id 2737 Url https://islam.zmo.de/s/afrique_ouest/item/2737 Modèle de ressource Newspaper article Classe de ressource bibo:Article Titre Ramadan : cette année, le sucre aura un goût amer Créateur https://islam.zmo.de/s/afrique_ouest/item/1155 Sujet https://islam.zmo.de/s/afrique_ouest/item/960 Editeur https://islam.zmo.de/s/afrique_ouest/item-set/2214 Contributeur https://islam.zmo.de/s/afrique_ouest/item/858 Date 2009-08-20 Identifiant iwac-article-0000507 Langue https://islam.zmo.de/s/afrique_ouest/item/8355 Droits In Copyright - Educational Use Permitted Résumé Le ramadan est là. Une période de grande piété et de sacrifice de soi. Paradoxalement, c'est pendant cette période qu'on connaît au Burkina un renchérissement de certains produits de première nécessité. Quelles différences avec certains pays comme le Niger où l'Etat, en complicité avec les opérateurs économiques nationaux, ont signé une convention pour revoir à la baisse le prix de ces marchandises ! Nous avons, pour cela, fait le tour de la ville de Ouagadougou, le mardi 18 août 2009, et notre constat est édifiant : pour beaucoup de commerçants, c'est une course effrenée vers la recherche de gain. Couverture spatiale https://islam.zmo.de/s/afrique_ouest/item/279 https://islam.zmo.de/s/afrique_ouest/item/376 Contenu Le ramadan est là. Une période de grande piété et de sacrifice de soi. Paradoxalement, c'est pendant cette période qu'on connaît au Burkina un renchérissement de certains produits de première nécessité. Quelles différences avec certains pays comme le Niger où l'Etat, en complicité avec les opérateurs économiques nationaux, ont signé une convention pour revoir à la baisse le prix de ces marchandises ! Nous avons, pour cela, fait le tour de la ville de Ouagadougou, le mardi 18 août 2009, et notre constat est édifiant : pour beaucoup de commerçants, c'est une course effrenée vers la recherche de gain. En attendant la confirmation de la Commission d'observation de la lune qui a siégé depuis hier, jeudi 20 août, c'est en principe ce week-end que débute sur l'ensemble du territoire national le jeûne musulman. Appelé encore ramadan, ce mois lunaire de 29 ou 30 jours est une période au cours de laquelle tout musulman doit cultiver un certain nombre de valeurs qui sont le pardon, la solidarité et le partage. C'est également un moment d'abstinence. Le fidèle devra se démarquer des regards suspects, des propos malveillants et se priver de nourriture pendant un temps bien déterminé ; bref, il doit se départir de tout comportement allant à l'encontre des prescriptions du Saint Coran. Le mois de ramadan, c'est aussi une période de grande consommation alimentaire, notamment le riz, la bouillie, les fruits, les dattes, les jus et surtout le sucre. Parlant de cette dernière denrée, c'est le moment propice pour certains grossistes, comme Tidjani Sawadogo, dont le commerce est implanté non loin de la grande mosquée de Ouagadougou, de s'approvisionner parce qu'il y a de bonnes affaires à faire durant ce mois lunaire. Mais comme on a l'habitude de le dire, le malheur des uns fait le bonheur des autres. A ce sujet, quelques jours avant que nous ne fassions ce reportage, nous sommes tombés sur une conversation entre deux personnes sur la hausse du prix du sucre. Et l'un d'eux de demander à son ami : « Comment allons-nous faire avec l'augmentation du prix du sucre ? ». En effet, depuis un certain temps, les rumeurs courent que le prix du sucre connaît une flambée. Pis, cette denrée se fait rare dans les grands magasins de la capitale. Pour s'en convaincre, notre équipe s'est rendue dans la matinée du mardi 18 août dans quelques lieux de vente de ce saccharose. « Y a pas sucre » Notre premier point de chute est le secteur 10 (Larlé). Un constat général nous fait remarquer l'absence de sucre dans la plupart des magasins que nous avons visités. En nous renseignant sur cet état de fait, la principale réponse qui nous est lancée est : « y a pas sucre » ; et pourquoi ? silence radio. A Sankariaré, scénario presque identique à l'exception d'une oreille attentive qui a bien voulu répondre à nos questions. Ousmane Dera, puisque c'est de lui qu'il s'agit, est grossiste. Dans son magasin on vend du sucre bien évidemment, mais aussi du riz. Il attend toujours sa commande ; « Mon camion est parti pour Banfora pour me ramener du sucre voilà 4 jours et il n'est toujours pas de retour », se plaint-il. Moustapha Zongo, détaillant, est dans le désarroi : « Les grossistes auprès de qui j'ai l'habitude de m'approvisionner n'ont pas de sucre. Le plus grave, c'est qu'ils ne me donnent pas d'explication