id 46398 Url https://islam.zmo.de/s/afrique_ouest/item/46398 Modèle de ressource Newspaper article Classe de ressource bibo:Article Titre La Laïcité de l'Etat entre sens et contre sens en Côte d'Ivoire Créateur https://islam.zmo.de/s/afrique_ouest/item/46313 Sujet https://islam.zmo.de/s/afrique_ouest/item/5 https://islam.zmo.de/s/afrique_ouest/item/8 https://islam.zmo.de/s/afrique_ouest/item/945 Editeur https://islam.zmo.de/s/afrique_ouest/item-set/45390 Contributeur https://islam.zmo.de/s/afrique_ouest/item/858 Date 2001-10-22 Identifiant iwac-article-0006605 Langue https://islam.zmo.de/s/afrique_ouest/item/8355 Droits In Copyright - Educational Use Permitted Résumé C'est sur la base de cette lecture politique de notre histoire que les Musulmans exigent aujourd'hui, la laïcité de l'Etat. Mais dans le même temps, et peut-être ceci explique cela, ils ont préconisé, non sans passion, entre autres mesures de rééquilibrage, la libéralisation du régime matrimonial, c'est-à-dire le retour à la polygamie. A la vérité, cette passion donne la mesure d'une rancoeur au minimum séculaire, et permet de comprendre, rétrospectivement, pourquoi après le 24 décembre 1999, certains Imams promettaient à leurs fidèles, qu'ils ne toléreraient plus de "CAFRIS" ou de "DROMINAn" à la tête de l'Etat ivoirien. Couverture spatiale https://islam.zmo.de/s/afrique_ouest/item/277 https://islam.zmo.de/s/afrique_ouest/item/312 https://islam.zmo.de/s/afrique_ouest/item/357 https://islam.zmo.de/s/afrique_ouest/item/395 https://islam.zmo.de/s/afrique_ouest/item/409 https://islam.zmo.de/s/afrique_ouest/item/414 https://islam.zmo.de/s/afrique_ouest/item/539 https://islam.zmo.de/s/afrique_ouest/item/540 Contenu C'est sur la base de cette lecture politique de notre histoire que les Musulmans exigent aujourd'hui, la laïcité de l'Etat. Mais dans le même temps, et peut-être ceci explique cela, ils ont préconisé, non sans passion, entre autres mesures de rééquilibrage, la libéralisation du régime matrimonial, c'est-à-dire le retour à la polygamie. A la vérité, cette passion donne la mesure d'une rancoeur au minimum séculaire, et permet de comprendre, rétrospectivement, pourquoi après le 24 décembre 1999, certains Imams promettaient à leurs fidèles, qu'ils ne toléreraient plus de "CAFRIS" ou de "DROMINAn" à la tête de l'Etat ivoirien. On s'explique plus aisément les évènements et les motivations profondes amenant un grand nombre d'Imams à s'immiscer publiquement dans le débat et la lutte politiques. Est-ce au nom de la laïcité de l'Etat ? Mais de quoi parle-t-on précisément lorsqu'on évoque le mot laïcité ? Quel en est le fondement ? Le principe en-est-il respecté dans notre pays ? Il faut savoir que la laïcité de l'Etat est un principe républicain qui sépare le spirituel du temporel, interdisant, par exemple à l'Imam ou à l'Evêque, d'agir à la place du Préfet ou du Leader politique régional, pour autant que la République ne doit pas "faire du Souverain un lieutenant de Dieu sur terre". D'où l'impérieuse nécessité de "rendre à César ce qui est à César, et à Dieu ce qui est à Dieu ". Sinon, les préjugés religieux et politiques ainsi amalgamés entraînent la tyrannie (Barouch Spinoza). La laïcité est une réponse historique aux drames culturels, économiques et socio-politiques engendrés par la collusion du spirituel et du temporel. En effet, à la faveur de la liberté de conscience et de culte, acquise de haute lutte, l'autorité a progressivement changé de camp, passant du Souverain au Peuple (= laïos, demos), grâce à un contrat social consacré par la Révolution sociale de 1789, mais qui n'a connu un début de mise en oeuvre qu'au 19ème siècle en Europe, notamment en France, sous Jules Ferry qui reprenait à son compte les idées de Condorcet. Il y a laïcité lorsque l'Imam et l'Evêque ne sont pas des leaders politiques ; lorsqu'ils n'incitent pas leurs fidèles à la violence et à l'insurrection, transformant l'église ou la mosquée en une tribune politique ; il y a laïcité lorsque l'Imam et l'Evêque ne prennent faits et cause pour un leader politique ou un autre dans le cadre de leur culte et inversement ; il y a laïcité lorsque toutes les religions sont juridiquement mises à égalité. Enfin, il y a laïcité lorsque l'instruction publique relève des pouvoirs publics plutôt que de l'église, de la mosquée ou du bois sacré. C'est ce que caractérise Maurice Agulhon en ces termes : "En situation confessionnelle, la loi ne peut être qu'un dénominateur commun accessible à tous, la raison". Ceci rejoint les prises de position laïque de Victor Hugo : "Je ne veux pas qu'une chaire envahisse l'autre ; je ne veux pas mêler le Prêtre au Professeur. Ou je consens à ce mélange, moi législateur, je le surveille, j'ouvre sur les séminaires et les