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Femmes, faits et droit. Sida, islam et polygamie : "Une mauvaise compréhension des textes islamiques"
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- Title
- Femmes, faits et droit. Sida, islam et polygamie : "Une mauvaise compréhension des textes islamiques"
- Creator
- Hortense Zida
- Publisher
- Sidwaya
- Date
- August 24, 2000
- Abstract
- La polygamie n'est pas une pratique exclusivement islamique. Elle n'est pas non plus un facteur de propagation du SIDA; seul est en cause le vagabondage sexuel. C'est un point de vue que défend El hadj Sakandé Adama, imam de la mosquée de l'Association des étudiants et élèves musulmans du Burkina et membre du CERFI. L'homme regrette que les leaders religieux n'aient pas été associés à la lutte contre l'infection à VIH/SIDA, d'où selon lui l'échec du travail qui a été mené depuis plus d'une dizaine d'années. Lisons plutôt.
- Subject
- Adama Sakandé
- Femme en islam
- Association des Élèves et Étudiants Musulmans au Burkina
- Cercle d'Études, de Recherches et de Formation Islamiques
- Language
- Français
- Contributor
- Frédérick Madore
- Identifier
- iwac-article-0002971
- content
-
La polygamie n'est pas une pratique exclusivement islamique. Elle n'est pas non plus un facteur de propagation du SIDA; seul est en cause le vagabondage sexuel. C'est un point de vue que défend El hadj Sakandé Adama, imam de la mosquée de l'Association des étudiants et élèves musulmans du Burkina et membre du CERFI. L'homme regrette que les leaders religieux n'aient pas été associés à la lutte contre l'infection à VIH/SIDA, d'où selon lui l'échec du travail qui a été mené depuis plus d'une dizaine d'années. Lisons plutôt.
Sidwaya (S. ): L'islam, la polygamie et l'infection au VIH/SIDA. Ces trois questions se rejoignent souvent quand on évoque la pandémie. Qu'en pensez-vous?
Sakandé Adama (S. A. ): Je voudrais d'abord éclairer un point. Je pense qu'il est surtout question ici d'une mauvaise compréhension des textes islamiques. La polygamie est connue dans toutes les sociétés anciennes. La polygamie est antérieure à l'islam. En Arabie, en Afrique ou ailleurs, l'homme pouvait épouser autant de femmes qu'il voulait. L'islam ayant trouvé ces pratiques, a jugé bon de les organiser. Le verset coranique dit clairement: il vous est permis d'épouser une, deux, trois, quatre femmes, à condition que vous soyez équitable envers elles. Si vous craignez de ne pas être équitable, prenez une seule femme. Il n'a pas dit “si vous n'êtes pas équitable", mais plutôt “si vous craignez de ne pas être équitable". Ca veut dire que lorsqu'un homme ne se sent pas à mesure de traiter équitablement de nombreuses épouses, s'il ne se sent pas capable de les satisfaire matériellement, sentimentalement, il n'a pas à en épouser plus d'une. D'ailleurs, le prophète a prévenu tout homme qui brimerait une de ses épouses que le jour du jugement dernier il lui sera infligé un châtiment. C'est donc dire combien il est dangereux d'épouser plusieurs femmes et de ne pas s'en occuper avec équité.
Le deuxième aspect que je voudrais aborder c'est le lien que l'on établit entre polygamie et infection au VIH/SIDA. Personnellement je ne pense pas qu'elle soit facteur de propagation du SIDA. J'ai eu l'occasion d'observer les statistiques sur le SIDA et j'ai pu remarquer que c'est dans le monde musulman (pays musulmans) qu'il y a moins de personnes touchées par la maladie. Pourtant on y pratique la polygamie. Je pense que ce qui est en cause, c'est le vagabondage sexuel. En islam on dit qu'il ne doit pas y avoir de rapports sexuels entre un homme et une femme en dehors des liens du mariage. Le verset dit, à propos de l'adultère et de la fornication, qu'il ne faut pas s'approcher de la fornication. C'est très important. Si tout ça est respecté cela veut dire qu'on met fin au vagabondage sexuel.
S.: Vous semblez oublier que nous sommes dans un contexte où ces préceptes ne sont pas respectés! Que faire alors?
