Article
Liberté religieuse : Abdou Assouma contre Koffigoh
- Titre
- Liberté religieuse : Abdou Assouma contre Koffigoh
- Type
- Article de presse
- Créateur
- Jean-Marie Laforette
- Editeur
-
Courrier du Golfe
- Date
- 9 août 1992
- Résumé
- Dans notre précédent numéro, nous avions publié une partie de cette affaire qui crée actuellement des dissensions entre le premier ministre et son ministre de l’administration territoriale. En effet, le premier ministre en tant que supérieur hiérarchique de Mr Komlanvi Yao a le devoir de confirmer ou d'infirmer les actes des autorités placées sous sa juridiction de compétence Or, qu’est-ce que nous constatons ? Nous constatons malheureusement que Yao Komlanvi ne prend pas en compte les recommandations et les instructions que lui donne Me Kokou Koffigoh.
- pages
- 7
- nombre de pages
- 1
- Sujet
- Mama Fousséni
-
Joseph Kokou Koffigoh
- Kpotivi Têvi-Djidjogbé Théodore Laclé
- Conférence nationale souveraine (Togo)
- Frédéric Ali Dermane
- Aboudou Assouma
- Loi dissolution sectes religieuses
- Laïcité
- Église évangélique du Togo
- Yao Komlavi
- Langue
- Français
- Contributeur
-
Frédérick Madore
- Identifiant
- iwac-article-0008770
- contenu
-
Dans notre précédent numéro, nous avions publié une partie de cette affaire qui crée actuellement des dissensions entre le premier ministre et son ministre de l’administration territoriale. En effet, le premier ministre en tant que supérieur hiérarchique de Mr Komlanvi Yao a le devoir de confirmer ou d'infirmer les actes des autorités placées sous sa juridiction de compétence Or, qu’est-ce que nous constatons ? Nous constatons malheureusement que Yao Komlanvi ne prend pas en compte les recommandations et les instructions que lui donne Me Kokou Koffigoh.
Dans cette grave affaire politico-religieuse qui oppose deux clans de l’Eglise de Pentecôte du Togo, il y a lieu de réaffirmer la neutralité de l'Etat envers les problèmes religieux. Il y a le clan Togbétsé-Apédoh-Dagadou contre le clan d'Almeida Ayité Mawuko. Cette affaire, à l'analyse, pose certains problèmes fondamentaux qui relèvent finalement du Conseil des Ministres, au regard de la neutralité de l’Etat vis-à-vis des confessions religieuses, des limites des compétences du ministre de l'intérieur togolais, s’appuyant sur le décret français n° 45-1475 du 3 juillet 1945, rendu applicable au Togo par un arrêté "gubernatorial" (gouverneur français au Togo).
Il y a lieu de présenter la chronologie des faits avant de pouvoir avancer des directives pour la recherche de solutions.
Chronologie des faits
- 2 février 1960 : sous le n°262/INT enregistrement de l'Eglise apostolique", créée au Ghana actuel, par le Révérend Pasteur James Mc KEOWN.
- Mise en place d'un système de désignation des membres du conseil d’administration de l'Eglise, par les statuts de l'Eglise (constitution).
- Agrément des membres du conseil d’administration élus par le ministère de l'Intérieur.
- Application des statuts appelés constitution de l'Eglise.
- Agrément par le conseil exécutif international de l’Eglise des membres.
- 1965 le ministre de l'Intérieur, FOUSSENI Mama, par lettre n°11-14/ INT du 22 juin 1965, affirme la neutralité de l’Etat dans ce domaine et déclare qu'aucune autorisation spéciale n'est exigée pour les activités philosophiques et religieuses de "l’Eglise de Pentecôte" (apostolique).
- 1967 le Commandant James ASSILA représenté par M. Dermane ALI, secrétaire général au ministère de l’Intérieur, réaffirme la neutralité de l'Etat à l'égard des confessions religieuses reconnues par les constitutions togolaises
- 1974 : sous la signature de M. Bagnah ministre de l’Intérieur. L'Etat reconnaît toujours" l'Eglise de Pentecôte'' représentée par le Pasteur Apedoh et les diacres généraux Dagadou et Togbétsé (procuration pour la gestion des biens de l'Eglise).
- 1978 ordonnance n°78-19 du 29 mai 1978 portant dissolution des sectes religieuses.
- 19 mai 1984 sous le n°499/INT-SG du 19 mai 1984, le ministre de l’Intérieur Laclé valide l'accord conclu entre l'Eglise Evangélique du Togo et l'Eglise de Pentecôte l'Eglise Evangélique est responsable des actes de l'Eglise de Pentecôte qui n'a plus "aucune existence légale" et sans personnalité morale.
