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Affaires étrangères et Coopération sous la Rupture : « L'image du Bénin à l'étranger s'est améliorée », soutient Aurélien Agbénonci
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- Titre
- Affaires étrangères et Coopération sous la Rupture : « L'image du Bénin à l'étranger s'est améliorée », soutient Aurélien Agbénonci
- Créateur
- Éric Comlan
- Editeur
- La Nation
- Date
- 5 mai 2020
- Résumé
- Les affaires étrangères et la coopération ne sont pas en marge des secteurs impactés par la dynamique de la Rupture. Après quatre ans de gouvernance, Aurélien Agbénonci, ministre des Affaires étrangères et de la Coopération, expose les réalisations et les actions engagées pour améliorer l’image du Bénin sur la scène internationale.
- Sujet
- Aurélien Agbénonci
- Commerce
- Communauté Économique des États de l'Afrique de l'Ouest
- Coopération
- Covid-19
- Diplomatie
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- Détenteur des droits
- La Nation
- Langue
- Français
- Source
- La Nation
- Identifiant
- iwac-article-0002383
- contenu
-
Les affaires étrangères et la coopération ne sont pas en marge des secteurs impactés par la dynamique de la Rupture. Après quatre ans de gouvernance, Aurélien Agbénonci, ministre des Affaires étrangères et de la Coopération, expose les réalisations et les actions engagées pour améliorer l’image du Bénin sur la scène internationale.
Lire ses propos
Nous faisons le bilan des quatre ans de gouvernance aux Affaires étrangères et à la Coopération dans un contexte de crise sanitaire où le coronavirus fait vaciller la planète. Quelles sont les nouvelles de nos compatriotes de la diaspora qui vous parviennent ?
Aurélien Agbénonci : Les nouvelles qui nous parviennent de la diaspora sont rassurantes dans certaines régions du monde mais elles pourraient être préoccupantes ailleurs. Nous nous assurons que la diaspora béninoise se mette à l’abri en se conformant aux gestes barrières. Même dans les pays où les mesures qui sont prescrites ne sont pas aussi drastiques que celles que notre pays a proposées, nous conseillons aux membres de la diaspora de se préserver et de faire attention. Cela nous amène à constater dans certains domaines qu’il leur faut une assistance. Le président de la République a entrepris lui-même d’apporter cette assistance en nous donnant des instructions très précises pour régler certains cas particuliers sur lesquels je ne souhaite pas m’étendre.
Au plan national, le ministère des Affaires étrangères et de la Coopération participe aux côtés de l’ensemble du gouvernement à la stratégie mise en place par le chef de l’Etat pour que cette pandémie soit gérée d’une manière intelligente.
Toujours sur le même registre, des Africains ont subi des violences de la part de certains Chinois. Une situation assez préoccupante sans doute…
Dès la survenance de ces évènements regrettables, j’ai été informé par notre ambassadeur en poste à Beijing et aussi par l’entremise de la presse. Cela m’a amené à avoir un entretien avec l’ambassadeur de la Chine près le Bénin pour lui poser des questions assez précises puisque le sort de nos compatriotes nous préoccupe énormément. C’est de là que l’assurance nous a été donnée qu’il s’agissait effectivement de dérapages au niveau provincial mais qu’au niveau du gouvernement central, des mesures avaient été prises pour éviter que les Africains en général, les Béninois en particulier ne soient l’objet de ces comportements inacceptables à un moment où c’est la solidarité, la compassion et le soutien qui doivent être les tendances dominantes de l’expression des sentiments des uns et des autres. Je suis avec beaucoup d’attention cette situation. Plusieurs compatriotes m’ont appelé directement de la Chine et d’autres au Bénin pour s’inquiéter. J’ai pu leur donner l’assurance de ce dialogue que nous avons. L’ambassadeur de la Chine, avec qui je me suis entretenu, m’a aussi donné des informations qui, pour le moment, nous rassurent. Mais, cela ne nous empêche pas d’être vigilants.
La diplomatie est au front dans la gestion de la fermeture par le Nigeria de ses frontières avec les pays voisins. Une situation que semble éclipser la pandémie du Covid-19 mais qui ne manquera pas de revenir au-devant de la scène, une fois la pandémie maitrisée. Quelles informations avez-vous à partager avec vos compatriotes durement touchés par cette situation ?
