-
Title
-
Mouloud : le sens religieux
-
Date
-
January 11, 1982
-
Abstract
-
On se souvient, le monde musulman a célébré vendredi dernier l'anniversaire de la naissance du Prophète MAHOMMET.
-
DescriptionAI
-
Le texte explore la célébration du Mouloud, l'anniversaire de la naissance du Prophète Mahomet, fêté le 12 Rabi' al-awwal. Cette tradition, établie des siècles après sa naissance, est marquée par des veillées où l'on raconte et commente les événements clés de la vie du Prophète, de sa naissance miraculeuse à sa mission divine et aux persécutions subies. Moins axée sur les réjouissances populaires que d'autres fêtes islamiques, le Mouloud est une occasion de louer et de se remémorer l'action et les qualités du Prophète.
-
number of pages
-
5
-
Identifier
-
iwac-article-0003088
-
Rights
-
-
content
-
On se souvient, le monde musulman a célébré vendredi dernier l'anniversaire de la naissance du Prophète MAHOMMET.
communément appelé MOULOUD. On a donc veillé toute la nuit du jeudi à vendredi. Au cours de cette veillée on a lu et commenté les principaux évènements qui ont marqué la vie du Prophète depuis sa naissance jusqu'à sa mort. A ce propos d'ailleurs nous vous proposons une interview qu'a bien voulu nous accordée M.Yaya GNESSIEN, Directeur Général de la Voix du Redressement pour le Progrès National sur le sens religieux de cette célébration.
QUESTION- M. le Directeur ,le MOULOUD est communément considéré comme l'anniversaire de la naissance du Prophète Mohammet.
Quelle en est la signification exacte au plan religieux ?
R. - Le Mouloud est maintenant entré en effet dans la tradition en pays d'Islam. On célèbre le Mouloud chaque année maintenant de façon très courante dans tous les pays musulmans du monde. Il n'en a pas toujours été ainsi. Le Mouloud signifie naissance, anniversaire. On parle de Mouloud "RABI" c'est-à-dire l'anniversaire du Seigneur Prophète MAHOMMET. Eh bien, le prophète Mahommet est né le 12è jour du 5è mois lunaire que les Arabes appellent ”Rabi Lawal". C'est donc chaque l2è jour du mois de "Rabi Lawal" qui est le 3è mois de l'année lunaire (calendrier lunaire) qu'on célèbre l'anniversaire de la naissance du prophète. Comme le calendrier musulman ne compte que 354 ou 355 jours il est donc décalé de 10 à 11 jours par rapport au calendrier grégorien, c'est la raison pour laquelle les fêtes musulmanes sont généralement des fêtes ambulantes; elles sont décalées de 10 à 11 jours d'une année à une autre par rapport, à l'année précédente. Elle a lieu cette année le 8 janvier. L'année prochaine on soustraira 10 ou 11 jours ouvrables; elle tombera peut-être le 28 ou le 27 décembre en 1982. Il en est ainsi de toutes les fêtes musulmanes. Comme je disais tout à l'heure, c'est une fête qui est entrée maintenant dans la tradition dans les pays musulmans et n'en a pas été toujours ainsi; En ARABIE même, on n'a pas loud. Ce n'est que 200 (deux cents) ans après la naissance du Prophète, et comme vous savez, il est né en 570, au VIè siècle; c'est donc au IXè siècle, sous le Califa des Abacides qu'en Arabie même, on a commencé à célébrer la date de la naissance du Prophète comme une fête. Au départ les réjouissances prenaient des formes très folkloriques; on offrait des banquets, on organisait des courses hippiques, des luttes traditionnelles et d'autres réjouissances populaires.
