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"Simon Compaoré et Halidou Ouédraogo doivent se réconcilier" selon l'imam Moussa Doulkoum de la mosquée de Gounghin
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- Titre
- "Simon Compaoré et Halidou Ouédraogo doivent se réconcilier" selon l'imam Moussa Doulkoum de la mosquée de Gounghin
- Editeur
- Sidwaya
- Date
- 14 mai 1999
- Résumé
-
Sidwaya (S. ): imam, pouvez-vous nous relater ce qui s'est passé dans votre secteur dans la journée du lundi?
Imam Moussa Doulkoum (I. M. D. ): Lundi peu après 13h, un homme est venu me dire qu'on avait besoin de voir les premiers responsables de la mosquée, c'est-à-dire l'imam et sa suite chez le maire de Ouagadougou (à son domicile sis au quartier Gounghin). Il a avoué avoir informé plusieurs autres personnes avant de se présenter chez moi. Je lui ai répondu qu'il n'y a pas de problème et qu'à l'heure de la prière à 14h, j'en profiterai pour informer ma suite afin qu'ensemble, on se rende chez le maire. - Sujet
- Simon Compaoré
- Langue
- Français
- Contributeur
- Frédérick Madore
- Identifiant
- iwac-article-0002917
- contenu
-
Sidwaya (S. ): imam, pouvez-vous nous relater ce qui s'est passé dans votre secteur dans la journée du lundi?
Imam Moussa Doulkoum (I. M. D. ): Lundi peu après 13h, un homme est venu me dire qu'on avait besoin de voir les premiers responsables de la mosquée, c'est-à-dire l'imam et sa suite chez le maire de Ouagadougou (à son domicile sis au quartier Gounghin). Il a avoué avoir informé plusieurs autres personnes avant de se présenter chez moi. Je lui ai répondu qu'il n'y a pas de problème et qu'à l'heure de la prière à 14h, j'en profiterai pour informer ma suite afin qu'ensemble, on se rende chez le maire. A l'heure de la prière, j'ai effectivement fait passer l'information comme quoi le maire souhaite nous voir à son domicile. Après la prière, certains sont rentrés chez eux avant de revenir, d'autres sont restés à la mosquée. A 15h moins cinq minutes, nous nous sommes rendus chez le maire. Arrivés, nous avons attendu et quelques instants après le maire est arrivé. Il nous a dit qu'effectivement, c'est lui qui nous a fait appeler pour nous faire part de certaines informations. Je rappelle que le maire avait eu à nous convoquer pour nous informer du drame de Sapouy.
A cette occasion, il nous a fait savoir la volonté des autorités burkinabè d'œuvrer pour la mise en place d'une commission chargée d'enquêter sur le drame. Pour l'appel de lundi, le maire nous avait dit qu'il aurait souhaité s'entretenir avec nous sur le rapport de la commission d'enquête, qui venait d'être remis au gouvernement. Mais qu'il ne peut plus s'attarder sur des informations relatives au rapport de l'enquête parce qu'il y a de nouvelles données qui sont venues s'ajouter à tout cela. Il nous a notamment fait savoir que ce même lundi, on a fait sortir les jeunes (élèves, étudiants... ) qui sont en train de saccager les feux tricolores et autres panneaux de signalisation dans le quartier Zogona. Le maire nous a aussi dit qu'il a été informé que la casse va s'étendre au secteur 9. Selon lui, les manifestants viendront dans notre quartier et indiqueront des cibles qui seront saccagées. Il a donné l'assurance que notre mosquée faisait partie des cibles à démolir. C'est pour cela donc qu'il a jugé nécessaire de nous appeler pour nous informer car dira-t-il, mieux vaut prévenir que guérir. Le maire a avoué qu'il était opportun de nous le dire à l'avance plutôt que de nous dire ce qui était prévu après les dégâts. Il se reprocherait de ne pas nous informer à temps parce que selon lui, nous lui demanderions après pourquoi il voyait venir le danger et il ne nous a pas avisés plus tôt. Nous avons remercié vivement le maire et nous lui avons dit qu'il a. bien fait de nous avoir informés avant que les manifestants ne viennent détruire notre mosquée. Aussi avons-nous ajouté au maire que s'agissant de la mosquée, c'est la demeure de Dieu. C'est un lieu de prière. C'est vrai que nous prions là-bas mais, la mosquée appartient à Allah. C'est Dieu qui protège cette «maison".
Nous lui avons dit que nous n'avons aucun mot à dire. Si Dieu veut, il n'a qu'à laisser les manifestants venir détruire cette mosquée. Si Dieu veut, il n'a qu'à les empêcher de la détruire. Nous nous en remettons à Dieu. C'est juste ce que nous avions dit au maire avant de lui redire ensuite un grand merci. On n'a pas dit qu'on va surveiller la mosquée. On n'a pas non plus dit qu'on va faire appel à des jeunes pour surveiller la mosquée. On n'a pas enfin dit qu'on va former un bouclier humain pour protéger cette mosquée. Non, c'est la propriété de Dieu et c'est Dieu lui-même qui s'en occupe.
S.: M. le maire ne vous a-t-il pas révélé la source des informations portées à votre connaissance?