Cette décision unilatérale, sans préavis, du gouvernement du Nigeria de fermer ses frontières avec le Bénin a causé du tort à plusieurs de nos compatriotes, surtout ceux qui sont dans le secteur des affaires. Cette décision a aussi provoqué des difficultés au plan humain, au niveau des communautés qui vivent des deux côtés de la frontière. Dès la survenance de cet évènement, le président de la République a immédiatement rencontré son homologue nigérian à Yokohama, le 28 août 2019, en marge de la Ticad 7, puis en marge du Sommet extraordinaire de la Cedeao sur la sécurité et le terrorisme, le 14 septembre 2019 à Ouagadougou. Un cadre tripartite Bénin-Niger-Nigeria a été mis en place et s’est traduit par la tenue d’une réunion ministérielle le 14 novembre 2019. Deux réunions ont suivi au niveau technique les 26 novembre et 10 décembre 2019.
Il faut dire que les difficultés évoquées par le Nigeria ne sont pas à nier mais il faut aussi donner une information équilibrée. C’est vrai que le trafic de riz importé d’Asie porte atteinte au programme de riz mis en place par le Nigeria, mais les acteurs de cette filière ne sont pas que des Béninois. Il faut dire aussi que les produits manufacturés du Bénin (huile, eau…) n’ont jamais été acceptés sur le marché nigérian.
J’évoque tout cela pour dire que, de part et d’autre, il y a des choses à corriger. D’ailleurs, dès son accession à la plus haute charge de l’Etat, le président de la République a toujours souhaité qu’il y ait une concertation entre le Nigeria, le Niger et le Bénin pour passer en revue ces difficultés, pour que ces violations des règles communautaires ne puissent pas persister. Les agendas politiques n’ont sûrement pas permis que ces rencontres aient lieu.
Après les diverses rencontres d’Abuja et de Yokohama, le président du Burkina Faso désigné par ses pairs pour coordonner l’effort lié à la libre circulation dans notre espace communautaire a convoqué non seulement les trois pays (Bénin, Niger et Nigeria) mais aussi les autres pays impactés par cette fermeture (Côte d’Ivoire, Ghana et Togo). Au cours de cette réunion, la feuille de route établie à Abuja et comportant treize points a été examinée. Le constat est que dix points ont été respectés. Les trois points restants sont des actions conjointes. Le Nigeria s’est engagé à ce que les deux autres parties prennent les actions qui s’imposent pour que nous puissions arriver assez rapidement à une ouverture. C’est dans cette dynamique que nous étions quand est survenue la pandémie du coronavirus qui a amené l’ensemble des pays à fermer leurs frontières pour pouvoir contrôler les flux des personnes infectées.
A quand le dénouement de ce dossier qui touche au fondement même de la Cedeao ?
Si cela ne tenait qu’au gouvernement du Bénin, les frontières devraient être ouvertes immédiatement. Mais le Bénin ne décide pas de ce qui se passe à Abuja. Le fait que la Cedeao se soit emparée du dossier, que le dernier sommet d’Abuja ait demandé à la partie nigériane de coopérer comme il se doit dans la résolution de la question… C’est un ensemble de faisceaux qui m’amène à croire que lorsque cette crise sanitaire sera surmontée, la partie nigériane prendra les mesures qu’il faut. Vous l’avez bien dit, cette fermeture des frontières touche effectivement au fondement de la Cedeao. Nous sommes sur un terrain de violation flagrante du droit communautaire. Nous avons un marché unique. Normalement, il ne devrait pas y avoir d’obstacles à l’exportation, d’un pays membre de la Cedeao vers un autre, de produits manufacturés dans cet espace. La circulation des biens et des personnes est au cœur de ce droit communautaire. Mais comme vous le savez, en droit international, il arrive que des incompréhensions conduisent à des confrontations. Toutefois, ce qui nous caractérise au Bénin, c’est de maintenir le dialogue avec le Nigeria. J’ai dit récemment que le Bénin n’est ni dans la victimisation ni dans la confrontation. Nous sommes dans une discussion sereine qui devrait nous permettre de trouver des solutions assez rapidement.
