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Alassane, la charte et les deux imams
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- Titre
- Alassane, la charte et les deux imams
- Créateur
- Kouakou Koffi
- Editeur
- Notre Voie
- Date
- 9 juin 2000
- Résumé
- Alassane Ouattara a surgi en Côte d'Ivoire, tenant quasiment à la main la Charte du Grand-Nord comme d'autres leur bréviaire. En effet, de son intrusion en Côte d'Ivoire date l'élaboration et la diffusion de cet appel au regroupement identitaire des originaires du Nord de la Côte d’Ivoire : Jouer éternellement les seconds rôles, n'a rien d'honorable pour ses fils. Se prêter à servir de support aux autres pour la réalisation de leurs desseins, ne peut que déranger l'amour propre et la conscience des uns et des autres, avec le sentiment coupable de notre inaptitude à pouvoir s’entendre, à faire l'union et l'unanimité autour des nôtres. Charte du Nord (P. 7)…
- nombre de pages
- 1
- Langue
- Français
- Contributeur
- Frédérick Madore
- Identifiant
- iwac-article-0006931
- contenu
-
Alassane Ouattara a surgi en Côte d'Ivoire, tenant quasiment à la main la Charte du Grand-Nord comme d'autres leur bréviaire. En effet, de son intrusion en Côte d'Ivoire date l'élaboration et la diffusion de cet appel au regroupement identitaire des originaires du Nord de la Côte d’Ivoire : Jouer éternellement les seconds rôles, n'a rien d'honorable pour ses fils. Se prêter à servir de support aux autres pour la réalisation de leurs desseins, ne peut que déranger l'amour propre et la conscience des uns et des autres, avec le sentiment coupable de notre inaptitude à pouvoir s’entendre, à faire l'union et l'unanimité autour des nôtres. Charte du Nord (P. 7)…
*Faire bloc autour d'Alassane avait été notre intention première. Celle-ci date de 1939 comme l'atteste l'en-tête de ce document, alors que Alassane n'était encore que le président du Comité interministériel. Charte du Nord (P. 9).
Félix Houphouët-Boigny, que nul, dans les rangs des promoteurs de la Charte, ne soupçonnait d'hostilité à l'encontre du Grand-Nord, était toujours président de la République en 1989 et Bédié encore loin du pouvoir. Les idéologues du Grand-Nord prétendaient alors trouver la justification de leur volonté de revanche dans le soutien apporté par leurs parents au combat du RDA. Rétrospectivement, ce discours particulariste suscite l'effroi des Ivoiriens qui considéraient naïvement la Côte d'Ivoire comme un Etat unitaire.
Mais ceux qui pensaient avoir entendu, avec cette Charte, les proclamations les plus absurdes se trompaient. En effet, quand il a plu au Général Robert Guéi d'inviter les chefs des différents cultes à joindre leurs prières à l'action politique de refondation de la Côte d'Ivoire, l'imam Aboubacar Fofana, oublieux de sa charge spirituelle, s'est livré à une violente diatribe dont les termes rappelaient étrangement la rhétorique de la Charte du Grand-Nord. Forçant le trait, il a affirmé, au mépris de toute vérité historique, que, dans les années 40, les musulmans s'étaient détournés du musulman Sékou Sanogo pour offrir leurs suffrages au PDCI-RDA. A la préférence ethnique, défendue par la Charte du Grand-Nord, il ajoute la préférence confessionnelle, suivant laquelle un musulman est tenu de voter pour un musulman. C'est à peu près ce que laissa entendre Alassane Ouattara au plus fort de la polémique qui l'opposait au Président Bédié.
L'imam Fofana a dépassé les bornes lorsque, visant les *citoyens de la forêt, il en est venu à parler de nazisme et d'apartheid en Côte d'Ivoire. De la Charte du Nord à la présente période pré-électorale, la fièvre ethnique s'est enrichi d'un intégrisme religieux. Peut-il en être autrement quand l'imam Koudouss lui-même affirme sans sourciller, dans Jeune Afrique Economie, que le cadre musulman est musulman avant d'être un cadre ? Si les mots ont un sens, ce brave homme, en disant cela, laisse entendre que, pour lui, l'appartenance à la religion musulmane a le primat sur la citoyenneté ivoirienne. De telles déclarations ne sont pas tolérables dans un Etat laïc, mais il semble que la protestation exprimée dans la Charte du Grand-Nord donne le droit à qui s'en réclame de fouler au pied la Constitution ivoirienne. Ces personnes qui promettent la guerre civile à notre pays, devraient plutôt appeler "Djihad, c'est-à-dire guerre sainte, le fléau qu'ils menacent d'abattre sur la Côte d'Ivoire si leur candidat n'est pas élu président de la République.