I. M. D.: Non, il n'a pas révélé ses sources d'information. Il nous a simplement dit que les dégâts se sont déjà produits à Zogona précisément sur le boulevard Charles-de-Gaule. Que c'est là-bas qu'on a beaucoup cassé et qu'il a appris que les manifestants viendront ensuite dans notre quartier Gounghin. Notre entretien avec le maire a duré environ une demi-heure.
Vers 15h 30, nous avons pris congé du maire et nous avons continué directement à la mosquée pour la prière de 16 h. Après la prière, il y avait juste à côté quelqu'un qui donnait sa fille en fiançailles et on nous avait signalé que les beaux-parents y étaient déjà venus. On s'est donc décidé à aller là-bas. Avant d'y aller, je suis d'abord passé chez moi. C'est en ce moment que j'ai aperçu deux personnes âgés du quartier (il indexe ces deux personnes parmi le groupe) qui accompagnaient des personnes déléguées par Halidou Ouédraogo chez moi. Les membres de cette délégation se sont fait accompagner parce qu'ils ne savaient pas où se trouvait mon domicile. Ils avaient même voulu venir nous rencontrer à la mosquée mais à leur arrivée la prière de 16h était déjà terminée et les musulmans étaient déjà rentrés chez eux. C'est ce qui expliquait leur venue chez moi à domicile. Les deux accompagnateurs de la délégation m'ont dit d'emblée que c'est Halidou Ouédraogo qui a envoyé ces personnes pour qu'elles viennent s'entretenir avec les responsables de la mosquée. J'ai reçu la délégation. Les gens se sont installés sur les chaises sur lesquelles vous êtes assis (pendant notre entretien). Il y avait au total huit (8) chaises occupées et d'autres personnes étaient restées debout. Nous ne connaissons aucun membre de la délégation. Je leur ai demandé de nous excuser parce qu'il y avait la cérémonie de fiançailles dont j'ai déjà fait cas, et que beaucoup de musulmans étaient là-bas. Je me suis rapidement dépêché sur les lieux de cette cérémonie et j'ai fait venir quelques musulmans avec moi pour recevoir et écouter la délégation de Halidou Ouédraogo.
Après salutations, le porte-parole de la délégation, nous a dit qu'ils ont été envoyés par M. Halidou Ouédraogo pour venir échanger avec l'imam et sa suite. Ils nous ont fait savoir que M. Halidou Ouédraogo a ouï dire qu'il serait en train d'organiser des jeunes pour venir détruire la mosquée. Et qu'il transmet à l'ensemble des musulmans son profond mécontentement face à de tels propos qui du reste ne sont pas fondés. Il nous a dit qu'on l'accuse gratuitement et qu'il ne rêve pas d'organiser une telle chose. Que jamais il ne peut faire sortir des jeunes pour aller saccager des lieux de culte. Ils ont dit que M. Halidou Ouédraogo reconnaît qu'il mobilise des jeunes pour manifester contre certaines choses mais jamais pour casser des mosquées.
Les messagers de M. Halidou Ouédraogo ont dit que s'il y a casse de la mosquée, c'est peut-être ceux qui font état de cela qui nourrissaient l'espoir de mener de telles actions. Nous avons alors entendu et remercié cette délégation de M. Halidou Ouédraogo.
Dieu merci, le maire affirme être derrière nous pour nous soutenir dans tout ce que nous entreprendrons. Le maire dit qu'il ne souhaite pas la destruction de la mosquée. De son côté, M. Halidou Ouédraogo refuse toute idée ou tentative d'organiser qui que ce soit pour endommager notre mosquée. Nous les remercions tous et nous remercions Dieu. Plus rien ne s'est ajouté à cela. Seulement c'est mardi que les jeunes ont constitué des attroupements dont nous ignorons les motifs. Nous avons entendu aussi des explosions de gaz lacrymogène pour disperser les attroupements. On nous a aussi fait état de dégâts causés sur la route de Bobo aux environs du jardin de Fadoul (le Challenge).
Nous aimerions nous adresser à la population, au maire de Ouagadougou et à M. Halidou Ouédraogo. Nous avons voulu choisir et former un comité de vieux sages (pas seulement les musulmans) pour aller voir successivement le maire de Ouagadougou et M. Halidou Ouédraogo afin que les deux hommes se pardonnent et se réconcilient. Parce qu'ils habitent tous deux le même quartier. Ils sont voisins, ils sont amenés à vivre ensemble. Nous leur demandons vraiment de se pardonner. Même s'il s'agissait d'un problème qui les opposait personnellement, nous aurions pu également intervenir pour apaiser les cœurs. Le problème qui se pose aujourd'hui est préoccupant pour toute la communauté. Si ce n'est pas parce que le représentant des jeunes a parlé le matin du délai donné à M. Halidou Ouédraogo pour quitter le quartier, j'avoue que nous n'étions pas du tout informés de cela. Pas du tout. Nous n'avons constaté que les attroupements chez le maire Simon Compaoré ainsi que chez le président du MBDHP, M. Halidou Ouédraogo. Toute chose a une fin. Nous ne demandons que le pardon, la tolérance. Nous ne sommes derrière personne, ni contre personne. Quand le pardon fait défaut, tous nos efforts sont vains. Que Dieu nous aide.
Amen !
Entretien réalisé par Kimségninga SAVADOGO & Célestin BAKOUAN