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An-Nasr Vendredi #237 (Le principe de la choura dans la gestion du pouvoir)
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- Titre
- An-Nasr Vendredi #237 (Le principe de la choura dans la gestion du pouvoir)
- Editeur
- An-Nasr Vendredi
- Date
- 13 juin 2008
- numéro
- 237
- nombre de pages
- 4
- Sujet
- Charia
- Association des Élèves et Étudiants Musulmans au Burkina
- Démocratie
- Civilisation occidentale
- Couverture spatiale
- Médine
- Détenteur des droits
- Association des Élèves et Étudiants Musulmans au Burkina
- Langue
- Français
- Contributeur
- Frédérick Madore
- Identifiant
- iwac-issue-0000407
- contenu
-
N°237 du 13 juin 2008
Lorsque vient le secours d'Allah ainsi que la victoire, célèbre les louanges de ton Seigneur et implore son pardon. La bonne gouvernance, voilà les maîtres mots qui font la une de l’actualité car se situant au cœur de toutes les stratégies du monde contemporain. Les relations internationales (surtout l’aide aux pays en voie de développement) sont désormais conditionnées par ce sacré saint principe de bonne gouvernance défendu par les occidentaux qui sont passés pour maîtres en la matière.
Ils pensent qu’en dehors de la démocratie, on ne peut avoir de meilleur système de gouvernance pour gérer les hommes. Il ne faut surtout pas parler de la religion qui est considérée de façon générale, comme s’occupant uniquement des rapports entre les hommes et l’être transcendant (Dieu). Compris dans ce sens, la religion ne doit s’occuper que de la dimension spirituelle de la vie de l’homme et non de la politique. entendue comme la gestion de la cité. Cependant, si cette définition réductrice cadre avec certaines religions, l’islam fait l’exception. Plus qu’une religion, l’islam est un code de vie embrassant tous les aspects de la vie de l’homme : spirituel, social, économique, culturel, politique. Certains savants, notamment des occidentaux, face à l’actualité dans les pays musulmans, sont tentés de renier la dimension politique de l’islam. Or le regain des mouvements politico-religieux islamiques réclamant leur autodétermination ou l’instauration de la charia comme loi de gouvernance devrait plutôt être un argument de plus pour les convaincre de la réalité politique de l’islam. L’islam, situant l’homme au cœur de tous les enjeux du monde, considère la vie de l’homme dans toute sa globalité. D’après le prophète : « il n’est pas permis à deux personnes se trouvant dans le désert de ne pas se désigner un chef ». Donc fondamentalement, le principe de leadership est reconnu en islam. Si deux personnes isolées dans le Désert doivent se trouver un chef. N’est-ce pas tout un pays qui doit vivre dans l’anarchie ? Et s’il faut se désigner un chef, ce n’est sûrement pas aller chercher un non-musulman ! Dieu dit : « Obéissez à Dieu, obéissez au prophète et à ceux qui détiennent le pouvoir parmi vous... » (Sourate 4, verset 59). C’est donc parmi les musulmans que le choix doit s’effectuer.
Nous n’avons qu’à considérer le dernier messager de l’islam, le prophète Mohammad. Il était à la fois prophète, imam (guide spirituel) et chef de l’État (amiroul mouminin) des croyants. Il a réuni en sa personne le pouvoir spirituel et le pouvoir temporel au sein de la communauté.