Il y a quelques mois, le Bénin a décidé du retrait de son agrément à l’ambassadeur de l’Union européenne (Ue). Quelles sont les motivations de cette décision ? Est-ce que cette décision n’a pas des conséquences sur les relations entre le Bénin et l’Ue depuis lors ?
Un diplomate est tenu à des obligations en plus des droits et des privilèges attachés à sa fonction. Parmi ces obligations, il y a ce qu’on appelle, le devoir de réserve. Lorsque la frontière de ce devoir de réserve est franchie plusieurs fois, un pays souverain n’a pas autre choix que celui qui a été le nôtre de remettre les pendules à l’heure et de faire en sorte que l’excellente relation entre l’Ue et le Bénin ne souffre pas de comportements d’un individu. Mais, ce qu’il faut retenir, c’est que la page de cette incompréhension est désormais tournée, grâce à la volonté des deux parties d’aller de l’avant parce qu’aucun des programmes sur financement de l’Ue n’a été interrompu. Nous sommes dans un dialogue permanent avec l’institution européenne dont le rôle dans le développement du Bénin est important. C’est justement pour préserver la qualité des relations qu’il fallait prendre cette décision. L’une des étapes importantes de ce dialogue reste la conversation franche et très constructive que j’ai eue avec le haut représentant chargé des affaires étrangères et de la politique de sécurité de l’Ue. Au cours de cet entretien, nous nous sommes compris et tombés d’accord pour que les choses retournent à la normale. N’eût été cette crise du coronavirus, nous aurons déjà tenu le dialogue politique à Cotonou. Je puis vous assurer que les relations entre le Bénin et l’Ue sont au beau fixe.
En plus des partenaires traditionnels, le Bénin a fait une ouverture sur d’autres horizons pour diversifier ses relations. C’est le cas de l’Estonie dont le Bénin a reçu pour la première fois la présidente. Que gagne le Bénin dans ce partenariat ?
Lorsque le président de la République est allé en Estonie, les gens nous ont demandé ce que nous allons chercher en Estonie. Il faut dire que le Bénin, dans sa quête d’une amélioration des conditions d’existence ici, de modernisation de la gouvernance, a fait une sorte de scanning des bonnes pratiques dans le monde. L’Estonie est le pays qui a réussi plus le e-gouvernement, la dématérialisation, la modernisation des affaires publiques… C’est ce que nous sommes allés faire en Estonie. La présidente de l’Estonie, convaincue par la détermination du chef de l’Etat et les réformes entreprises, a tenu à venir au Bénin pour montrer que les relations entre les deux pays méritaient d’être consolidées dans ces domaines. C’est pour cela que dans notre programme de dématérialisation, nous avons eu recours à des spécialistes estoniens qui ont participé à des actions de mise en place de ce programme dans certains volets. Des accords ont été signés pour permettre à notre pays de bénéficier de l’expertise de ce pays.
L’opinion s’est rendu compte que quelques mois après la visite du chef de l’Etat, l’ensemble des pays de l’Ue s’est déplacé en Estonie pour un sommet consacré à la numérisation et à la digitalisation de la gestion des affaires publiques. Cela a permis aux gens de comprendre que l’Estonie est l’un des meilleurs de la classe. Le Bénin veut s’associer aux meilleurs.
Dans ce partenariat, nous avons une équipe comme l’Assi qui est en lien avec l’équivalent de cette agence en Estonie. Ma collègue du Numérique et de la Digitalisation est aussi en contact avec son homologue. Des concertations régulières dans ce domaine ont lieu. Des problèmes de formation ont été aussi retenus dans l’accord que nous avons signé avec l’Estonie. Cet ensemble d’ingrédients contribue à nous faire avancer dans notre programme de dématérialisation de l’administration publique.
Sur le plan de la coopération multilatérale, nous sommes un nouveau partenaire pour ce pays pour pouvoir influencer la gestion des affaires internationales.
La philosophie qui gouverne les actions diplomatiques du Bénin s’articule autour de la diplomatie économique. Qu’est-ce qu’elle apporte de plus au Bénin aujourd’hui ?