Et ce sont ces mêmes coutumes qui ont été importées vers tous les pays où à la suite de la conquête musulmane, l'Islam s'est répandu. En Afrique, chez nous, le Mouloud a été célébré dans la région de TOMBOUCTOU ODJENE qui est une région d'ancienne civilisation musulmane dès le IXè siècle où l'Islam a atteint ces régions et où, depuis ce temps là on célèbre le Mouloud. Cette tradition s'est ensuite répandue dans les régions voisines. En HAUTE-VOLTA, il y a environ une quarantaine d'année qu'on célèbre le Mouloud. Le Père du Cheickh actuel de RAMATOULAYE, le Cheick MAÏGA est parmi ceux qui ont commencé à célébrer le Mouloud ici. Donc la célébration a deux formes: il y a les réjouissances populaires d'une part, et d'autre part, il y a les savants, les lettrés ou les marabouts comme nous les appelons couramment qui ont commencé à organiser des veillées au cours desquelles on raconte les principaux épisodes de la vie du prophète depuis sa naissance, depuis l'annonciation de sa naissance jusqu'à l'âge adulte où il a reçu mission d'Allah, son Dieu, de prêcher l'Islam, la religion de la soumission. C'est donc, à partir de ces veillées, de cette lecture commentée du CORAN eue le Mouloud, anniversaire de la naissance du prophète a commencé à prendre une signification religieuse. Au cours de ces veillées, on raconte les principaux épisodes de la vie du prophète et c'est généralement pour louer, pour magnifier l'action du prophète. Toutes ces récitations, tous ces hymnes que l'on entend chanter sont des louanges du prophète qui a porté plusieurs noms (Mahammad, Lamine etc...) qui sont tous des noms indescriptibles et qui décrivent ses principales qualités. C'est là le sens même du Mouloud, cette nuit à travers laquelle on se rémémore les principaux événements de la vie du prophète et leur place dans la liturgie musulmane.
Q- Vous venez de dire que, au départ, le MOULOUD dormait lieu à des réjouissances diverses, Alors, de nos jours on constate que cette fête au contraire n'est pas l'occasion de réjouissances populaires par rapport aux autres fêtes religieuses telles que la TABASKI ou le RAMADAN. Peut-on en savoir les raisons ?
Comme je l'ai dit tout à l'heure, la célébration du Mouloud est récente. Il y a encore des régions profondément musulmanes où elle passe pratiquement inaperçue; Parce qu'elle était confondue aux autres fêtes populaires. En HAUTE-VOLTA ici, et plus particulièrement chez les mossis, on l'appelle "Gâna" et le considère comme toutes les autres fêtes de l'année. Cependant les citadins qui sont un peu déracinés de leurs cultures ignorent cette fête; elle passe inaperçue pour eux. Parce qu'ils ont perdu l'habitude de participer aux manifestations populaires (traditionnelles)si bien que le Mouloud passe inaperçu à OUAGADOUGOU; par contre là où existe une communauté musulmane importante, le fait de veiller leur rappelle la fête du Mouloud. La TABASKI et le RAMADAN (fin de jeûne) sont par contre connus de tous; Musulmans et non-musulmans les célèbrent et participent ainsi aux réjouissances, à l'image de NOEL et du NOUVEL AN.
Qu - Cette année la fête coïncide avec le vendredi. La traditionnelle prière de vendredi est-elle dans ce cas obligatoire ?
R.- La prière de Vendredi est obligatoire, quoiqu'il arrive. Exemple: les gens prétendent couramment que quand la fête de sacrifice, du mouton ou (TABASKI) coincide avec un Vendredi la tradition populaire veut que ce soit dangereux, périlleux pour l'Imam qui dirige la prière. Tout cela, ce sont des histoires. En réalité, même si toutes ces fêtes tombent avec un vendredi, on fait la prière de la fin du jeûne du Ramadan ou de la Tabaski le matin, vers 9h et dans l'après-midi, il faudra encore aller prier à la Mosquée. Il en est de même de la fête du Mouloud; par exemple, à l'issue de la célébration du Mouloud qui tombe cette année avec le vendredi, on ira à 13h 50 prier à la Mosquée. Seulement à l'occasion du Mouloud, il n'y a pas de prière spéciale comme pour les autres fêtes. Pour le Mouloud, la veillée pendant laquelle on évoque les principaux événements de la vie du prophète constitue le seul fait marquant. Le lendemain (jour même de la fête) il n'y a pas de célébration particulière. Pour le Ramadan et la Tabaski, si ces fêtes coincident avec un vendredi, il faut faire la prière le matin et puis aller célébrer à 13h ou 14h, la prière traditionnelle du vendredi.
C'est ce cumul de célébrations qui fait craindre pour la santé de l'Imam - qui est généralement quelqu'un d'âgé. Ainsi, les gens disent comme cela leur plaît qu'il meurt automatiquement, si jamais la fête coincide avec un vendredi; il n'y a aucun danger. C'est de la pure superstition que de croire à ça.