Ceux qui reconnaissent parmi les savants occidentaux la réalité de la politique en islam prétendent que la gouvernance islamique est théocratique, dans laquelle le pouvoir est donné au calife par Dieu et celui-ci gouverne par des décrets divins. Dans le principe général, cela se comprend aisément, car la foi musulmane nous enseigne que tout ce que l’homme acquiert est par la volonté de Dieu. Dieu. Dieu est le détenteur de tout pouvoir, de tout avoir et de tout savoir. Il les dispense à qui il veut. Mais dans la compréhension occidentale, on veut en réalité opposer la gouvernance islamique à la démocratie occidentale. Cette opinion considère que le pouvoir en Islam est imposé par Dieu au peuple qui se trouve géré par des décrets divins sans qu’il n’ait son mot à dire. Cette compréhension du pouvoir en Islam témoigne de la plus grande ignorance que ces gens ont de l’islam ou de leur mauvaise foi. Car ils veulent stigmatiser l’islam. Qu’à cela ne tienne, en islam le pouvoir est une émanation du peuple qui en investit l’un d’eux. Il est donné au plus méritant et au plus apte à l’assumer au regard de ses compétences techniques, ses connaissances islamiques et ses qualités morales. Ce pouvoir, qu’il soit au niveau d’un État, d’une communauté, d’une association ou d’un groupe quelconque, ne s’acquiert pas par une compétition malsaine comme dans la démocratie. Encore moins, aucun musulman ne doit Convoiter ou prétendre à une responsabilité personnellement. C’est le peuple, à travers un collège électoral, qui va désigner les éventuels candidats capables d’assumer la responsabilité en question et les soumettra par la suite au suffrage populaire. Les califes bien guidés ont été investis selon ce mode (baya ou allégeance). Donc, il est clair que l’élection en islam d’un responsable reste très différente de celle de la démocratie, où le pouvoir est conquis par ceux qui possèdent plus de moyens (milliardaires, détenteurs de médias, appartenant à des puissants lobbys) et les plus grands démagogues.
Même dans le cas du prophète bien-aimé, qui a été un élu de Dieu, il faut noter qu’il a bénéficié d’une adhésion volontaire des croyants qui l’ont ainsi accepté comme messager de Dieu et comme leur chef. Dieu dit : « Pas de contrainte en religion ! Car la voie droite se distingue de l’errance » (C2V256). Les croyants ont donc adopté le prophète comme guide de façon libérale. De plus, à plusieurs circonstances critiques, Ils ont toujours renouvelé leur allégeance au prophète, tel qu’à l’occasion des guerres. À ce propos, Dieu dit : « Ceux qui prêtent serment d’allégeance ne font que prêter serment à Dieu. La main de Dieu est au-dessus de leurs mains. Quiconque viole le serment ne le viole qu’à son propre détriment ; et quiconque remplit son engagement envers Dieu, Il lui apportera bientôt une énorme récompense. » (c48v10).
En somme, l’islam donne aux croyants la latitude de choisir eux-mêmes leur leader (président, imam, calife et toute autorité nécessaire à un groupe). Cependant, qu’en est-il de la gestion du pouvoir en islam ? Dans le monde contemporain, on rencontre plusieurs théories de gestion politique telles que la démocratie, le socialisme, le communisme, l’autoritarisme. L’islam a aussi une théorie de gouvernance propre à elle, unique en son genre et qui tranche avec toutes les autres théories. C’est une nouvelle théorie que l’humanité, dans sa civilisation ancienne ou moderne, n’a connue. Cette théorie est appelée... La choura. La choura est traduite en français par la consultation. C’est un mode de gouvernance qui préconise la participation de tout le peuple ou de tous les administrés à la prise de toutes décisions les engageant. Elle consiste pour le leader (le responsable) à chaque fois qu’il veut prendre une décision ou entreprendre quelque chose, à consulter ses administrés avant de se décider. Elle a été instaurée par Dieu dans le saint Coran en ces termes : « C’est par quelque miséricorde de la part de Dieu que tu (Mohammad) as été doux envers eux ! Mais si tu étais rude, au cœur dur, ils se seraient enfuis de ton entourage. Et consulte-les à propos des affaires ; puis une fois que tu t’es décidé, confie-toi donc à Dieu, Dieu aime en vérité ceux qui Lui font confiance ». (Coran 3:159). Ainsi, Dieu ordonne au prophète et à tous les responsables de consulter les administrés avant de se décider. S’agissant des croyants, Dieu, parlant des caractéristiques des meilleurs parmi eux, dit : « qui répondent à l’appel de leur Seigneur, » accomplissent la salat, se consultent mutuellement à propos de leurs affaires, dépensent de ce que nous leur attribuons ». C42V38. L’une des vertus des croyants est donc de se consulter mutuellement sur leurs affaires.