S. A.: Si la polygamie veut dire qu'un homme épouse plus d'une femme, selon les principes, cet homme doit respecter les engagements qu'il a pris avec ces femmes. Je vous demande à mon tour ce qui empêche la société d'observer ces valeurs religieuses? Toutes les religions que nous connaissons dans notre pays ont interdit la fornication. Et nous, nous tolérons la chose en disant “c'est notre temps”. Nous accusons faussement le temps alors que tout est en nous et pas dans le temps. J'ai lu dans un numéro de Sidwaya où quelqu'un a parlé du SIDA aux Etats-Unis. Il dit que quand le SIDA a éclaté dans ce pays un pourcentage élevé des Américains a commencé à prêter serment de fidélité entre amis. Pourquoi nous n'encourageons pas par exemple ce comportement chez nous? Nous nous mettons à conseiller tout azimut le port du condom pour se protéger. Le retour aux valeurs religieuses peut aider la société à vaincre le SIDA.
S.: Si les chiffres du SIDA avancent, c'est que les religieux n'ont pas pu s'intégrer à la lutte?
S. A.: J'ai fait un constat personnel, les religieux ne sont pas associés à la lutte contre la propagation du SIDA. Il y a plus d'une dizaine d'années des campagnes ont été menées. Et depuis, la méthode utilisée consiste en des spots publicitaires, des séminaires d'information et des pièces de théâtre. Ni les pasteurs, ni les prêtres, ni les imams n'ont été impliqués dans les différentes stratégies de lutte. Pourtant, ils constituent des éducateurs dans la société. Leur rôle est de préserver la société de certains fléaux. Si on avait impliqué tous ces leaders religieux, on aurait déjà fait des progrès importants. Personne n'est épargné par cette maladie, et on écarte les leaders religieux tout en faisant passer des spots qui encouragent plus le vagabondage sexuel. Résultat, le Burkina qui était à un taux de 3 à 4% se retrouve à 7 à 8%. Ca veut dire qu'il y a un échec dans le travail qui a été fait. Nous sommes des êtres humains que Dieu a doté d'une intelligence. Nous devrions nous arrêter pour revoir les méthodes de travail.
S.: Qu'auriez-vous proposé si vous leaders religieux vous aviez été impliqués?
S. A.: Au niveau des religieux nous avons plusieurs cadres, plusieurs tribunes qui nous donnent la possibilité de nous adresser à la masse. Il faudra admettre quand-même que le message religieux est beaucoup plus réceptif. Les religieux constituent jusqu'à présent les derniers recours dans la société quand on a tout tenté sans résultat. Si un imam fait son sermon de vendredi et s'adresse aux fidèles sur les modes de transmission du SIDA, sur les dangers qu'il constitue pour la société, je pense que les uns et les autres réfléchiront beaucoup. Les fidèles mêmes se convaincront que le phénomène a atteint un seuil inquiétant, au point de susciter la réaction même au niveau de la religion. Le crédit dont bénéficient les leaders religieux peut amener les gens à prendre conscience. Prenez l'exemple du Sénégal où les marabouts ont été associés et vous verrez que le Sénégal n'a pas le même taux d'infection que le Burkina.
S.: L'islam condamne le port du condom, qui est jusque-là le seul moyen pour se protéger contre le SIDA. N'est-ce pas anachronique au point où nous en sommes?
S. M.: Je n'ai pas bien compris cette attitude qui a consisté à encourager le port du condom. J'ai pu lire quelque part que le condom a été inventé vers le 17e et 18e siècle avec pour objectif la limitation et l'espacement des naissances, d'éviter les grossesses indésirées. Aujourd'hui il est exhibé comme moyen de protection contre le SIDA. Mais on oublie de dire aux gens que le taux de réussite n'est pas de 100%. Ensuite, il a été démontré que les capotes qui viennent chez nous ne sont pas efficaces. La preuve c'est que les condoms sont achetés comme des cacahuettes et le SIDA ne fait que gagner du terrain. Nous, religieux nous n'encourageons pas l'utilisation de la capote pour le vagabondage sexuel. S'il s'agit de protéger le mari quand c'est la femme qui est atteinte, ou de protéger la femme quand c'est le mari qui est atteint le religieux ne s'oppose pas. Nous disons que ça doit se passer dans le cadre du mariage. Notre message essentiel reste “fidélité, abstinence". Nous pensons qu'il faut insister sur ce message comme on le fait pour le port de la capote et on aura de bons résultats.
Propos recueillis par Hortense ZIDA
Avec l'appui de PRB et de l'Institut Panos