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Alif-courrier. Musulmans et démocrates : quel combat ?
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- Titre
- Alif-courrier. Musulmans et démocrates : quel combat ?
- Créateur
- Yacouba de Sylla
- Editeur
- Alif
- Date
- septembre 1994
- numéro
- 22
- Page(s)
- 2
- nombre de pages
- 1
- Est une partie de
- Alif #22
- Sujet
- Intégrisme
- Langue
- Français
- contenu
-
MUSULMANS ET DEMOCRATES :
QUEL COMBAT ?
Je crois que ça suffit, les pleurnicheries de communauté martyre !
Heureusement que le lacry a remplacé l'encens dans nos mosquées pour que nous comprenions enfin la place de l'Islam et des Musulmans dans notre pays.
Il y a de quoi remercier "gaudasses" et les "treillis" pour cette profanation du sacré pour réveiller la plus grande communauté d'un sommeil qui n'avait que trop duré.
Après les pleurs et les cris il faut aller de l'avant pour assumer notre part de responsabilité dans la gestion du pays pour en faire une nation démocratique et prospère où les droits des minorités et des majorités seraient rigoureusement respectés. Une nation où il n'y a ni nordistes, ni sudistes. Une nation d'hommes et de femmes unis et solidaires dans leur diversité (socio-culturelle, religieuse et politique). Arrêtons de nous marginaliser, la communauté musulmane n'est pas un îlot social en territoire ivoirien ; une communauté dont les besoins se limiteraient essentiellement à l'obtention de mosquées et de billets d'avion pour le pèlerinage à la Mecque. Il faut éviter de tomber dans le jeu des "intégriseurs" dont l'objectif est de créer des preuves pour justifier leur incapacité à gérer notre destin commun dans la justice la rigueur et la transparence qu'exige la gestion d'un Etat de droit.
Les grandes communautés de foi, (toutes religions confondues) ont toujours eu le choix entre la soumission et la mission. Soumission à un ordre ancien, rejeté et vomi parce que ne répondant plus aux aspirations des peuples. Ces ordres qui, pour s'accrocher n'hésitent pas à enjamber les corps fumants des symboles et des Saints, prêts à sacrifier sur l'autel de leurs égoïsmes haineux et partisans les fruits de nos labeurs.
Mission pour l'avènement d'un ordre de justice et de paix, d'amour et de solidarité active et prospère.
Mission !
Voilà notre choix. La communauté musulmane, doit s'engager ou s'associer à toutes initiatives dont l'objectif est l'unité des diversités nationales dans la justice et le respect mutuel. Dans cet élan nous ne devons pas nous embarrasser des sirènes prêtes à crier à l'intégrisme pour ameuter le peuple et nous dévier de notre but.
Aujourd'hui, c'est le peuple ivoirien qui est en danger et non la seule communauté musulmane. Ils savent qu'il suffit de crier à l'intégrisme islamique pour que l'Occident se braque avec tout son arsenal militaro-économique pour casser du musulman ou de l'intégriste.
Pour nous musulmans de Côte d'ivoire, c'est à nous de nous investir véritablement dans le combat pour le développement économique politique et social qui s'impose à notre pays aujourd'hui. Pour cela nous devrons tisser des liens avec toutes les autres composantes de la société civile (syndicats, organisations de masses etc…) qui participent chacun à sa manière à l'animation politique et économique de la Côte d'ivoire. Les organisations islamiques sans parti pris avec leurs spécificités propres devraient inciter les fidèles musulmans à adhérer aux partis politiques de leur choix, défendre et garantir les droits de l'Homme et du citoyen aux côtés des structures comme la LIDHO ou Amnesty International.