convaincante. Peut-être que la SOSUCO a des problèmes », déclare-t-il. A en croire ce dernier, l'unité sucrière de Bérégadougou aurait de sérieux problèmes. La preuve, dans une déclaration des organisations syndicales de la Comoé parue dans notre édition du mardi 18 août dernier, « le champ et l'usine ont tous deux des difficultés à sortir 30 000 tonnes de sucre, vu la vétusté du matériel, alors que les besoins nationaux sont estimés à 50 000 tonnes ». Les commerçants qui ont accepté de s'ouvrir à nous ne sont pas allés du dos de la cuillère. Tous sont unanimes que le prix du sucre a connu une hausse. Tenez-vous bien ! « Le kilogramme du sucre granulé s'achète actuellement à 500 F CFA au lieu de 450 F CFA et le paquet du sucre en carreaux à 650 F CFA au lieu de 600 F CFA, il y a environ un mois », nous confie un détaillant qui a préféré garder l'anonymat. Et son voisin d'en face d'ajouter : « Nous achetions le sac de sucre de 50 kg à 21 000 F CFA. Aujourd'hui, il tourne autour de 24 000 F CFA ». Dans notre tournée, nous sommes tombés sur un déchargement de sucre à proximité de la grande mosquée de Ouagadougou. Au cours des échanges avec le responsable de la marchandise, un grossiste, il nous confie qu'il achète la tonne de sucre à 600 000 F CFA. Pour avoir une idée claire sur la question du sucre, nous sommes entrés en contact avec la source d'approvisionnement à Bérégadougou (SN-SOSUCO). 370 000 F CFA la tonne Nous avons joint par téléphone le responsable du service commercial de la SN-SOSUCO, Sékou Oumar Bamba. C'est avec bon cÅ"ur qu'il s'est prêté à nos questions (lire encadré). Le responsable commercial est catégorique : « Il n'y a pas de pénurie de sucre dans la mesure où nous disposons d'un stock très important... Il y a deux ans, nos granulés se vendaient à 440 000 F CFA la tonne et il y a un an déjà, nous avons ramené le prix du sucre à 370 000 F CFA la tonne. Jusqu'à l'heure actuelle, nous n'avons pas ajouté le moindre centime sur le prix du sucre ». Si quelqu'un doit payer les « pots cassés » de cette flambée des prix du sucre, c'est assurément le consommateur, particulièrement le fidèle musulman qui, en ce mois béni de ramadan, devra débourser un peu plus pour s'acheter le sucre. Quelques fidèles que nous avons rencontrés ne cachent pas leur amertume face à cette hausse des prix. « Si l'augmentation des prix de cette denrée a une justification, nous n'en disconvenons pas. Mais aucun motif ne justifie cette augmentation ; nous demandons alors aux commerçants de ne pas se prêter à ce jeu », avertit l'Imam El hadj Aboubacar Karamenta, membre de la communauté musulmane du Burkina. Ce qui est clair, c'est que ce sont les commerçants qui créent cette pénurie pour des intérêts égoïstes alors que la tendance dans les pays voisins est de baisser les prix en cette période bénie, comme c'est le cas au Niger. Pour El hadj Boubacar Koanda, le problème de la hausse des prix se trouve du côté des pouvoirs publics. « Il faut que les autorités essaient de baisser les taxes », dit-il. A coté de ces personnes, cette crise du sucre est aussi ressentie chez les vendeuses de jus : gingembre, bissap, zom-koom, dèguè... Kady Sanogo fait partie de ce lot. Elle a saisi l'occasion pour déverser sa colère sur ses fournisseurs. « Ces gens-là ont une pierre à la place du cÅ"ur. En l'espace d'une semaine, ils ont fait grimper le prix du sucre. Ils veulent que nous arrêtions de vendre, mais nous ne céderons pas », a-t-elle fustigé. Ainsi, cette année, le sucre aura un goût amer, comme nous l'annoncions en titre. Cette situation interpelle une fois de plus les autorités à avoir un Å"il sur le prix des denrées de première nécessité. Que Dieu bénisse le Burkina ! Paténéma Oumar Ouédraogo (collaborateur) El hadj Adama Sakandé "En islam, je pense qu'il y a un seuil qu'il ne faut pas dépasser dans la recherche du bénéfice" Nous avons rencontré le 1er vice-président de la communauté musulmane du Burkina Faso, El hadj Adama Sakandé. Il nous livre, ici, les raisons de la consommation du sucre pendant le ramadan. Il donne également son avis sur la hausse du prix de cet aliment. Le sucre est beaucoup plus consommé pendant le mois du ramadan ; pouvez-vous nous donner la raison ? Le jeûne est une épreuve qui demande beaucoup de sacrifice de soi-même. Parce qu'il faut s'abstenir de boire et de manger, depuis l'aube jusqu'au coucher du soleil. C'est une épreuve difficile. L'être humain en observant ce jeûne s'affaiblit physiquement et n'arrive plus à avoir assez de calories pour tenir jusqu'au soir. C'est pourquoi dans les "Hadice" et dans la tradition islamique, il est recommandé