Le RDR apparaît, pour sa part, comme le bras séculier de la Charte du Nord et de l'islam militant. Si tel n'était pas le cas, Ibrahima Fanny, commissaire politique de ce parti dans la région des Savanes, aurait-il ose crier en public : "… ADO est un homme du monde, il a déjà servi 110 pays… S'ils veulent le disqualifier, c'est sur nos cadavres qu'ils vont passer ? Comme en politique il n'y a pas de petit profit, le parti d'Alassane Ouattara s'est offert un nouveau porte-voix bien connu des Ivoiriens qui le tiennent en mince estime. Dans l'accomplissement de sa besogne, l'ineffable Jean-Jacques Béchio a parodié une formule que Mao Tsé Toung appliquait à tout autre chose : "Lorsqu'un gouvernement est incapable de répondre aux aspirations des Ivoiriens, il les divertit par le football et la culture. Lorsque cet homme était ministre de la Fonction publique, de sinistre mémoire, il avait osé proclamer, avec un insoutenable mépris dans la voix, que les travailleurs de la culture étaient de vils batteurs de tam-tam. Ce n'est pas en appelant en renfort l'arrière-ban de la société que le RDR prospérera !
Que le RDR veuille tirer profit d'un électorat qu'il juge captif, nui ne saurait le lui reprocher. Mais pour l'honneur de la Côte d'Ivoire et celui des nationalistes de toutes origines qui ont combattu les excès de l'administration coloniale, il importe de rétablir quelques vérités :
1) c'est une contrevérité de dire que les musulmans ont refusé de voter pour Sékou Sanogo. En effet, Sékou Sanogo était en 1946 conseiller général de la Côte d'Ivoire, élu sur la liste du Rassemblement africain amené par le PDCI-RDA.
2) Au moment où la répression s'abattit sur les militants du PDCI-RDA, Sékou Sanogo s'en éloigna. Il avait préféré créer un de ces partis liés à l'administration coloniale en compagnie de Vamé Doumouya. Cette désertion lui permit d’être élu député de la Côte d’ivoire et de siéger au Grand conseil de l’AOF à la place du candidat du PDCI-RDA qui se trouve être le Voltaïque Ouezzin Coulibaly.
Le rappel de ces quelques faits historiques ne vise qu'un but : montrer que les élections mettent aux prises des candidats qui se présentent non pas sous une étiquette confessionnelle, mais sous l’égide d'un parti politique quel que soit son honorabilité. En faisant croire que les musulmans ont voté comme un seul homme pour le PDCI-RDA parce qu'il défendait les intérêts des indigènes, M. Fofana veut faire croire qu'il n'y avait pas de au sein des musulmans. Or les collaborateurs de l’administration coloniale, il y en eut autant dans les régions forestières que dans les savanes du Nord. Il y eut tout autant de frères parmi les gens du Nord que dans les rangs des autres Ivoiriens.
La parenté manifeste entre la Charte du Nord et le discours tenu par certains de nos imans requiert la vigilance des Ivoiriens. Quand une communauté fait savoir qu'elle refuse de demeurer plus longtemps au rang des rameurs et décide qu'il est temps pour elle d'écouter le chant des Sirènes, la patrie est en danger. Quand, déliant le bon sens le plus élémentaire, un imam crie que l'islam est une religion démocratique, on est tenté de lui proposer un pari. Comme Alassane Ouattara est inéligible en raison de sa double nationalité et qu'il est second en politique par une femme dont rien ne gêne l’éligibilité, que nos deux imams la recommandent à leurs fidèles en remplacement du chef du RDR ! Les révérends Koudouss et Fofana sont-ils prêts à relever ce défi, au nom de l'islam démocratique ?
Professeur Kouakou Koffi
Secrétaire général du Rassemblement des forces ivoiriennes