Lorsque le candidat désormais président de la République a décidé de prendre les rênes de notre pays, il a dit qu’il souhaitait que nous fassions de notre diplomatie un véritable instrument de rayonnement et de mobilisation de ressources pour le développement. Notre développement souffre de manque de ressources (financières, humaines…). Pour pouvoir élever le niveau de ce capital humain, il nous faut un investissement massif pour se mettre sur la trajectoire porteuse. Ce que rapporte cette diplomatie économique, c’est ce que nous recevons en scrutant les possibilités qui existent de par le monde. Ce n’est pas seulement le ministère des Affaires étrangères, c’est le ministère du Plan, le ministère des Finances mais d’abord et avant tout le président de la République qui, non seulement examine favorablement les propositions que nous pouvons faire, mais aussi en scrutant lui-même les possibilités qui existent, nous envoie en mission. Cela nous permet de nouer de nouveaux partenariats, de trouver des ressources qui permettent à notre pays de lancer d’énormes programmes de construction en cours dans tous les domaines.
De façon concrète, quels chiffres pourriez-vous donner en termes d’apport de cette diplomatie économique au développement du Bénin?
Je pense que les chiffres sont énormes et, pour la première fois de son histoire, notre pays a été sur le marché financier international des Eurobons. Très récemment encore, le Fmi, compte tenu de nos performances économiques, a décidé de doubler les facilités qu’il apporte pour renforcer notre économie. En termes de chiffres, c’est énorme ce qui a été rapporté dans ce pays. Rien que pour la construction de l’hôpital de référence d’Abomey-Calavi, nous avons pu mobiliser des ressources. Donc, il y a énormément de retombées dans cette démarche. Ce qu’il faut retenir aussi, c’est la crédibilité du président de la République, ce qui permet à l’équipe de mobiliser les ressources.
Dans cette dynamique, vous adressez des lettres de mission aux ambassadeurs en poste pour qu’ils puissent mobiliser des investisseurs et des financements pour le pays. Comment cela se passe-t-il exactement ?
L’envoi des lettres de mission participe de la réforme de notre diplomatie. On ne peut pas envoyer en mission des ambassadeurs sans leur fixer des objectifs et sans avoir pour eux des critères de performance. Conformément à la vision du président de la République, nous avons très tôt conçu ces lettres de mission qui n’existaient pas dans notre système diplomatique. Ces outils permettent de fixer des cibles et de dire à un ambassadeur dans un pays ce que nous attendons de lui (une ou deux opportunités parfois trois). A la fin, nous rendons compte au président de la manière dont les opportunités identifiées ont été concrétisées (accords, cofinancement, partenariat…). La lettre de mission permet de cadrer l’action et insuffle un certain dynamisme dans la manière de travailler des ambassadeurs. A cela s’ajoutent les matrices de suivi des actions des ambassadeurs accrédités auprès de notre pays. Nous sommes exigeants vis-à-vis de nos ambassadeurs à l’étranger. Nous sommes aussi exigeants vis-à-vis des ambassadeurs accrédités auprès de notre pays pour que ce qui a été convenu entre les leaders au plus haut niveau ou discuté avec les ministres fasse l’objet d’une action concrète. Je pense que cette décision d’avoir une approche matricielle par laquelle on sait ce qui est attendu de chaque ambassadeur nous a permis de faire des avancées.
Si les ambassadeurs contribuent à attirer des investissements au pays, comment pourrait-on justifier la réduction drastique du nombre de postes diplomatiques ?
Les ambassadeurs sont d’abord des émissaires du président de la République. Toutes les charges dans la République sont des charges précaires et révocables. Ensuite, le président de la République n’a pas fait mystère que, sous lui, nous devions réformer profondément l’Etat. Il ne s’agit pas seulement de la diplomatie.
C’est vrai que le réaménagement de la carte diplomatique et son corollaire qu’est la rationalisation de l’effectif du personnel de nos représentations devaient se faire. Cela a été annoncé par étapes. Nous devons redéfinir notre manière d’être présents au monde. On ne peut pas utiliser des outils du XVIIe ou XVIIIe siècle pour affronter les difficultés du XXIe siècle. C’est pour cela que nous avons décidé de revoir notre carte diplomatique pour la mettre en consonance avec nos moyens, avec la vision stratégique du président de la République et du gouvernement. Mais aussi avec les priorités qui sont les nôtres aujourd’hui.