QUELQUES TRAITS CARACTERISTIQUES DE LA VIE DU PROPHETE
Il est de la famille des Koraïchites, une des plus anciennes familles de la MECQUE. C'est cette famille qui avait mission d'administrer la Sainte Mosquée de la ”CABA”, c'est-à-dire la Mosquée où on va accomplir le Pélérinage à la MECQUE. Le gardienage de cette mosquée était encore au VIè et VIIè siècle à la charge de la famille du prophète Mahommet. C'est donc une des familles respectables de la MECQUE. C'est dans cette famille qu'est né le prophète Mahommet le lundi 12 RABI-LAWAL, 3è mois de l'année lunaire, l'an 1570 ou 1571. Son père s'appelait ABDALLAH BOUN MOUTALIP c'est-à-dire ABDALLAH, fils de M0UTALIP, et sa mère AMINA BEN (qui veut dire fille) OUAHAB BEN MOUNABAH. On dit que la prophétie du prophète Mahommet a été annoncée dès cette époque parce que son père ABDALLAH était un bel homme, le plus beau de son temps avec un visage illuminé par la lumière divine. Sa mère AMINA était également la plus belle de son temps. Et quand ces deux conjoints se sont mariés, on disait que c'est la lumière (NOUR) du prophète qui rayonnait en eux. La naissance du prophète va donc être marquée par des événements miraculeux que la tradition a pu rapportés. Ainsi, les sources se sont asséchées, un feu qui brûlait continuellement s'est éteint et une source s'est allumée à sa place. Lorsque l'esclave alla annoncer la nouvelle à son Maître (Père du Prophète, ABDALLAH, ce dernier ordonna aussitôt dans la joie, la libération de tous les prisonniers. A 1' âge de 12 ans, le prophète Mahommet perd ses parents et son éducation sera assurée par son oncle, un autre des fils d'ABDOUL MOUTALIP qui s'appelle ABOU TALIP, le père de son cousin ALI. Un épisode important: quand l'enfant prophète avait l'âge de 4 à 5 ans, jusqu'à l'âge d'adolescent il était berger. Il va accompagner son oncle et d'autres caravaniers dans le désert. A l'époque, l'ARABIE SAOUDITE commerçait avec la SYRIE, l'EGYPTE et des caravanes étaient régulièrement organisées entre la MECQUE et ces régions. Mahommet participe donc à une de ces randonnées et en route, ils descendent chez un Moine Chrétien ; on dit que pendant tout le voyage, un nuage épais planait au-dessus du cortège où se trouvait Mahommet pour lui faire de l'ombre. Le Moine qui avait lu ça dans ses livres saints, lorsqu'il voit avancer la caravane, auréolée par l'ombre du nuage il s'est tout de suite dit : ”Le Prophète annoncé est certainement dans ce groupe”. Et quand ces voyageurs sont venus s'arrêter sous un arbre pour prendre leur repos, il organise tout de suite un banquet auquel il convia tout le groupe. Tout le monde s'y rendit alors en laissant Mahommet pour garder les bagages. Et le Moine de demander : ”Est-ce que tout le monde est dans ma maison ? Je vous ai tous invités; même s'il est resté un chien derrière vous, faites-le venir, je veux que tous, vous soyez mes hôtes”. On est donc allé chercher Mahommet qui rejoignit le groupe.
C'est alors que le Moine demanda : "De qui est cet enfant ?”. On lui dit que son père s'appelait ABDALLAH BOUN MOUTALIP ; et sa mère AMINA BENT OUAHAB. Il reconnut tout de suite donc le prophète annoncé. Il demanda alors la permission de s'approcher de l'Enfant et de lui parler. Sur son épaule il découvrit, imprimé entre ses deux omoplates le signe de la prophétie, sous la forme d'un oeuf de pigeon et il a baisé cette place avant d'annoncer aux voyageurs de ramener cet Enfant vite vers ses parents. Si on l'amène dans le pays des YAHOUDS (Juifs-israélites) qui savaient qu'il devait naître un prophète et qu'il n'est pas né dans le peuple des YAHOUDS, ils pourraient, par jalousie lui faire du mal.
