Article
Dévaluation du franc CFA : les confessions religieuses solidaires des mesures prises par le gouvernement et son chef
- Titre
- Dévaluation du franc CFA : les confessions religieuses solidaires des mesures prises par le gouvernement et son chef
- Créateur
- Hubert O. Akponikpe
- Editeur
- La Nation
- Date
- 28 janvier 1994
- Résumé
- Dans le cadre des concertations qu’il a initiées tout récemment pour rendre compte de ce qui s’est passé à Dakar du 10 au 11 janvier 1994 et qui a abouti à la dépréciation de 50% du franc CFA, le chef de l’Etat, le président Nicéphore Dieudonné Soglo a rencontré hier en fin de matinée à la salle du peuple du palais de la présidence de la République à Cotonou, le corps religieux et autres représentants des cultes traditionnels de chez nous.
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- Sujet
- Edouard Balladur
- Franc CFA
- Kpodégbé Toyi Djigla
- Nicéphore Soglo
- Pluralisme religieux
- Théodore Holo
- Détenteur des droits
- La Nation
- Langue
- Français
- Source
- La Nation
- Identifiant
- iwac-article-0003625
- contenu
-
Dans le cadre des concertations qu’il a initiées tout récemment pour rendre compte de ce qui s’est passé à Dakar du 10 au 11 janvier 1994 et qui a abouti à la dépréciation de 50% du franc CFA, le chef de l’Etat, le président Nicéphore Dieudonné Soglo a rencontré hier en fin de matinée à la salle du peuple du palais de la présidence de la République à Cotonou, le corps religieux et autres représentants des cultes traditionnels de chez nous.
Ils étaient donc une bonne soixantaine de membres du clergé, de pasteurs des Eglises protestantes méthodistes, de «gbigbowiwé», de Chérubins et Séraphins, de représentants du fa-church et d’imams venus de tous les horizons de notre pays à répondre à l’invitation du chef de l’exécutif, Son Excellence Monsieur Nicéphore Soglo.
Nan Kpolidji Kpodégbé, représentante personnelle de sa Majesté Kpodégbé Toyi Djigla, 16è roi d’Allada avait également pris part à la rencontre qui, démarrée à 11 h 30 mn, n’a pris fin qu’à 15 h 25 mn.
Une dévaluation programmée depuis plusieurs années
D’entrée de jeu, le président Soglo annonça les couleurs: «il s’agira de vous dire exactement comment les choses se sont passées à Dakar et recueillir vos conseils et suggestions. A vrai dire, c’est maintenant que je me remets des effets du coup de massue que nous avons reçu dans la capitale sénégalaise. Cela a été très pénible pour tout le monde. Ce qui s’est passé à Dakar n’est pas facile à digérer. Je n’oublierai jamais ça», dira-t-il.
A en croire le président Soglo, cette dévaluation est programmée depuis plusieurs années, les Français étant fatigués de payer nos factures. Ceci est d’autant plus normal qu’ils l’ont fait pendant 46 ans. Et aujourd’hui ils se retrouvent eux-mêmes avec des millions de chômeurs sur le bras.
Mais ce qui a profondément déçu le chef de l’Etat, c’est que certaines personnes font une exploitation indécente de ce qui s’est effectivement passé à Dakar. Et cela, le président Soglo n’a pas manqué de le dire à ses hôtes.
Un tableau apocalyptique de la zone
La vérité est que, peu avant Dakar, on perdait une bagatelle d’un milliard de franc CFA par jour. Il y avait des pays qui avaient le couteau sur la gorge et qui ont dit à Dakar que si on ne dévaluait pas le CFA, ils ne sortiraient pas de la salle où se tenaient les huis clos. Le Cameroun avait dû diviser le salaire de ses travailleurs par deux, le Sénégal l’ayant amputé de 15%.
Parlant de la fameuse lettre circulaire du premier ministre français, M. Edouard Balladur, le président Soglo a dit qu’elle est sans équivoque, qu’elle présente un tableau apocalyptique de la zone franc.
A ce niveau, le chef de l’Etat fera son «mea culpa» en disant que c’est de notre faute, puisqu’on ne pouvait pas à ce point abdiquer son destin dans les mains d’autrui.
Mais le Bénin était déjà sous ajustement structurel. Pourquoi lui appliquer le même taux de 50% de dévaluation? La réponse est simple: il s’agit là d’une décision solidaire, uniforme et simultanée.
Pour le président Soglo, nous payons ce faisant, le prix de notre mauvaise gestion.
C’est sûr qu’avec cette dévaluation de 50% du franc CFA, il va y avoir des grincements de dents; «les gens vont pleurer, mais il faut bien qu’on se réveille un jour» a martelé le chef de l’Etat dans les oreilles de ses invités.
Ce qui a fait plaisir au chef de l’Etat, après son retour de Dakar, c’est qu’il a écouté un jour à la radio un sermon dans lequel on invitait les commerçants à ne pas augmenter abusivement les prix des produits suite à la dévaluation du franc CFA.
Des objectifs d’ores et déjà atteints
C’est certainement pour encourager dans cette voie les confessions religieuses qu’il les a invitées hier à prendre part à cette rencontre.
Mais d’ores et déjà, ses objectifs sont atteints parce que prélats, pasteurs, "vodounnon" et autres musulmans sont maintenant acquis à la cause du chef de l’Etat et ont promis, une fois retournés chez eux, de sensibiliser leurs adeptes et autres fidèles sur les problèmes qu’entraînera cette dévaluation.
Chacun des intervenants (et il y en a eu une vingtaine) a eu à saluer à leur juste valeur les récentes décisions prises en conseil des ministres et qui leur ont été rappelées au cours de la séance de travail par le ministre porte-parole du gouvernement chargé des Relations avec le Parlement, M. Théodore Holo et relatives à la réforme tarifaire, la stabilisation du prix des produits pétroliers et la suppression de la taxe civique.
Des suggestions pertinentes
Entre autres choses, les représentants des confessions religieuses ont eu à parler de la détérioration des termes de l’échange, ont eu à plaider pour la diminution des autres taxes et la suppression des droits d’écolage, et ont suggéré au président de la République l’organisation des meetings publics pour sensibiliser toute la population sur cette dévaluation du franc CFA. Ils ont aussi suggéré que des séances de prières soient organisées partout pour implorer la miséricorde du Tout-Puissant sur le Bénin.
D’aucuns ont même demandé au chef de l’Etat pourquoi les pays de notre sous-région, ne pouvaient pas se rassembler pour battre une monnaie commune dépendant par exemple du dollar?
C’était vraiment l’heure de vérité puisque d’aucuns, pour permettre à notre pays de pouvoir faire face dignement à la situation, ont suggéré à l’Etat de réduire son train de vie. Puisque, disent-ils, le sacrifice doit être fait à tous les niveaux et par tout le monde.
Pour ce faire, personne ne doit rester indifférent à cette question et toutes les machines devront désormais être mises en branle pour faire comprendre aux uns et aux autres la nécessité de nous réveiller.
C’était là le mot de fin des représentants des cultes et dans sa réponse, le chef de l’Etat a apaisé les inquiétudes des uns et des autres.
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