Vous parlez de chiffres tout à l’heure, je peux vous en donner quelques-uns. Lorsque vous regardez le projet Assurance pour le renforcement du capital humain (Arch) (un programme salué par tous, opposition comme majorité), on se rend compte qu’il nous faut 313 milliards FCfa pour pouvoir le mettre en place et la phase pilote a commencé. Lorsque vous regardez cette réforme sur la formation technique et professionnelle, à la table ronde, nous nous sommes rendu compte qu’il nous faut un minimum de 300 milliards F Cfa. Tout cela, ce sont nos ressources d’abord et, ensuite, celles que nous devons mobiliser à l’étranger. C’est tous les secteurs qui subissent une transformation profonde.
Il y a des modes de représentation sur le plan international aujourd’hui. Il y a des pays plus riches que le Bénin avec qui nous sommes en relation mais qui n’ont pas d’ambassades à Cotonou. Pourquoi le Canada a son ambassade à Ouagadougou ? Pourquoi la Suisse a son ambassade à Accra ? C’est bien parce que la modalité de la représentation de la multi-accréditation permet à un Etat de maintenir cette relation avec les pays mais en réduisant les charges administratives. C’est pour cela que nous avons décidé, dans un premier temps (2016), nous l’avons refait en 2019 et aujourd’hui le moment est venu d’avoir une carte diplomatique très allégée mais renforcée. Nous aurons des pôles régionaux (Paris, Washington…). Nous serons présents sur tous les continents. Ce que nous aurons aussi, c’est des ambassadeurs non-résidents qui, à partir de Cotonou avec les moyens, opéreront. J’ai donné l’exemple de la Suède dont l’ambassadeur réside dans la capitale Stockholm mais agit ici avec efficacité. J’ai donné l’exemple des ambassadeurs thématiques (l’eau, le climat…) que nous n’avons pas encore. C’est une modernisation de l’outil. On ne peut pas baser notre diplomatie sur des dogmes qui sont dépassés, sur des modes de représentation qui ne sont plus efficaces.
Je me suis entretenu avec plusieurs de mes homologues, notamment celui de Singapour qui m’a montré la manière dont ce pays est arrivé à avoir une machine diplomatique efficace avec moins d’ambassadeurs à l’étranger. Cela coûte cher. En 2017, nous avons rappelé à Cotonou une centaine d’agents mais personne ne l’a ressenti ici parce que nous avons rationalisé les procédures.
Combien d’ambassades restera-t-il à l’étranger ?
Nous aurons un peu plus d’une dizaine d’ambassades à l’étranger. Cela nous suffira si nous savons mettre l’intelligence, la détermination mais aussi la bonne volonté pour pouvoir conduire notre action diplomatique. Cela ne veut pas dire que notre diplomatie s’affaiblit. Au contraire ! Elle devient plus tonique.
Il y a l’émotion mais aussi la réalité des choses. Premièrement, j’ai cité des pays importants, par exemple l’Inde dont nous avons accueilli le président au Bénin l’année dernière. L’ambassadeur de l’Inde est à Abuja mais c’est l’un des ambassadeurs avec qui je m’entretiens le plus. Les pays avec lesquels nous nous entretenons avant de prendre cette décision comprennent qu’une carte diplomatique évolue. Une carte diplomatique s’adapte à la géopolitique, aux intérêts du moment mais aussi aux besoins à un moment donné. La diplomatie, ce n’est pas de l’affection seulement ; elle doit servir les objectifs de développement. Lorsque vous n’expliquez pas à un pays où vous aviez une ambassade les raisons qui vous poussent à fermer, le pays peut croire que c’est un geste inamical. Lorsque vous dites à ce pays, nous ne rompons pas nos relations mais nous maintenons un ambassadeur qui, à partir de Paris ou de Moscou, va travailler avec vous, ces pays comprennent, surtout quand vous leur dites que c’est pour répondre à des besoins aussi essentiels que la santé, l’éducation.