Plus tard, quand il aura l'âge d'un adulte, on va le confier à une riche veuve nommée KADIDJA qui va en faire son caravanier et comme le prophète est un homme exceptionnel, il excellait en tout et sera un caravanier exceptionnel, un commerçant exceptionnel. La veuve se prend d'affection pour lui et lui confie tout son bien et le nomme intendant général de ses biens. Ses richesses n'ont fait qu'augmenter parce que Mahommet avait de la chance, c'était un commerçant qui avait du flair et il a réussi à faire prospérer les affaires de KADIDJA. En guise de reconnaissance, KADIDJA décide de l'épouser alors que Mohammet avait 35 ans.
Il faut souligner aussi qu'au cours de la veillée, on a évoqué la visite de l'Ange DJIBRIL au prophète dans la grotte où il passait son temps à prier, méditer, se recueillir en un mot.
On explique qu'un jour, alors qu'il se trouvait dans cette grotte de IRA dans la région de la MECQUE, le prophète reçut la visite de l'Ange qui luit dit : "IKRA", qui veut dire lis. Et le prophète de répondre: "Je ne sais pas lire". L'Ange répéta plusieurs fois et Mahommet lui répondit toujours la même chose. C'est alors que l'Ange le prit et le serra fort contre lui avant de le relâcher pour lui ordonner une fois encore de lire. Le prophète Mahommet dit alors "IKRA MARABIKA”, et se mit donc à réciter le récit que l'Ange lui a inspiré par ordre de DIEU. Il prononce le nom de son créateur ALLAH qui a créé l'homme d'un caillot de sang; l'Ange le bénit et il se déclara aux ordres de son Créateur, prêt à exécuter. Ces versets furent ensuite enseignés aux adeptes qui les transcriront sur du bois, des cailloux et autres. Ils furent: plu-tard rassemblés et constitueront désormais le CORAN. Au début, chaque fois qu'il rentrait de la grotte, il tremblait de froid, de fièvre... Il demandait à sa femme de le protéger. Sa femme finit par aller voir un savant du nom d'IBN NAUPHAL, qui était au courant de la venue du prophète et qui lui dit : ''Lorsque ton mari rentrera de la grotte et tremblera de peur, de froid, de fièvre... tu te découvres (enlever le voile de sa tête); s'il s'agit d'un démont il ne le quittera pas; mais si c'est un Ange il s'enfuira. Le soir venu, le prophète rentra de la grotte et commença à tremblotter. Sa femme KADIDJA se dévoila et puis l'Ange qui est pudique a fui. Ils surent donc que c'était un Ange qui suivait le prophète.
La vie du prophète Mahommet, selon notre interlocuteur n'a pas connu de paix à un certain moment. Ainsi, dès que les gens sont devenus jaloux de lui à cause de sa prophétie, de sa clairvoyance, de sa bonté, bref de tous ses actes humanitaires, dut faire face à des ennemis parmi lesquels il comptait un oncle à lui. Comme le dit l'adage, nul n'est vraiment prophète chez lui. Bien qu'ils aient de l'estime pour lui à sa jeunesse, on l'appelait SL AMINE, c'est à dire celui en qui on peut faire confiance, il fut par la suite persécuté. C'est ainsi, que Mahommet fut pourchassé par les ennemis dont le Diable était le guide. Pendant la nuit, on mijota un plan pour l'assassiner. Alors l'Ange avertit Mahommet qui laissa à sa place - pendant la nuit - son cousin ALI et endormit tous les ennemis y compris le diable. Il réussit à s'échapper pour se réfugier dans la grotte où il avait l'habitude d'aller prier. Lorsque les poursuivants arrivèrent, ils trouvèrent à l'entrée de la grotte une toile d'araignée des oeufs et un arbuste. Alors ils déclareront qu'il ne peut être à l'intérieur de celle-ci. Autre épisode commenté au cours de la veillée, il concerne les femmes du prophète. On sait que Mahommet avait plusieurs femmes. Mais pour lui, c'était pour des raisons politiques. En effet lorsqu'il conquérait une région, on lui donnait une fille de la région pour femme. Pendant qu'il avait à lui plusieurs femmes il déconseilla à ses disciples d'en avoir au maximum quatre.
Voici donc les faits qui ont marqué dans les principaux lieux de prière, la célébration de l'anniversaire de la naissance du Prophète Mahommet et qu'on a lus et commentés au cours de la veillée.
Cette histoire nous a été racontée par M. Yaya GNESSIEN, Directeur Général de la Radiodiffusion.
Interview recueillie par
J.S. Salvador
L'Observateur
Frédérick Madore
