cause du peuple ou le peuple les combattra pour faire triompher les valeurs humaines propices à la réalisation d'une société où il fera bon vivre.
Camarades militants voici l’adresse du chef de l'Etat le lieutenant-colonel Mathieu Kérékou aux responsables des communautés religieuses de notre pays.
Mgr. L'archevêque de Cotonou ;
MM. Les Imans du Dahomey ;
Les Représentants du Culte Vodoun ;
« Je vous souhaite la bienvenue au Palais de la République, et dans cette salle du Peuple. J’ai demandé à vous rencontrer pour que nous puissions parler directement entre nous, car nous estimons que la Révolution qui est en cours, Révolution déclenchée par les Forces Armées Dahoméennes depuis le 26 octobre 1972 a été faite au nom du Peuple dahoméen tout entier. Nous insistons toujours et disons au nom du Peuple tout entier pour la simple raison que cette Révolution effectivement est faite pour nous tous, sans distinction aucune. Et si elle est faite pour les masses populaires, nous estimons aussi que les chefs religieux sont à la tête de ces masses populaires. Et depuis deux ans que nous luttons pour nous libérer de la domination étrangère, je n’ai pas eu l'occasion de rencontrer les chefs religieux de notre pays pour qu’ils nous disent ce qu'ils pensent de cette Révolution.
NOTRE REVOLUTION N'EST PAS CONTRE LES CULTES
Certes, jusqu'à cette date, nous n’avions jamais évoqué le contenu philosophique de notre Révolution. Nous n'avons jamais proclamé que notre Révolution était contre les cultes, et nous n'avons jamais dit que notre Révolution voulait installer dans notre pays l'athéisme. Cependant, depuis le 25 octobre 1974, vous avez entendu qu'il était temps que nous donnions un contenu philosophique à notre religion, à notre Révolution, car la révolution aussi est une religion — et c’est pour cette raison que nous avons dit qu'il faut maintenant que nous ayions une idéologie. Et quand j’ai parlé d'idéologie, je savais bien que ce mot allait être mal interprété par beaucoup de nos concitoyens, surtout dans le milieu religieux. On nous a dit que le marxisme-léninisme est une idéologie, et tous les pays qui ont eu la même formation, surtout en Afrique, nous ont présenté le marxisme-léninisme comme une philosophie qui n'enseigne que l'athéisme, le matérialisme, c'est à dire une philosophie qui n'enseigne pas la morale.
Et je crois que c’est pour cette raison que lorsqu'on a parlé d'idéologie, beaucoup se sont levés pour nous demander où nous allons avec notre Révolution ?
Je pense que ce sont là de faux problèmes.
Car moi-même, j'ai déjà dit que nous ne pouvons pas appliquer la Révolution en allant la chercher dans les livres écrits par les grands théoriciens des pays étrangers. Et j’ai toujours dit qu'avant qu'on ne prononce ce mot qu'il faut se référer à notre culture et — aux réalités de ce pays. Ce que nous disons c’est qu’il faut compter sur ses propres forces, et sur ses propres moyens. C'est donc tout un ensemble de situations d'ordre historique, économique, social et politique. Et c'est compte tenu de ces situations que personne ne peut nous contester notre manière de conduire la Révolution pour construire la nouvelle société où il fera bon vivre pour tout le monde.
Et vous devriez savoir qu'aucun des pays qui font la Révolution et que j’ai cités, aucun d'eux n’a jamais brisé des églises, des mosquées et des temples. Il y a eu certes des frictions entre les responsables des Etats révolutionnaires et les représentants des Cultes par manque de dialogue, de tolérance, et surtout de foi.
Et l'histoire nous a enseigné que, quel que soit le degré de tension et de friction, qu’il a pu y avoir entre ces communautés d'un même pays, on finit toujours par trouver une solution, juste et valable pour tout le monde. Forts de cette triste expérience vécue ailleurs par d'autres responsables, nous pensions qu'il était temps pour nous, d'éviter des provocations inutiles et des pertes de temps. C'est pour cette raison que jusqu'ici, nous n'avons pas parlé du domaine religieux, sachant pertinemment ce que nous sommes. Je sais ce que je suis, et je sais ce que sont les autres citoyens. Si je ne le savais pas, alors je serais irresponsable. Et si les autres, tout en proclamant la Révolution au bout des lèvres ne tenaient pas compte des réalités de leur société, je les taxerai, d'irresponsables et d'anarchistes. Parce que l'anarchiste, l'irresponsable c'est celui qui provoque des agitations, lance des mots d'ordre sans pouvoir les appliquer sur le terrain.
Cette rencontre, c’est pour vous dire qu'effectivement la Révolution, n'est dirigée contre personne.
Sauf ceux qui sont contre la Révolution.
La Révolution permet aux citoyens de ce pays d'être libre afin de pouvoir travailler en paix ; elle n'est dirigé contre aucun bon citoyen.
Il y a des domaines qu'on doit discuter et ces domaines relèvent de la conscience de l'homme en tant qu'individu. Jusqu'à présent, les catholiques n'ont pas tenu des sermons qui frisent l'anarchie ou l’indiscipline ou qui frisent le dénigrement de notre Révolution. Je les en félicite au nom du Peuple dahoméen tout entier pour leur comportement jusqu'à ce jour.