Nous sommes à un moment où il faut investir dans certains secteurs. Regardez les infrastructures, aujourd’hui, les Béninois sont contents à Cotonou, Porto-Novo, Lokossa, Boukoumbé de voir de belles et solides routes faites dans les règles de l’art, mais cet argent vient de quelque part. Face à la pandémie du coronavirus, les Béninois ont été très impressionnés de voir que, très tôt, le président de la République a donné des instructions pour que nous puissions faire des commandes. Ce n’est pas gratuit! Pendant cette période, les fournisseurs ne demandent que des paiements cash.
Nous faisons une diplomatie de nos moyens. Cela ne veut pas dire que nous ne sommes pas présents dans le monde. Je comprends l’émotion qui existe dans le milieu des diplomates aujourd’hui. Je sais qu’ils sont capables de comprendre qu’entre avoir une belle ambassade dotée de grands moyens dans un pays développé et faire en sorte que l’hôpital à Cotonou ait les moyens de soigner nos parents ou une cantine scolaire, ou encore l’accès à l’eau potable…, ils comprennent bien cela.
Relativement aux engagements du Bénin vis-à-vis des fonctionnaires en poste dans nos missions diplomatiques et par rapport aux organisations, est-ce que le Bénin est à jour de ses cotisations ?
Aujourd’hui, notre pays est à jour de toutes ses cotisations. La nouvelle diplomatie du Bénin, c’est aussi une diplomatie de dignité. Il faut être digne. Il ne faut pas être membre d’une organisation pour qu’à l’heure du vote, vous ne puissiez pas exprimer votre suffrage à cause du non-paiement de cotisation. Nous n’avons pas de diplomates en poste qui ne reçoivent pas leurs salaires pendant deux, trois ou quatre mois. Le chef de l’Etat a instruit notre administration pour que les virements soient faits directement. Nous avons des fonctionnaires qui sont payés quasiment au même moment que ceux qui sont à Cotonou parce que les ressources sont déjà mises à la disposition des ministères dès le départ où on ne gère pas par hasard. Les loyers sont payés et nous avons fait un programme de réhabilitation de plusieurs de nos ambassades. L’image du Bénin à l’étranger s’est améliorée. Aujourd’hui, le Bénin fait partie des pays qui sont respectés.
La diplomatie béninoise s’illustre sur un dossier qui tient à cœur au président de la République : la question de la restitution des biens culturels du Bénin détenus en France. Le Bénin est un leader de cette revendication et c’est à juste titre qu’il brille dans cette diplomatie culturelle que le chef de l’Etat prône…Veuillez nous éclairer davantage.
D’abord, cette demande du Bénin était fondamentale puisque nous avons décidé, en plus de l’agriculture, de faire du tourisme un des éléments de l’accélération de notre croissance. Notre tourisme se nourrit non seulement de nos sites naturels mais aussi de notre patrimoine culturel. C’est à bon escient que, dès août 2016, le chef de l’Etat m’a instruit d’approcher les autorités françaises pour recevoir ces biens qui sont à nous. Nous avons eu un dialogue positif, le discours du président de la République à l’Unesco est un acte fondateur. La partie française a connu une évolution aussi positive dans ce domaine. Nous sommes dans une dynamique qui avance. Notre décision a inspiré la Cedeao qui a fait passer désormais une résolution sur le retour des biens culturels mais aussi l’Union africaine.
Pour ce qui concerne le travail bilatéral qui est en cours avec la France, nous avons un plan de travail commun signé ici à Cotonou. Le ministre de la Culture et moi-même, nous nous sommes rendus à Paris en février pour le point des avancées de la mise en œuvre de ce plan de travail commun. La restitution des vingt-six œuvres annoncée par le président Macron se fera. Nous avons voulu que cela se passe dans de très bonnes conditions. C’est pour cela que nous accélérons le programme de construction de nos musées. La question de la restitution des biens culturels est en bonne perspective. Nous sommes dans une démarche de coopération muséale et patrimoniale avec la partie française. Nous avons aussi prévu d’élargir cette revendication à d’autres pays. Les entretiens sont en cours, je ne peux pas révéler leur contenu mais les perspectives sont assez positives pour que nous puissions atteindre cet objectif.
L’autre chantier sur lequel le chef de l’Etat est champion, c’est l’exemption de visa aux Africains.