qu'à la rupture du jeûne l'on prenne quelque chose de sucré. Le prophète Mahomet, paix et salut soient sur lui, a recommandé aux jeûneurs de prendre quelques dattes. Vous savez que ce sont des fruits qui contiennent beaucoup de sucre. Les médecins aujourd'hui ont prouvé à travers des analyses que ce sucre contenu dans les dattes aide l'organisme à se préparer et à faire face à la nouvelle ration alimentaire que le fidèle consommera après la rupture de son jeûne. Dans notre tradition et dans nos pays africains particulièrement, nous n'avons pas de dattes. Et en lieu et place des dattes, ce sont les boissons sucrés qui sont recommandées aux fidèles. Raison pour laquelle pendant le mois de ramadan, les musulmans consomment beaucoup de sucre. On l'utilise dans la préparation de boissons pour la rupture du jeûne : le jus de gingembre, de tamarin et bien d'autres. Ensuite, il est aussi recommandé qu'après avoir rompu le jeûne, on commence par un aliment léger. Chez nous, c'est surtout la bouillie que nous consommons ; c'est un aliment sucré aussi. Certains ont ironisé en disant qu'à la fin du ramadan on rencontre beaucoup de diabétiques chez les musulmans parce qu'ils consomment beaucoup de sucre. Le sucre, en tant qu'élément apportant des calories, permet avec l'oxygène de redonner la force au corps qui a été affaibli toute la journée. Nous constatons que le prix du sucre connaît une hausse en ce moment. Quelle analyse en faites-vous ? En tant que simple consommateur, mon souhait est qu'il n'y ait pas de hausse de prix ni du sucre ni d'autres produits alimentaires. S'il y a hausse de prix, cela joue sur le pouvoir d'achat de tous les consommateurs. Cela réduit les capacités d'assurer les besoins de la famille. Donc nous musulmans, nous souhaiterions que, pendant ce mois où nous consommons beaucoup de sucre, qu'il s'agisse des producteurs, des commerçants ou bien d'autres intermédiaires, ils acceptent de maintenir les prix pour ne pas pénaliser le consommateur. Augmenter le prix du sucre à la veille du mois de ramadan apparaît aux yeux de la plupart des musulmans comme une punition. Si on ne peut pas faire baisser les prix, qu'on les maintienne stables ; même si c'est pendant une période où nous avons le plus besoin de cet aliment. N'est-ce pas là une volonté manifeste des commerçants de garder leur stock de façon à faire grimper les prix ? En islam, je pense qu'il y a un seuil qu'il ne faut pas dépasser dans la recherche du bénéfice. Il ne faudrait pas que la volonté de ces commerçants soit d'exploiter de manière exorbitante les consommateurs. Si c'est le cas, ils perdront les bénéfices d'attribution qui sont accordés pendant ce mois, si ce sont des musulmans. Parce qu'aux yeux de la religion, ils seront considérés comme des gens qui empêchent d'autres musulmans d'accomplir leur pratique religieuse. Nous ne savons pas les raisons qui sont derrière cette hausse des prix, ou cette pénurie que nous constatons dans la ville de Ouagadougou particulièrement. Spéculer sur ce produit, nous pensons que c'est mal venu. Ce n'est pas le moment. En cette période de ramadan, quel appel lancez-vous à l'endroit de tous les fidèles musulmans ? Le mois de ramadan est une belle occasion qu'Allah accorde à ses fidèles musulmans. C'est un mois de repentir, de pardon, de solidarité, de fraternité, de don de soi-même et une école dans laquelle chaque fidèle doit apprendre le niveau de la souffrance. C'est aussi une occasion de se remettre en cause pour chercher à s'approcher davantage de Dieu. Le ramadan est fait pour permettre au croyant de se purifier davantage. Dieu merci, le jeûne tombe cette année, comme les années passées, sur des moments favorables (saison pluvieuse NDLR) ; nous pensons que ceux qui sont en vie doivent saisir l'occasion pour avoir les rétributions durant cette période. Le ramadan, c'est un acte discret, un acte que seul Dieu récompense, et nous souhaitons que tous les fidèles musulmans puissent tenir compte de cela. Qu'ils se conforment aux prescriptions de la religion. Jeûner, c'est s'abstenir certes, mais il faut que cette abstinence puisse être accompagnée d'un bon comportement. C'est vrai que nous sommes des humains, nous sommes faibles, mais quand une occasion comme le mois béni de ramadan vous trouve en vie, il faut en profiter pour faire le maximum d'actes de rituel, de solidarité, de rapprochement avec les autres. Ensuite, il faut profiter pour invoquer Allah pour soi-même, pour sa famille et pour sa nation ; car nous vivons dans un pays où nous avons besoin d'entente, de cohésion, de solidarité entre nous, musulmans et non-musulmans. --