La choura implique en premier lieu, l’obligation de prendre en compte l’opinion de tous, sans distinction de majorité ni de minorité et en second lieu celle d’adopter la solution qui paraît la meilleure et ceci après une confrontation approfondie et objective des opinions suggérées et non par simple numération des voix.
Cela procède d’une démarche scientifique et pratique permettant de faire en sorte qu’aucune opinion ne soit adoptée ou rejetée pour une raison de majorité ou de minorité, mais que toutes les opinions soient prises en considération et bien approfondies et pesées pour en dégager la meilleure pour l’intérêt collectif.
La consultation écarte toute dictature de la majorité sur la minorité comme dans la théorie démocratique qui, malheureusement, est celle adoptée comme la meilleure et que l’on tente d’imposer à tous les pays du monde. Selon ses promoteurs, la démocratie est de gouverner le peuple par le peuple. Or, force est de constater que la démocratie telle que pratiquée dans nos pays n’est que la domination de la minorité (l’opposition) par la majorité (parti au pouvoir). Mais la choura met la majorité et la minorité au même rang, sans laisser à quiconque l’impression d’avoir été négligé.
Ainsi, le prophète, durant toute sa mission, a mis en œuvre cette mode de gouvernance, notamment quand il était à la tête de la cité-État de Médine, qui abritait à la fois des musulmans, des juifs, des chrétiens dans une cohésion totale. Cet État a connu un rayonnement sans pareil jusqu’à atteindre toute la péninsule arabique et même au-delà. De même, les califes bien guidés ont poursuivi leur gestion de l’État islamique par le même mécanisme jusqu’à la fin de leur période. C’est quand le pouvoir a été perverti, dynastique, et que le principe de la bonne gouvernance islamique a été abandonné que va intervenir le déclin de l’empire musulman. Ainsi, l’empire sera balkanisé et transformé en plusieurs royaumes dans lesquels le pouvoir est devenu familial et transmis de père en fils. Dès lors, le pouvoir échappa au peuple qui est obligé désormais de subir des brimades des régimes autoritaires qui demeurent jusqu’aujourd’hui.
C’est pourquoi l’Occident démocratique ne s’empêche pas d’aller destituer ces régimes arabes despotiques pour soi-disant apporter à leur peuple la démocratie. On peut citer le cas récent du pouvoir de Saddam en Irak. L’on comprend alors aisément la croissance des mouvements et organisations politiques islamiques dans les pays musulmans aspirant à l’instauration de régimes islamiques basés sur la charia.
Malheureusement, ils se heurtent aux répliques des pouvoirs en place avec la bénédiction des Occidentaux qui voient d’un mauvais œil l’émergence des régimes islamiques. Et tout cela s’accompagne d’un cycle de violence sans précédent à travers le monde que nul ne saura cautionner. Cependant, on On ne peut diriger un peuple que suivant ses aspirations. Même dans les pays démocratiques, c’est le même principe avec le pluralisme des partis ayant des programmes différents de gestion du pouvoir. Tenter de renier ce fait conduit toujours à la violence. Donc, les pays musulmans ont intérêt à revoir leurs copies. De même, plusieurs de nos organisations non gouvernementales et associations islamiques doivent être gérées suivant la méthode de la choura. Le dysfonctionnement, l’inorganisation et le retard de la oummah sont imputables à l’absence de ce mécanisme dans sa gestion. En revanche, l’application de la choura nécessite une organisation institutionnelle conséquente des États ou des associations islamiques. Elle implique la mise en place d’organes techniques et scientifiques consultatifs dans chaque domaine qui se chargeront de recueillir les différentes opinions, les approfondir puis les juger pour faire des propositions justes aux responsables qui décideront en dernier ressort. Tout comme la démocratie exige. La mise en place des institutions et des textes réglementaires, la choura ne s’applique pas dans le vide. En outre, elle ne saurait être isolée des autres principes du leadership islamique que sont la justice et la liberté d’expression. Encore faut-il que tout ceci soit construit sur une spiritualité soutenue des responsables. Imam — -J* 74
Fait partie de An-Nasr Vendredi #237 (Le principe de la choura dans la gestion du pouvoir)