congrégations, l'oeil de l'Etat, et j'y insiste de l'Etat laïc, jaloux uniquement de sa grandeur et de son unité ". A l'évidence, la laïcité s'oppose à l'enfermement de l'individu/du groupe dans ses convictions, c'est-à-dire dans sa prison religieuse et politique de certitudes. De là, suit la phrase de St Exupéry passée désormais dans l'adage : " Si tu diffères de moi, frère, tu m'enrichis ". La laïcité oxygène par conséquent tous les territoires de l'esprit en permettant le libre examen d'explorer tous les domaines de la connaissance sans être prisonnier de chaque espace de la connaissance ; de croire ou de ne pas croire. Brisant les chaînes mentales érigées par l'ignorance et l'intolérance, la laïcité libère l'individu de la société. Qu'en est-il de la laïcité en Côte d'Ivoire, ancienne colonie française ayant pour langue d'administration le français ? Le principe de la laïcité y est respecté et cela est perceptible à plusieurs niveaux : - l'école ivoirienne est laïque car l'instruction publique se donne en français, langue d'administration ; - la religion ne s'enseigne pas à l'école au terme de la loi du 9 décembre 1905 ; - les services publics de l'Etat ne portent aucune marque de caractère religieux en Côte d'Ivoire ; - les confessions religieuses enseignent librement leur dogme et leur morale dans des établissements librement créés à cet effet. Mais la laïcité demeure une construction permanente. C'est pourquoi en 1993, le Front Populaire Ivoirien a demandé et obtenu une représentation diplomatique de notre pays en Arabie Saoudite, à l'effet de sécuriser les fidèles musulmans à Djedda, comme le sont à Rome les chrétiens ivoiriens. Mais, au nom de la laïcité, que n'observe-t-on pas aujourd'hui ? On affirme, par ignorance (El Hadj FOFANA), par mauvaise foi, des contre-vérités sur l'histoire des religions en Côte d'Ivoire. C'est dans cet esprit malveillant que certains Imams en Côte d'Ivoire tordent le cou au Coran pour lui faire dire ce qu'il n'a jamais dit, devenant parfois plus royalistes que le Roi, plus intégristes que les Imams de pays musulmans africains (Sénégal, Mauritanie, Mali, Niger, Soudan, Somalie, etc.) et arabes. Allonger par exemple la liste des fêtes républicaines, ou créer un calendrier républicain d'inspiration islamique dans une République laïque comme la Côte d'Ivoire, par souci de vengeance, par un anti-occidentalisme de type passéiste ou manichéen, ou encore par souci de rattraper l'histoire des croisades et autres guerres de religion. La Côte d'Ivoire s'interdit toute croisade et toute guerre de religion en ce début du 21ème siècle. Car elle sait ce que laïcité veut dire et ce qu'elle n'est pas. Voilà pourquoi elle invite les uns et les autres à s'informer afin de ne pas s'engager dans des récriminations infondées et incendiaires. Houphouët BOIGNY a bâti aussi bien des temples, des églises que des mosquées ; contrairement à ce qu'on affirme, le samedi, début du week-end universel, n'est pas une fête catholique qui aurait été imposée aux Musulmans ivoiriens. C'est une fête judaïque, laïcisée et acceptée dans le monde entier par tous les pays modernes, y compris un grand nombre de pays africains comme le Sénégal à 93 % musulman, le Niger (98%), où les députés ont pris du recul par rapport à l'électorat à la solde des Imams ; le Mali (95%), où le nouveau régime a refusé de croire que la sécheresse sahélienne avait pour cause l'ouverture des bars et autres débits de boissons pendant le Ramadan. Au Sénégal, on n'observe pas la fête du Maouloud. Plus significatif, le vendredi n'est même pas férié dans ces pays. Contrairement à ce qu'on avance, l'Etat de Côte d'Ivoire ne paie pas de salaire aux membres du Clergé chrétien, pas plus qu'il ne subventionne leurs pèlerinages à Rome et à Jérusalem. Cependant, il subventionne les écoles privées y compris les établissements confessionnels dont la langue d'enseignement est le français et qui observent l'instruction publique ; toutes les confessions religieuses ont un égal droit d'antenne à la radio et à la télévision. De ce qui précède, peut-on vraiment soutenir que l'Islam est marginalisé en Côte d'Ivoire ? Ceux qui l'affirment ne le font que par souci de raccourci qui consiste à raviver la corde sensible ethnoreligieuse. En conclusion, la laïcité est une valeur universelle qui s'applique en Côte d'Ivoire, pays multiethnique et multiculturel ayant pour langue officielle le français. Mais, au nom de ce principe, il serait dangereux de vouloir refaire l'histoire par ignorance, par intégrisme ou par mauvaise foi, en revendiquant des valeurs ou des pratiques telles que la polygamie, la Fatoa, la Djiad, la Charia. Le Forum aura permis de démasquer ce qui, sous le couvert du Coran, servait en réalité d'explosifs politiques. --