- 11 mai 1991 - Création sous l’emprise de la loi de 1901 d'une association religieuse qui prend la dénomination de "Eglise de Pentecôte du Togo" association créée en violation de l'ordonnance de 1978) - agrément du ministre de l'Intérieur Yao Komlavi par arrêté n°69/ INB/SG/PAP/PC du 26 juin 1991 (veille de la Conférence Nationale Souveraine).
- Querelle entre les membres du bureau directeur de l'association religieuse.
- Dissidence du groupe conduit par M. d'Almeida Ayité Mawuko membre depuis le 09 Novembre 1956, de l'Eglise face aux pasteurs Apedoh K. Benjamin, Pius Mensah et aux diacres généraux Dagadou et David Togbetse.
- 16 septembre 1991 : Ordonnance en référé judiciaire n° 400/91 rendu par le Juge Mawugbé.
- Appel : puis pourvoi en cassation.
- 1992 arrêté du ministre de l’intérieur accordant la personnalité morale aux membres ! Cela encourage les dissidents à utiliser des voies de fait et la violence physique pour déloger le clan Apedoh des immeubles occupés par eux et prendre possession des lieux du culte.
- Interventions vaines des avocats Doe-Bruce et Zolchi, auprès des autorités ministérielles et judiciaires.
Recherche de solutions
Les faits judiciaires et administratifs sont troublants et bizarres, bizarres :
1) On reproche au clan Apédoh-Togbetsé d'être inféodé à l'Eglise ghanéenne. On ne voit pas très bien ce qui empêche une organisation internationale, même religieuse d'avoir une section au Togo.
2) M. d'Almeida serait plus ancien dans l'Eglise que son pasteur Apédoh comme si l’âge et l'ancienneté suffisent pour prendre la place d'un dirigeant dont on dépendait...
M. d'Almeida aurait décidé de mettre à la retraite le Pasteur Apédoh, ainsi que les diacres généraux Togbétsé et Dagadou, sans appliquer les règles statutaires définies dans la "constitution" de l'Eglise.
3) Il y a de l’illégalité dans les formalités et la tenue de la réunion au cours de laquelle les "destitutions" ont été prononcées, par défaut.
4) L'attitude de l’autorité ministérielle paraît bien troublante, avec son immixion dans cette affaire examinée par la justice.
On se demande si l'autorité judiciaire a été libre et indépendante dans le règlement de cette affaire.
Face à l’immixion du ministre Komlavi dans cette affaire qui doit être réglée au niveau de la justice, le Premier Ministre s'est fait le devoir d'amener le ministre Komlavi à la raison, dans une lettre en date du 7 juillet 1992, en ces termes :
«Eu égard aux nouvelles donnes politiques et juridiques provenant de la Conférence Nationale Souveraine, le Gouvernement de Transition ne saurait s'immiscer impunément dans la vie intérieure des associations religieuses. Je n’approuve donc pas l’arrêté n°43/MATS-SG-APA-PC par lequel vous avez cru devoir agréer les nouveaux membres du Conseil d’administration de l’Eglise de Pentecôte du Togo, en violation flagrante des dispositions de vos arrêtés cités en référence. Je vous demande en conséquence, de rapporter purement et simplement votre arrêté n°43/MATS-SG-APA-PC, entaché de vices de formes, et qui est de nature à faire douter de la bonne foi de l’Administration togolaise".
Pour tout cela et pour d'autres raisons subsidiaires probables, le gouvernement en conseil doit se saisir de ce dossier explosif, pour :
- examiner l’affaire et trouver un moyen de règlement, après avoir écouté les témoignages de tous ceux qui ont eu à s’occuper de ce dossier de connotation politique, malgré des apparences administratives et judiciaires ;
- définir la position gouvernementale à l’égard des confessions religieuses et des libertés publiques, dans les domaines philosophiques ;
- trouver le moyen d’abroger l’ordonnance scélérate de 1978 portant interdiction des sectes religieuses ;
- confier le règlement du présent dossier spécifique à un groupe de travail chargé de proposer une solution, étant donné que cette affaire ayant pour base un arrêté gubernatorial" rendant applicable au Togo un décret français, est de nature législative.
Peut-être faudrait-il en arriver à une révision de procès pour redresser les torts causés arbitrairement aux citoyens victimes d'injustices sociales et de brimades.
Jean-Marie Laforette