Aujourd'hui, les débats sur la liberté de la presse, le respect de la constitution ou la gestion de notre économie ne devraient pas nous laisser indifférents. Il ne suffit pas de dire que le Prophète, (que la Grâce et la paix de Dieu soient sur Lui), a averti "qu'une nation peut vivre cent ans dans l'infidélité, mais pas dans l'injustice", mais il faut participer ou s'engager dans le combat pour l'instauration de la JUSTICE. Le prophète a non seulement reçu le Coran, mais a appliqué ses préceptes et ses recommandations sur le terrain. Il ne suffit pas aussi de dire que la première constitution humaine a été écrite par le prophète dès son arrivée à Médine, mais, mieux apprécier l'esprit afin de l'adapter aux contextes où nous évoluons. Les responsables musulmans doivent cesser de rêver et éviter la collusion entre eux et le pouvoir. Jamais le pouvoir ne les laissera s'organiser comme ils le souhaitent. C'est la même attitude qu'il a adopté à l'égard des syndicats. Le cas de la FESCI en est un exemple éloquent. Ce syndicat s'est battu pour que soient orientés tous les bacheliers de 93 et l'instauration de meilleures conditions de travail et de vie pour les étudiants. On connaît le reste. Nos étudiants ont été libérés non par une volonté d'apaisement du gouvernement mais plutôt grâce aux pressions des syndicats et des organisations de défense des droits de l'Homme. S'il y a des journaux islamiques libres c'est parce qu'il y a la liberté de la presse. D’où notre obligation de participer à la lutte contre l'emprisonnement abusif des journalistes toutes tendances confondues. C'est dire que les journaux de tendances islamiques doivent tenir compte non seulement de la solidarité de foi qui les lie à la communauté musulmane dont ils défendent les intérêts mais aussi des liens syndicaux qui les lient aux autres journaux.
Nous devons donc nous intéresser et nous impliquer dans la lutte pour la démocratie, la vraie, en Côte d'Ivoire.
La Côte d'Ivoire, c'est avant tout la Côte d'Ivoire. Bien entendu, nous sommes solidaires et interpellés par le martyr des musulmans de Bosnie, de l'Afghanistan ou de l'Algérie mais aussi des Rwandais parce que ce sont des Hommes et des Femmes qui subissent les conséquences de l'injustice, de l'exclusion et de l'intolérance.
Les organisations islamiques doivent inventer les termes de leur lutte en fonction des réalités socio-culturelles politiques et économiques locales. Il faut savoir éviter les transpositions souvent choquants dont les conséquences sont entre autres la banalisation de nos aspirations profondes et légitimes.
Le message coranique n'est pas une exclusivité pour les musulmans, mais pour toute l'humanité. De ce point de vue nous devrons être réceptifs aux autres, dans la manifestation de leur quotidien, et nous montrer à la hauteur de la transmission de ce message. Si les musulmans de Côte d'Ivoire sont marginalisés c'est certainement parce qu'ils sont marginalisables, ou encore qu'ils ont donné l'occasion de leur marginalisation. En fait on ne colonise qu'un peuple colonisable.
Dans ce nouvel élan, il ne s'agira pas de lutter pour l'avènement d'une dictature des dioulas, du grand Nord, ou encore des musulmans, mais plutôt une dictature des ivoiriens. C'est-à-dire participer à l'instauration d'une dictature de la justice conçue d'un commun accord avec tous les ivoiriens dans leur diversité ethnique, culturelle, religieuse et politique. Ce faisant nous aurons participer à la création des conditions d'épanouissement des individus et des groupes.
Nous devons nous affranchir des carcans des psychologies et des concepts importés. Les génocides et autres cataclysmes humanitaires dont les images inondent nos salons ne sont que les conséquences de situations longtemps dénoncées mais jamais prises au sérieux !
La lucarne démocratique que les circonstances ont imposé dans nos Etats totalitaires a besoin de la contribution de tous sans exclusion et sans réserve.
Il ne faut pas se le cacher, la communauté musulmane unie peut véritablement influencer la balance électorale pour ou contre la droite ou la gauche démocratique. D’où les manigances et les intrigues pour diviser et mieux la contrôler ensuite. Nous avons le devoir de ne pas abandonner ou de décevoir les aspirations à la justice à l'égalité et à la démocratie du peuple ivoirien.
Yacouba de SYLLA
09 B. P. 507 ABIDJAN 03
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