Avant de répondre à cette question, permettez-moi de dire un mot sur l’une des thématiques sur lesquelles le président est aussi champion dans le monde. C’est la question des faux médicaments. Souvenez-vous du discours fondateur à Genève où il attirait l’attention sur cette question des faux médicaments. Nous avons pris des décisions très dures. On voit aujourd’hui, avec la pandémie, que c’est une chose à faire.
Pour revenir sur la question de l’exemption de visa, nous avons fait œuvre de précurseurs avec nos amis du Rwanda. C’est à Kigali que le président a pris sa décision. Nous avons exempté les Africains de visa parce qu’on ne peut pas faire l’Unité africaine sur des incantations. Cette décision a permis à d’autres pays de nous donner la réciprocité. Un pays comme le Kenya a signé avec nous un protocole qui fait qu’aujourd’hui, les ressortissants béninois peuvent s’y rendre sans visa avec les passeports diplomatiques et de service, et des facilités avérées pour les passeports ordinaires. Le cas du Maroc est là pour les passeports diplomatiques et de service. Pour les passeports ordinaires, nous sommes en discussions pour que cela aboutisse.
La lutte contre le terrorisme et l’intégration sous-régionale. Le chef de l’Etat pense que les Africains doivent eux-mêmes contribuer à la sécurité dans la sous-région. Qu’en dites-vous ?
Le chef de l’Etat a raison. On ne peut pas lancer tous nos projets de développement si nous ne luttons pas pour notre survie qui est la sécurité, la lutte contre le terrorisme. D’abord, il faut avoir la volonté et se décider à prendre en charge soi-même sa sécurité et c’est ce que le président propose. D’ailleurs, cette sortie du président a permis à la Cedeao d’élaborer un plan qui permettra de mettre des ressources additionnelles pour que nos pays puissent mettre en œuvre leur programme sans attendre que ce soit les partenaires extérieurs qui s’en occupent. Il faut mobiliser ces moyens pour permettre à nos armées, nos services de renseignements mais aussi à nos stratégistes dans ces domaines de travailler. C’est en s’organisant de façon intelligente que nous pouvons lutter efficacement contre le terrorisme. C’est pour cela que, sur un plan plus pratique, au niveau des frontières, j’ai signé un accord avec mon homologue du Togo en décembre dernier. Avant cela, c’était avec le Niger et le Burkina Faso pour pouvoir nous permettre d’avoir des accords transfrontaliers afin d’assurer une mission de veille et l’action de codéveloppement dans ces espaces.
Le pèlerinage à la Mecque : le Hadj. Vous avez initié des réformes là aussi. Quelles sont-elles ?
Le Hadj est un pilier essentiel de la religion musulmane. Parce que ce pèlerinage fait voyager plusieurs milliers de nos compatriotes. C’est important, au titre de la responsabilité de protection, que l’Etat s’investisse comme il le fait pour d’autres confessions religieuses. Je dois vous dire que, depuis 2016, nous sommes allés d’amélioration en amélioration. C’est le président de la République lui-même qui préside les réunions où tout le processus a été revu. Vous savez que nous avons mis en service un site d’accueil et d’hébergement à Akpakpa où désormais les pèlerins ne traînent plus contrairement à ce qui se passait. Nous avons, sur instructions du président de la République, revu tout le processus pour que les conditions de voyage, d’hébergement, de restauration, de santé mais aussi toute l’assistance dont nos compatriotes ont besoin puissent s’améliorer.
Je me suis rendu en Arabie Saoudite plusieurs fois et nous avons renégocié l’accord de coopération sur l’organisation du Hadj et signé un nouvel accord. J’ai rencontré le ministre des Affaires étrangères chargé des relations avec l’Afrique pour montrer que le Bénin veut un Hadj de qualité pour ses compatriotes. C’est vous dire que cette question fait partie des réformes et que tout a été revu pour que personne n’abuse de la vulnérabilité de nos parents qui viennent des contrées éloignées et qui dormaient à la belle étoile. Le président de la République a décidé que cela prenne fin. Le temps est venu pour que le Bénin fasse les choses telles qu’il se doit dans tous les domaines. Je suis très heureux de cette avancée que nous avons faite dans l’organisation du Hadj.