Je sais que le problème des écoles ex-catholiques est un problème humain. Mais je demande à l'archevêque de Cotonou de nous comprendre car ce n'est pas nous qui avons créé cette situation sociale. Nous l'avons trouvée sur le terrain. La Révolution est venue mettre de l'ordre et nous militaires nous ne pouvons pas contourner les obstacles. Il nous fallait, soit remettre les écoles ex-catholique, entre les mains du clergé, soit les prendre en charge. De l'analyse de la situation, et compte tenu de ce que nous en savions, il était presqu'impossible, si nous voulions nous en tirer honorablement et à la satisfaction de la majorité des Dahoméens, il fallait donc que ces écoles fussent reprises par l’Etat. C’est ce que nous avons demandé. Pour éviter des frictions inutiles et des incompréhension entre le clergé et ses fidèles croyants. Si nous voulons situer les responsabilités — car la Révolution est vérité, nous pouvons dire qu'il y a dans cette affaire une grave responsabilité de l'Eglise catholique qui n’avait pas désigné un représentant pour prendre au sérieux ce problème et faire surtout des propositions concrètes en leur temps. Il y a eu aussi une part de responsabilité du Gouvernement peut-être qui n'a pas pu provoquer, et imposer s'il le faut un dialogue sincère et franc. Car si l'archevêque de Cotonou et moi, nous avions décidé de prendre ce problème en mains, nous aurions pu trouver une solution qui aboutirait de toutes façons à la prise en charge de ces écoles par l'Etat mais il n'y aurait pas eu de grincements de dents.
DANS L’INTERET GENERAL DE LA NATION
Maintenant que la décision a été prise, il nous appartient de renouer le dialogue pour que cette décision soit appliquée dans l'intérêt général de la Nation.
Je crois aussi savoir qu'il existerait des psaumes noirs pour provoquer des catastrophes surnaturels et pour créer la division de ce pays. Les gens le disent. Mais moi je n’y crois pas.
S'agissant des Musulmans, nous n'avons pas non plus de contentieux avec eux. Cependant nous savons que de leur côté le problème des prières est un peu plus sérieux ? Effectivement il y a beaucoup de musulmans, beaucoup d'Imams qui ne disent que de mauvaises prières. On peut l'affirmer, preuves à l'appui : des mauvaises prières pour provoquer des catastrophes. Je ne veux pas aller plus loin. Nous les avons aidés pour qu’ils s'organisent sur toute l'étendue du territoire national, pour qu'ils puissent prendre en main ces mauvais musulmans qui exploitent leurs compatriotes en récitant des mauvaises prières. Car les prières pour demander par exemple la mort des autres, sont condamnées. Je crois, par toutes les fois.
Je tiens à leur dire que s'ils continuent à autoriser leurs anarchistes à faire des prières noires, nous allons prendre des mesures contre les Musulmans. Car nous ne pouvons pas accepter la mystification du peuple avec des prières. S’il, veulent de l'argent, ils n'ont qu'à travailler pour gagner cet argent, honnêtement. Mais si des Musulmans continuent à faire des prières dans les concessions des anciens responsables politiques sous prétexte que c’est pour les faire sortir d’où ils sont pour prendre de nouveau le pouvoir dans ce pays et se mettre à leur service (nous en sommes au courant) nous allons casser les mosquées.
Quant aux fétichistes, c’est encore plus grave parce que c'est chez les fétichistes que les mauvais citoyens vont. Et la vérité est que ce n'est pas le clergé qui contrôle les citoyens de ce pays ; ce ne sont pas non plus les Musulmans qui les contrôlent. Certains citoyens quoique fréquentant assidûment l'Eglise, la Mosquée, ou les Temples ne se privent pas de se rendre après chez le fétichiste pour demander des faveurs surnaturelles.
Ceux parmi eux qui veulent se faire des politiciens en vue, vont chez les féticheurs pour demander des gris gris pour bouleverser une situation donnée. Il y en a même qui demandent la tête des autres, ou pour aller contre la Révolution.
En un mot, ce sont les féticheurs qui contrôlent l’esprit de tous les Dahoméens. Personne ne peut nous dire le contraire. Si ces féticheurs sont décidés à faire la Révolution, ils peuvent même dénoncer les contre-révolutionnaire, et même les impérialistes. Il faut que ces chefs féticheurs se reconvertissent. On ne leur interdit pas de donner de bons gris gris si c'est pour guérir les gens, ni pour préserver les gens centre les catastrophes.
Car en effet il existe des possibilités d'échapper à des accidents et même des balles. Quand il y a eu ici la tornade et aussi la catastrophe ferroviaire, on en a rendu responsable la Révolution. Nous disons pour notre part que c'est de la mystification.
Car s'agissant de la catastrophe ferroviaire, la faute en incombe aux deux chefs de train qui n'ont pas fait leur travail.
Donc la rencontre d'aujourd'hui c’est pour vous dire que nous allons donner effectivement une idéologie à notre Révolution. Et si les chefs religieux de ce pays veulent assumer toutes leurs responsabilités, ils ont encore une semaine à peu près, parce qu'il a été dit que des responsables, c’est-à-dire, des cadres vont se réunir pour nous définir cette idéologie. Ceci avant le 30 novembre 1974. Alors si déjà tout le monde y pensait, car cela fait déjà 2 ans que nous faisons la Révolution, et chacun de vous devait déjà penser et chercher quelle voie et quelle méthode il faut adopter pour que cela aille bien. Si vous avez donc des propositions concrètes déjà formulées, vous pouvez nous les communiquer avant le lundi.
De toute façon, nous pouvons donner jusqu'au 25 novembre dernier délai pour que vous puissiez nous communiquer vos suggestions, vos propositions concrètes.
Car il s'agit ici de donner une idéologie, c'est-à-dire une méthode d’action philosophique à notre Révolution. Et nous avons dit que nous allons tenir compte de l'ensemble des forces vives et saines du pays.